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Une belle avancée pour la biodiversité mondiale

Un militant environnementaliste japonais participait à une chaîne humaine pacifique à Nagoya, le 28 octobre. Reuters

190 pays ont adopté vendredi à Nagoya, au Japon, un accord sans précédent pour protéger les espèces et les écosystèmes de la planète et à en partager plus équitablement les bénéfices. Un «immense succès», dixit le ministre suisse Moritz Leuenberger, dont c’était la dernière conférence onusienne.

Au terme de deux semaines de discussions, les participants sont tombés d’accord sur un objectif 2020 qui représente une augmentation sensible des aires protégées de la planète. Elles couvrent actuellement 13% de la surface totale des terres et un peu moins de 1% de la surface totale des océans: un compromis a été trouvé à 17% pour les terres et 10% pour les mers.

D’autant plus réjouissant que cet accord intervient dix mois après l’immense déception du sommet de Copenhague sur le réchauffement climatique et qu’au début de la conférence, la situation semblait «sans issue», aux dires de Moritz Leuenberger.

Pour lui, Nagoya étaient la dernière sortie et le dernier discours en tant que ministre de l’Environnement, après quinze ans d’activité. Selon le Zurichois, cet accord représente une lueur d’espoir en vue de la conférence sur le climat de Cancun en décembre et montre que des solutions consensuelles sont possibles au sein de l’ONU.

«Grâce à beaucoup de sagesse, d’énormes efforts et des larmes, nous avons réussi !», a lancé de son côté le ministre japonais de l’Environnement, Ryu Matsumoto, profondément ému.

Partage des bénéfices

Les représentants de plus de 190 pays, à l’exception notable des Etats-Unis qui n’ont jamais ratifié la Convention sur la diversité biologique (CBD) lancée en 1992 lors du sommet de la Terre à Rio, ont donc adopté un «plan stratégique» en 20 points pour 2020, pour freiner le rythme alarmant de disparition des espèces.

Selon les Nations Unies, la Terre affronte en ce moment rien moins que le pire taux d’extinction des espèces depuis la disparition des dinosaures il y a 65 millions d’années. Une étude publiée dans la revue américaine de référence Science conclut qu’un cinquième des espèces animales et végétales était actuellement menacé d’extinction.

Les participants à la conférence se sont également mis d’accord sur un protocole contraignant sur le partage des bénéfices tirés par les industries de la pharmacie et des cosmétiques des ressources génétiques des pays du Sud. Sont concernés les animaux, les plantes, et autres micro-organismes.

L’issue des discussions sur ce protocole ABS (accès et partage des avantages) était cruciale. Nombre de pays en développement – qui le réclamaient à cor et à cri depuis plusieurs années – avaient en effet clairement indiqué que le sort des autres décisions en dépendait.

Pas de caractère contraignant

Ce plan, qui n’a pas de caractère légalement contraignant, peut avoir un réel impact pour la protection des espèces à travers le monde, selon Russell Mittermeier, président de l’ONG américaine Conservation International. «Les aires protégées, quelle que soit leur nature, sont le meilleur outil dont nous disposons à ce jour pour protéger la diversité du vivant», a-t-il expliqué.

Plusieurs engagements laissent cependant la porte ouverte à de nombreuses interprétations. Des questions demeurent aussi sur son influence concrète sur les innombrables subventions à la pêche, en Europe en particulier, alors que la surpêche de nombreuses espèces est scientifiquement documentée.

Il n’empêche, «le protocole de Nagoya est une réussite historique», a estimé Jim Leape, directeur général de WWF International. Les ONG suisses ont de leur côté salué une «percée» faite à Nagoya, dans un communiqué commun de la Déclaration de Berne, Pro Natura et BirdLife Suisse. Elles n’en tirent pas moins un bilan en demi-teinte de la conférence.

Les ONG regrettent notamment le fait que «les objectifs de biodiversité 2020 aient été affaiblis» (elle auraient souhaité une protection de 25% des terres et de 20% des océans) et que l’accord contre la biopiraterie comporte encore des failles. Elles dénoncent un texte trop vague et seulement partiellement contraignant.

La délégation suisse présente au Japon a largement marqué la décision finale prise à Nagoya, souligne un communiqué du ministère de l’Environnement, des Transports, de l’Energie et de la Communication. Les experts helvétiques ont réussi a résoudre un différend entre l’UE et les Etats insulaires.

Nagoya. La 10e conférence de l’ONU sur la diversité biologique s’est tenue du 18 au 29 octobre à Nagoya, au Japon. Près de 190 pays y ont pris part. Une conférence ministérielle s’est tenue du 27 au 29.

USA. Les États-Unis n’ont pas ratifié la Convention sur la diversité biologique; ils ont pris part aux pourparlers en qualité d’observateur.

Traité. La Convention sur la diversité biologique (CDB) est un traité international adopté lors du Sommet de la Terre à Rio de Janeiro en 1992, et entré en vigueur en 1993.

Objectifs. Il a 3 objectifs principaux: la conservation de la diversité biologique, l’utilisation durable des éléments constitutifs de la diversité biologique et le partage juste et équitable des avantages découlant de l’utilisation des ressources génétiques.

Engagement. En avril 2002, les signataires de la Convention se sont engagés à atteindre d’ici 2010 une réduction significative du rythme actuel de perte de biodiversité. La plupart des pays, y compris la Suisse, n’ont pas atteint cet objectif.

2010. Les Nations Unies ont déclaré 2010 Année internationale de la biodiversité.

1/5ème. Une étude publiée dans la revue Science a montré qu’environ un cinquième des espèces animales et végétales sont menacées d’extinction.

50 par an. En moyenne, environ 50 espèces de mammifères, d’oiseaux et d’amphibiens se rapprochent de l’extinction chaque année à cause de l’expansion des cultures, de l’exploitation forestière et des excès en matière de chasse. Un autre facteur est la concurrence des autres espèces, particulièrement celles qui proviennent d’autres régions du monde..

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