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Pas de durcissement contre la fumée passive

Keystone

L’initiative populaire contre le tabagisme passif est sèchement refusée par le peuple dimanche. Echec aussi pour l’initiative demandant la suppression de la valeur locative pour les retraités. En revanche, l’arrêté fédéral sur la promotion de la musique a été plébiscité.

Lancée par la Ligue pulmonaire suisse et d’autres organisations de santé, l’initiative «Protection contre la fumée passive» demandait une législation plus stricte, afin de mieux protéger la population contre le tabagisme passif.

Actuellement, la Loi fédérale contre le tabagisme passif, entrée en vigueur en mai 2010, interdit déjà de fumer dans les espaces accessibles au public ou qui servent de lieu de travail à plusieurs personnes. Mais elle admet des exceptions dans le secteur de l’hôtellerie-restauration. Il est possible de maintenir des locaux fumeurs avec service, s’ils sont séparés, et les petits établissements de moins de 80 m² peuvent autoriser la fumée s’ils le souhaitent.

Mais cette loi fédérale n’est qu’un minimum. Les cantons sont libres d’édicter, s’ils le veulent, des règles plus contraignantes. Aujourd’hui, onze d’entre eux s’en tiennent simplement à la Loi fédérale, alors que quinze autres se montrent plus restrictifs.

Une occasion manquée

L’initiative entendait mettre fin aux différentes exceptions accordée à l’hôtellerie-restauration. Du coup, l’ensemble de la Suisse aurait été soumise aux mêmes règles que celles en vigueur dans les cantons les plus stricts.

Mais le peuple n’a pas suivi. La proposition a été refusée par 65,4% des citoyens et par tous les cantons à l’exception de Genève.

Parmi les partisans du texte, la déception est grande. «Le rejet de l’initiative est une occasion manquée», a estimé Jacques de Haller. Mais pour le président de la Fédération des médecins suisses, ce refus clair «ne doit pas être l’occasion de démanteler ce qui a été mis en place dans les cantons». Pour l’Union syndicale Suisse aussi, ce rejet constitue une occasion manquée l’améliorer la protection de la santé sur le lieu de travail.

Du côté des opposants à l’initiative, c’est bien sûr la satisfaction. Notamment de la part de GastroSuisse, l’organisation faîtière de l’hôtellerie-restauration. «En mettant au placard la solution extrême de la Ligue pulmonaire, les Suisses font preuve de bon sens, a commenté son président Klaus Künzli. Nous avons réussi à démontrer à la population que cette initiative était radicale et inutile.»

Revoir le système

L’initiative «Sécurité du logement à la retraite» a également été refusée, mais de manière beaucoup moins nette. Un peu plus de la moitié seulement des citoyens (51,7%) ont glissé un non dans l’urne. La majorité n’est pas atteinte non plus au niveau des cantons, mais là aussi les avis sont très partagés, puisqu’une dizaine d’entre eux ont accepté l’initiative.

Cette initiative lancée par l’Association suisse des propriétaires fonciers demandait que les propriétaires arrivés à l’âge de la retraite puissent choisir de ne plus être taxés sur la valeur locative. Pour mémoire, un propriétaire doit inscrire dans sa déclaration d’impôts ce que l’on appelle une valeur locative. Il s’agit d’un revenu fictif correspondant à ce qu’il aurait dû dépenser pour louer un bien immobilier comparable au sien. En contrepartie, il peut déduire de ses revenus les intérêts du prêt hypothécaire ainsi que les frais effectifs pour l’entretien et la réparation de son bien immobilier.

Les opposants à l’initiative sont satisfaits du rejet du texte. Toutefois, «le résultat très serré montre qu’il faut une refonte totale du système», a indiqué Hildegard Fässler, conseillère nationale socialiste et membre du comité pour le non.  

«L’impôt sur la valeur locative est mal accepté par la population, a-t-elle souligné. Les gens ne comprennent pas pourquoi ils sont taxés sur un revenu fictif. Maintenant que l’initiative, qui proposait une solution injuste, a été rejetée, il faut que le Parlement empoigne la question.»

Plébiscite pour la musique

Ainsi que les sondages le prévoyaient, l’arrêté fédéral visant à améliorer l’éducation musicale des jeunes a bénéficié d’un large soutien. L’objet a été plébiscité par près des trois quarts des citoyens (72,9%) et à l’unanimité des cantons.

En Suisse, l’éducation musicale est de la responsabilité des cantons. Or les conditions d’accès et la qualité de l’offre ne sont pas les mêmes selon les cantons. L’arrêté vise à améliorer cette situation en posant un certain nombre de principes.

Tout d’abord, il déclare que la Confédération et les cantons encouragent la formation musicale. Ensuite, il charge la Confédération et les cantons de fixer des principes pour l’accès des jeunes à la pratique de la musique et pour encourager les plus doués. Enfin, il précise que si les efforts des cantons n’aboutissent pas à une harmonisation des objectifs, la Confédération légifère.

La conseillère aux Etats Christine Egerszegi (PLR/AG) est ravie par ce clair soutien populaire. «Un tel résultat a été rendu possible par une campagne durant laquelle musiciens amateurs et professionnels ont tiré à la même corde», a remarqué la présidente du comité d’intérêts «Jeunesse et Musique».

Cette dernière espère que l’application de l’article constitutionnel se fasse assez rapidement. «Le ministre de la Culture Alain Berset l’a assuré au comité, a-t-elle dévoilé. Une première rencontre est déjà prévue avec l’Office fédéral de la culture jeudi prochain. Celui-ci y présentera ses propositions pour l’application du texte.»

Le Conseil fédéral affichait la mine des grands jours après sa victoire. Le peuple a voté en conformité avec ses recommandations.

En six mois, le peuple a voté trois fois sur des initiatives concernant la fiscalité des propriétaires de logement, a rappelé la ministre des Finances Eveline Widmer-Schlumpf. Satisfaite de ce nouveau «non» à une traitement de faveur injuste, elle a reconnu que le résultat avait été obtenu de justesse et qu’il témoignait de questions soulevées par l’imposition de la valeur locative.

Ce n’est certainement pas la dernière fois que le peuple votera sur le sujet, a-t-elle estimé. Mais le verdict de dimanche montre qu’une future réforme de l’imposition des propriétaires devra accorder une grande place à l’égalité de traitement.

Pour ce qui de la promotion de la formation musicale, le ministre de la Culture Alain Berset s’est réjoui du résultat très net sorti des urnes. A l’avenir, tous les enfants de Suisse pourront apprendre à jouer d’un instrument, indépendamment des moyens de leurs parents. «Ce vote confirme l’importance que les Suisses accordent à la culture et à l’égalité des chances», selon lui.

Les cantons sont responsables d’appliquer l’article constitutionnel dans les écoles. Quant à la formation musicale extra-scolaire, l’Office fédéral de la culture devra se mettre à l’œuvre dès lundi.

S’exprimant ensuite en sa qualité de ministre de la Santé, Alain Berset a indiqué que le refus de l’initiative de la Ligue pulmonaire n’est pas un «non» à la protection contre la fumée passive, qui reste importante. Selon lui, les citoyens ont simplement refusé de modifier une loi deux ans après son entrée en vigueur.

Les réglementations fédérale et cantonales ont permis une protection très étendue contre la fumée passive. Elles sont efficaces. Et Alain Berset de souligner leur impact remarquable sur la santé publique: recul des hospitalisations liées aux effets du tabagisme, millions de francs d’économies. «La loi actuelle est un succès», a-t-il conclu.

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