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Quand tabac, joint et alcool riment avec problèmes

Une grosse consommation va de pair avec des problèmes personnels. Keystone

Chez les adolescents, la consommation abusive de tabac, d'alcool et de cannabis est liée aux problèmes psychologiques, sociaux et familiaux.

Selon une étude financée par l’Office fédéral de la santé publique (OFSP), la prise en charge de cette catégorie de jeunes doit être précoce et globale pour être efficace.

Cette étude est signée du Service universitaire de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent (SUPEA), à Lausanne.

«Elle nous donne une image de la réalité dans le canton de Vaud, indique Sandra Meier. Et nous permet de voir qui consomme et qui a besoin des institutions de prise en charge et de traitement.»

Pour la porte-parole de l’OFSP, «cette étude est utile d’autant qu’il existe très peu de données concernant les jeunes au sein des institutions ou en contact avec elles.»

Pour une dépénalisation

«On voit d’un côté des consommateurs sans problèmes et de l’autre des jeunes dont la consommation abusive est presque toujours liée à d’autres difficultés», note pour sa part le chef du Service de promotion de l’OFSP.

Ce constat plaide pour la dépénalisation de la consommation de cannabis, en conclut Bernard Meili. Qui estime qu’un assouplissement pour les consommateurs non problématiques doit être doublé d’un renforcement des mesures de protection de la jeunesse.

Concrètement, le SUPEA a mené son travail clinique durant trois ans. Ce service a suivi 102 adolescents âgés de 14 à 19 ans qui consommaient régulièrement des substances psychoactives (canabis surtout).

«Cent personnes suffisent en termes d’analyse statistique, indique Monique Bolognini à swissinfo. Car il s’agit d’une population relativement homogène: des adolescents consommateurs réguliers – au moins une fois par semaine – d’une substance durant les trois derniers mois.»

«Nous aurions préféré avoir 1000 personnes, ne cache pas la cheffe de l’Unité de recherche du SUPEA. Mais des questions de budget et de temps ne nous le permettaient pas».

Moins d’un jeune sur dix

Globalement, «les consommateurs réguliers représentent moins de 10% des jeunes en Suisse», relève Monique Bolognini.

Mais dans la population particulière de l’étude, deux tiers des adolescents consomment du cannabis tous les jours.

Ce n’est pas tout. L’étude indique que si l’alcool est plutôt consommé en fin de semaine, plus de la moitié des jeunes qui fument des cigarettes le font en grande quantité (entre 10 et 20 par jour).

Et leur consommation de substances a débuté vers 13 ans pour le tabac, vers 14-15 ans pour l’alcool et le cannabis.

L’étude du SUPEA montre aussi que les ados dont la consommation reste modérée mentionnent moins de problèmes psychologiques, sociaux, familiaux et légaux que les autres.

A contrario, ceux dont la consommation est importante ou s’aggrave ont plus de problèmes, et leur situation tend à se dégrader dans tous les domaines.

Pas de lien de causalité établi

«Consommation et problèmes évoluent parallèlement. Mais nous n’avons pas trouvé d’éléments prédicteurs ou de lien de cause à effet entre les deux une fois la consommation installée», précise Léonie Chinet, psychologue associée à la recherche.

En clair, il n’est pas possible de dire si les ados fument des joints parce qu’ils ont des soucis ou s’ils ont plus de problèmes parce qu’ils fument…

«Il y a corrélation et interaction, pas causalité», tient à souligner Monique Bolognini.

Reste qu’à l’adolescence, une consommation importante de substances psychotropes est associée à des souffrances psychiques.

Selon l’étude, plus de 80% des filles et 48% des garçons ont connu des épisodes de grave déprime, un ado sur deux se dit anxieux.

Près de 45% des filles ont fait des tentatives de suicide et 33% présentent des troubles alimentaires. Chez les garçons, on observe plutôt des comportements violents (27%).

Consommation minimisée

La majorité des jeunes suivis par l’étude déclarent ne pas être préoccupés par leur consommation alors que celle-ci est relativement élevée.

Parmi ceux dont la consommation nécessiterait un traitement, la plupart disent n’avoir besoin d’aucune aide dans ce domaine.

Les médecins généralistes et les pédiatres sont les personnes les plus consultées par les jeunes, mais le problème de consommation n’est souvent pas abordé.

Les médecins justement semblent avoir un rôle important à jouer dans le dépistage et l’adressage du jeune dans une prise en charge adaptée.

Les ados interrogés trouvent important de pouvoir obtenir un soutien dans une approche globale pas seulement centrée sur leur consommation.

Ils insistent aussi pour avoir un rôle de partenaire actif dans la prise en charge proposée.

swissinfo et les agences

Les consommateurs réguliers (de cannabis surtout) représentent moins de 10% des jeunes en Suisse

Mais deux tiers des jeunes suivis dans le cadre de cette étude consomment quotidiennement

Une consommation importante de substances psychotropes est associée à des souffrances psychiques

Selon le chef du Service de promotion de l’OFSP, cette étude plaide pour une dépénalisation du cannabis

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