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Simonetta Sommaruga bastonne l’économie suisse

Baptême du feu pour Simonetta Sommaruga, lundi à Bruxelles, qui s'entretient ici avec son homologue allemand Thomas de Maiziere. Keystone

La nouvelle ministre suisse de la Justice Simonetta Sommaruga a adressé une volée de bois vert à l’économie helvétique pour sa passivité face à l’initiative conservatrice «pour le renvoi des étrangers criminels», soumise au vote du peuple le 28 novembre.

La conseillère fédérale a participé lundi à Bruxelles à une réunion du comité mixte chargé de gérer l’espace Schengen, dont la Suisse fait partie. En marge de cette réunion, «plusieurs ministres (de l’Intérieur des Vingt-Sept) m’ont parlé» de la votation du 28 novembre, dont l’enjeu préoccupe de plus en plus l’Union européenne.

L’initiative de l’Union démocratique du centre (UDC / droite conservatrice) qui réclame l’expulsion automatique des étrangers condamnés à des peines criminelles en Suisse, est en effet jugée incompatible avec l’accord sur la libre circulation des personnes que Berne et l’UE ont conclu en 1999.

La législation européenne stipule que les expulsions de criminels doivent être fondées sur des motifs de sécurité, de santé ou d’ordre public et, dans ce contexte, que la situation particulière de chaque individu doit être prise en compte.

Attention à la «clause guillotine»

Simonetta Sommaruga a «surtout insisté» sur l’existence d’un contre-projet du gouvernement fédéral dont l’adoption, selon elle, permettrait de gommer les «points problématiques» de l’initiative de l’UDC – l’automaticité des expulsions, en particulier – et, partant, d’épargner à la Suisse les affres d’éventuelles contre-mesures européennes. Les plus pessimistes craignent, à Berne, que l’Union actionne la «clause guillotine» qui lie les sept accords du premier paquet bilatéral ficelé en 1999 au cas où l’UDC remporterait la victoire le 28 novembre.

Dans ce contexte, la ministre helvétique a pris à partie Economiesuisse, la fédération suisse des entreprises, «qui n’a pas pris position» pour le contre-projet du gouvernement ou contre l’initiative de l’UDC. «Je m’étonne de l’attitude de l’économie suisse», alors que l’acceptation de l’initiative «touchera directement aux relations économiques» entre la Suisse et l’UE, a-t-elle souligné.

Malgré tout, Simonetta Sommaruga ne désespère pas que le contre-projet du Conseil fédéral soit approuvé par le peuple, le 28 novembre. Afin de le convaincre de faire le bon choix, le gouvernement «l’informera en toute transparence sur ce qui est en jeu» avant la date de la votation, a-t-elle annoncé.

De toute façon, a (maladroitement?) laissé entendre la ministre, une défaite du gouvernement à la fin du mois ne sera peut-être pas irréversible. «Il faudra trouver des chemins» – celui de la Cour européenne es droits de l’homme? – pour éviter le pire à Bruxelles, a-t-elle souligné, en admettant: «Cela ne sera pas facile et cela prendra du temps.»

Libération des visas

Une autre décision sera sans doute plus facile et rapide à prendre: celle de supprimer l’obligation de visa pour les ressortissants albanais et bosniens qui souhaitent se rendre en Suisse pour une durée inférieur à trois mois. Cette libéralisation sera effective dès la mi-décembre sur le territoire de l’Union, sont convenus le 8 novembre les ministres de l’Intérieur des Vingt-Sept, au terme d’âpres débats.

«Il est prévu que la Suisse reprenne cette décision», a affirmé Simonetta Sommaruga, en notant que les Européens «partagent les préoccupations» de la Suisse relative à l’éventualité d’afflux massifs de migrants ainsi qu’à une multiplication ingérable des demandes d’asile et ont dans ce cadre placé des garde-fous dont Berne semble se contenter.

La Commission européenne sera notamment chargée de surveiller de très près la situation et, en cas de problème, pourra proposer la suspension à très court terme de l’abolition des visas. Cette épée de Damoclès pèsera non seulement sur l’ensemble des pays des Balkans occidentaux qui ont déjà conclu des accords de libéralisation avec l’UE, mais également de l’Ukraine et de la Moldavie, avec lesquelles Bruxelles est entré en négociations.

Depuis le 12 décembre 2008, la Suisse fait partie de l’Espace Schengen, d’une surface d’environ 3,6 millions de km2 où quelque 400 millions de personnes peuvent franchir librement les frontières.

Les contrôles systématiques ont été remplacés par des contrôles de police volants dans les zones frontalières. Mais l’accord de Schengen ne concerne que les personnes.

Le trafic des marchandises restera soumis au contrôle des gardes-frontière, la Suisse ne faisant pas partie de l’Union douanière européenne.

En septembre 2009, la Suisse et l’UE ont signé un nouvel accord qui prévoit la participation de la Suisse aux activités de l’Agence européenne pour la gestion de la coopération opérationnelle aux frontières extérieures (FRONTEX).

La Suisse participe aux réunions du comité mixte Schengen du Conseil des ministres de la Justice et des Affaires intérieures de l’UE.

1961: Sept pays, dont la Suisse, signent le traité instaurant l’Association européenne de libre-échange (AELE).

1963: La Suisse rejoint le Conseil de l’Europe.

1992: Le gouvernement demande l’ouverture de négociations pour adhérer à l’Union européenne. La candidature suisse est toujours en suspens.

2006: Le rapport du Conseil fédéral sur l’intégration européenne explique clairement que la politique européenne de la Suisse est basée sur les relations bilatérales.

Depuis 1972, la Suisse et l’Union européenne ont signé près de 120 accords.

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