Des perspectives suisses en 10 langues

Prison avec sursis pour Erhard Loretan

Erhard Loretan entre, accablé et amaigri, dans la salle d'audience. Keystone

L'alpiniste avait mortellement secoué son fils de sept mois. Il a écopé de quatre mois de prison avec sursis pour homicide par négligence.

Le Ministère public aurait souhaité une peine plus lourde. La Cour du Tribunal pénal de la Gruyère ne l’a pas suivi.

Le vainqueur des 14 sommets de 8.000 mètres se retrouvait au centre du premier procès médiatique ayant trait en Suisse au syndrome jusque-là méconnu du bébé secoué.

La Cour s’est montrée plus clémente que le Ministère public qui avait requis dix mois avec sursis contre le guide de 44 ans.

Le tribunal a estimé qu’il avait été atteint par son acte. Elle a aussi tenu compte des regrets exprimés par l’alpiniste.

Loretan devra en outre s’acquitter d’une amende de 1.000 francs et des frais de la cause.

Geste impulsif

Alors qu’il avait l’habitude des situations difficiles, Erhard Loretan a perdu les nerfs face à son propre fils, ce qui n’est pas compatible avec son image d’alpiniste, a en outre relevé la Cour.

Les juges ont souligné la violence du geste qui a entraîné la mort d’un enfant qui de plus n’était pas pénible, selon le témoignage de sa mère.

Décrit par ses amis comme une personne calme et réfléchie, le célèbre montagnard est aussi apparu mardi comme un homme ayant peine à exprimer ses sentiments.

C’est en des termes un peu rudes qu’il a évoqué le geste fatal, «impulsif», qu’il a eu ce 23 décembre alors qu’il gardait seul son enfant à son domicile de Crésuz en Gruyère.

«Je regrette mon geste. J’ai perdu le contrôle, mais jamais je ne me serais douté des conséquences. J’avais vu grandir mon fils né prématuré, il me paraissait solide. Ce n’est qu’après l’autopsie, que j’en ai réellement pris conscience», a affirmé Erhard Loretan.

Excédé par les pleurs de son fils, l’alpiniste l’avait secoué, à deux reprises, avant d’appeler les secours.

L’enfant était décédé le lendemain à l’hôpital à Berne des conséquences d’un traumatisme cranio-cérébral sévère, typique du syndrome du bébé secoué.

Comportement inexcusable



Un comportement qualifié d’«inexcusable» par la procureure générale du canton de Fribourg Anne Colliard.

«J’ai peine à comprendre comment une personne qui a tutoyé la mort plusieurs fois, perde ainsi les nerfs face à un bébé», a-t-elle déclaré.

La procureure a encore souligné la violence des secousses infligées au bébé. Pour le Ministère public, Erhard Loretan savait comme tout un chacun que les bébés sont fragiles. Son fils pleurnichait seulement. Il n’était pas pénible, a souligné Anne Colliard.

Selon elle, l’alpiniste a manqué à son devoir de prudence et s’est simplement rendu coupable d’un «geste volontaire d’impatience».

Négligence inconsciente



Pour la défense au contraire, Loretan ne pouvait être accusé que d’un acte de négligence inconsciente.

L’alpiniste ne pouvait alors appréhender les conséquences de son geste alors mal connues. Il était stressé par sa douleur à l’épaule et inquiet pour sa femme partie en excursion.

«Mon client est prêt à accepter une peine n’excédant pas un mois de prison si ce jugement peut avoir un effet de prévention générale», a déclaré Me Bruno Charrière.

L’affaire avait eu un fort retentissement médiatique. Elle a surtout permis d’avoir un effet préventif face à ce phénomène du syndrome du bébé secoué, encore mal connu du public en Suisse.

swissinfo et les agences

En conformité avec les normes du JTI

Plus: SWI swissinfo.ch certifiée par la Journalism Trust Initiative

Vous pouvez trouver un aperçu des conversations en cours avec nos journalistes ici. Rejoignez-nous !

Si vous souhaitez entamer une conversation sur un sujet abordé dans cet article ou si vous voulez signaler des erreurs factuelles, envoyez-nous un courriel à french@swissinfo.ch.

SWI swissinfo.ch - succursale de la Société suisse de radiodiffusion et télévision

SWI swissinfo.ch - succursale de la Société suisse de radiodiffusion et télévision