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Ruth Metzler à Palerme pour signer une convention anti-mafia

Ruth Metzler peut signer cette nouvelle Convention sans restriction aucune. Keystone

La capitale sicilienne accueille ce mardi les ministres de la Justice de nombreux pays de la planète pour la mise en route d´une Convention de l´ONU contre la criminalité transnationale organisée. Ruth Metzler y apposera sa signature au nom de la Suisse.

Il n’est guère difficile d’imaginer l’effervescence policière qui règne ces jours-ci à Palerme à l’occasion de ce sommet convoqué pour la signature d’un traité censé fournir à la justice internationale les armes juridiques nécessaires à la lutte contre les syndicats du crime.

Le choix de la capitale sicilienne doit beaucoup sans doute à sa charge symbolique. N’est-elle pas, comme le rappelle le ministre italien de la Justice, l’un des lieux les plus évocateurs des batailles contre le crime organisé et les plus marqués par son tribut payé à la mafia?

Si ce «Traité de Palerme» a été rendu nécessaire, c’est parce que les polices du monde n’avaient plus d’autre choix que de trouver une parade à la prolifération des nouveaux réseaux du crime nés de l’ouverture des frontières et des progrès technologiques de toutes sortes.

Les juristes ont mis les bouchées doubles. En deux ou trois ans, sous le patronage des Nations unies, ils se sont efforcés de rédiger une nouvelle convention internationale qui répondrait à une double urgence: instaurer un minimum de bases juridiques communes aux pays de la planète et améliorer la coopération judiciaire par-dessus les frontières.

Le traité finalement conclu se veut contraignant. Il impose aux États signataires de rendre punissable toute participation à une organisation criminelle, tout acte intentionnel de blanchiment d’argent et de corruption ou encore toute entrave à la justice.

La Suisse souhaitait que la communauté internationale fasse ce pas, mais ne l’avait pas vraiment attendu. Depuis 1998, elle dispose en effet d’une loi permettant de lutter contre le blanchiment d’argent, l’un des terrains où les syndicats du crime organisé se sont montrés extrêmement actifs. Certaines dispositions légales vont même plus loin que le nouveau traité.

Ruth Metzler, cheffe du Département fédéral de justice et police, peut donc signer cette nouvelle Convention sans restriction aucune. Tout au plus les parlementaires suisses devront-ils encore poursuivre leur réflexion sur un domaine où la législation marque un peu de retard, à savoir la responsabilité des personnes morales.

Ernst Gnägi, de l’Office fédéral de la justice, explique à ce propos que la Suisse n’a pas encore de bases juridiques permettant de poursuivre par exemple des entreprises. «Notre droit pénal est axé sur les personnes physiques. Mais la révision en cours prendra aussi en considération le cas des personnes morales impliquées dans des affaires de blanchiment».

Il est de l’intérêt de la Suisse d’adhérer à cette Convention, poursuit Ernst Gnägi. Pour des raisons évidentes d’efficacité de la lutte contre la criminalité. Mais aussi pour l’égalité des marchés: «si les banques suisses ont l’obligation d’identifier leur clients, il faut que cette obligation soit aussi imposée aux banques des autres pays et des autres places financières».

Cela dit, Mme Metzler ne pourra toutefois pas mettre sa signature au bas de deux protocoles annexes à la Convention qui, eux, portent sur le trafic d’êtres humains: le premier sur la traite des femmes et des enfants, le second sur les filières de passeurs d’émigrants.

Ces deux documents ne datent que de quelques semaines et les juristes n’ont pas encore eu suffisamment de temps pour en examiner les adaptations qu’elles supposent de la législation suisse. Par ailleurs, un troisième protocole relatif aux armes à feu fait encore l’objet de discussions au niveau international et n’a pas encore pu être conclu.

La signature de la Convention par Ruth Metzler n’est que le premier acte de sa mise en œuvre au niveau national. Le Parlement devra ensuite mettre lui aussi l’ouvrage sur le métier et travailler sur sa ratification. Au bout du compte, ce nouveau traité n’aura force de loi que lorsque quarante pays l’auront ratifié.

Bernard Weissbrodt

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