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Pour voir l’intérieur des artères au micron près

Détail d’un millimètre d’une patte de mouche, vue en radiologie synchrotron. epfl, Postech et Academia Sinica

Développée depuis des années entre Lausanne, Pohang et Taïwan, la radiologie synchrotron ouvre désormais de nouvelles perspectives à l’imagerie médicale.

Avec de faibles doses de rayons X et sans injection de produits de contraste, il donne des images d’une précision inégalée.

Radiographier les veines et les artères du corps humain avec une résolution telle qu’elle permet de voir des détails de moins d’un micron (millionième de mètre), c’est désormais possible.

Nommée «radiologie synchrotron», cette méthode est ultra-précise et rapide comme l’éclair. Elle permet de déceler des mouvements qui s’effectuent en une fraction de seconde.

Et ce n’est pas tout. Non seulement, le patient serait soumis à des doses de rayons X bien moindres que lors d’une radio classique, mais en plus, on peut le dispenser des toujours pénibles injections de produits de contraste.

Collaboration helvético-asiatique

Depuis dix ans, l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL) travaille sur cette technologie avec son homologue de Pohang, en Corée du Sud et l’Academia Sinica, de Taïwan.

L’année dernière, les équipes des trois écoles ont inauguré une machine expérimentale en Corée et les premiers résultats viennent de faire l’objet d’une publication dans «Physics in medicine and biology», revue scientifique de référence.

«Au départ, on ne pensait pas spécifiquement à une utilisation en médecine, explique le professeur Giorgio Margaritondo, chef du projet à l’EPFL. C’est plutôt la technique en elle-même qui nous intéressait».

Les trois écoles ont déposé un brevet international et garderont donc le contrôle sur la technique qu’elles ont mis au point. Mais elles n’en développeront pas elles-mêmes les applications médicales.

«Il existe des programmes en Italie et dans d’autres pays pour faire des essais sur des patients humains, ajoute Giorgio Margaritondo. Mais les validations prendront beaucoup de temps».

«Quant à nous, nous avons beaucoup à faire ailleurs», conclut celui qui est aussi doyen de la Faculté des sciences de base de l’EPFL.

Le mystère des «bulles de métal»

Au cours de son développement, la radiologie synchrotron a en effet déjà permis d’aboutir à des résultats étonnants.

Ainsi, c’est grâce à elle que l’on a pu percer le mystère d’un phénomène bien connu de tous ceux – industriels ou artisans – qui font du placage de métaux.

L’œil très acéré du nouvel appareil a pu déceler les microscopiques bulles d’hydrogène qui se forment au moment de l’application d’un métal sur l’autre et qui minent la couche de placage en la fragilisant.

La technique est également utilisée pour détecter d’autres bulles, qui se forment lors de la fabrication du béton. Ou pour la vérification des microcomposants des circuits électroniques.

Comment ça marche?

A la base, la radiologie synchrotron est aux rayons X ce que le laser est à une source de lumière classique. Au lieu de diffuser le rayonnement dans toutes les directions, on le concentre en un faisceau de rayons presque parallèles.

En outre la formation des images radiologiques ne se base pas sur l’absorption de la lumière, mais sur sa diffusion et sur sa réfraction.

«Imaginez un verre de vin, explique Giorgio Margaritondo. On peut avoir une image par la différence d’absorption. Le vin absorbe une partie de la lumière et donne la couleur rouge. Mais on peut aussi voir les bords du verre, parce qu’ici, vous avez d’autres phénomènes de diffusion des rayons de lumière».

D’où le succès de la méthode en imagerie médicale. Ainsi une veine, entourée essentiellement de tissus de même nature, sera très difficile à détecter par l’absorption. Si l’on se concentre sur ses parois, par contre, elle devient parfaitement visible.

swissinfo, Marc-André Miserez

– La technique de la radiologie synchrotron est le fruit de dix ans de recherche et de développement entre les Ecoles polytechniques de Lausanne et de Pohang (Corée du Sud) et l’Academia Sinica de Taïwan.

– Elle fait l’objet d’un brevet international déposé par les trois écoles.

– Toutefois, l’EPFL ne prévoit pas d’en développer les applications médicales, préférant se concentrer sur son apport à la recherche fondamentale.

– Dans le domaine de l’imagerie diagnostique, la radiologie synchrotron permet de détecter des détails de la taille d’un micron et des mouvements d’une fraction de seconde.

– Le patient est soumis à des doses de rayons X bien moindre que lors d’une radio classique et l’injection de produits de contraste dans les veines devient superflue.

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