La statistique suisse doit être plus indépendante
L´Office fédéral de la statistique (OFS) a atteint un niveau de professionnalisme élevé en comparaison internationale. C'est la conclusion d´une étude menée par deux experts canadiens, qui recommandent aussi que l´OFS gagne en indépendance.
Le fait qu’un office national de la statistique se soumette librement à un tel examen constitue une première mondiale, selon le communiqué publié vendredi par l’OFS. Les deux experts en question, Ivan P. Fellegi et Jacob Ryten, de Statistique Canada, ont reçu comme mandat d’analyser la statistique en Suisse et de proposer des améliorations.
Leur verdict: l’OFS et le système suisse de la statistique se portent plutôt bien, malgré un certain nombre de faiblesses. L’étude relève notamment que l’Office et ses collaborateurs sont compétents, travaillent en fonction des besoins des utilisateurs et sont conscients de l’importance des règles éthiques, notamment de la nécessité d’éviter toute ingérence politique.
Mais les deux experts font aussi un certain nombre de recommandations. Ils jugent, en particulier, que l’OFS n’est pas assez indépendant. Ils préconisent donc plus d’autonomie pour l’Office, de manière à garantir la qualité et l’objectivité des données qu’il publie. Cela permettrait d’augmenter la confiance du public à l’égard de la statistique.
D’ailleurs, le directeur de l’OFS, Carlo Malaguerra, ne nie pas le risque d’interférence politique dans le travail des statisticiens, dans le but de retarder ou modifier la publication d’informations sensibles. «De temps en temps, nous avons de telles interventions, et c’est clair que nous nous défendons. Si nous devions céder une fois, notre crédibilité disparaîtrait.»
Pour renforcer cette indépendance, il faut envisager, toujours selon l’étude des experts canadiens, des changements légaux et institutionnels. L’une des possibilités: transformer l’OFS en un institut indépendant, dont le directeur chapeauterait l’ensemble du système statistique du pays.
Une idée à creuser, pour Carlo Malaguerra. «On parle, au niveau fédéral, de ces fameux instituts du troisième cercle, c’est-à-dire autonomes, rattachés seulement administrativement à un Département, financés bien sûr par la Confédération. Dans notre cas, ce serait une bonne idée.»
Un tel institut aurait une dimension fédérale, mais aussi cantonale. D’ailleurs, les experts insistent sur ce point: il faut tout entreprendre pour renforcer les mécanismes officiels de coopération entre la Confédération et les cantons. «L’information statistique, aujourd’hui, doit être pensée internationalement, parce que les activités se globalisent, la société se mondialise», explique le directeur de l’OFS.
Cette perspective est-elle réaliste? La situation de la statistique est très disparate dans les différents cantons. Et ces derniers sont, on le sait, parfois chatouilleux lorsqu’on veut toucher au statu quo. «Je pense que c’est possible, avec de la bonne volonté, avance Carlo Malaguerra. De toute façon, c’est l’évolution des choses qui nous force à mieux collaborer avec les cantons.»
Pierre Gobet

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