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La magnitude de la crise au Pakistan enfin reconnue

L'ONU salue la mobilisation de la communauté internationale, mais les besoins sont encore immenses au Pakistan. Reuters

Les besoins en nourriture et en aide sont gigantesques au Pakistan, où les pluies devraient continuer à s’abattre au moins encore pendant une semaine. La communauté internationale est en train de prendre conscience de l’ampleur des inondations. En Suisse aussi, on se mobilise.

«Après une première réaction lente et décevante, il y a une plus grande prise de conscience de l’étendue de la catastrophe», a commenté mardi à Genève l’ambassadeur du Pakistan auprès de l’ONU, Zamir Akram. Selon l’ONU, les inondations qui frappent le Pakistan depuis trois semaines ont déjà fait plus de 1600 morts. C’est la pire catastrophe naturelle de l’histoire du pays.

L’ONU a lancé un appel la semaine dernière pour récolter 460 millions de dollars (479 millions de francs) d’aide urgente. «Ca bouge. Nous nous attendons à ce que les contributions affluent», a déclaré la porte-parole du Bureau des Affaires humanitaires de l’ONU, Elisabeth Byrs. En 24 heures, la réponse à l’appel a passé de 20% à près de 40%, selon le dernier décompte.

L’ONU a récolté 182 millions de dollars, ainsi que 43 millions de promesses de dons. Il faut y ajouter 229 millions d’aide bilatérale directe aux autorités pakistanaises ou à d’autres organismes comme le Croissant-Rouge. «C’est un bon signe», a fait remarquer Elisabeth Byrs, tout en ajoutant: «L’argent afflue mais cela ne signifie pas que tout est parfait»

Aide encore insuffisante

L’aide reste en effet largement insuffisante face à l’ampleur des besoins: la superficie touchée par les inondations équivaut à la surface de l’Angleterre, a indiqué l’ambassadeur du Pakistan auprès de l’ONU. Quatorze millions de personnes, soit un dixième de la population, sont touchées.

Plusieurs agences de l’ONU ont tiré la sonnette d’alarme. L’UNICEF s’inquiète du sort de 3,5 millions d’enfants qui n’ont pas accès à l’eau potable et risquent de succomber à des maladies hydriques comme le choléra, la diarrhée et la dysenterie.

Le Programme alimentaire mondial (PAM), qui a distribué des vivres à un million de personnes sur les 6 millions visées, a lancé un appel urgent pour récolter des fonds additionnels, les stocks de nourriture étant «sous forte pression» pour le mois de septembre. Le PAM espère atteindre 2 millions de personnes d’ici la semaine prochaine.

La situation s’empire

L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a affirmé qu’aucune épidémie de choléra ne s’est déclarée à ce stade, mais qu’il faut rester vigilant dans un pays où le choléra est endémique. Les cas de dysenterie aiguë se chiffrent par dizaines de milliers.

«La situation continue d’empirer alors que les rivières gonflent au sud», a indiqué Andrej Mahecic, porte-parole du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés. «Au Balouchistan, les gens manquent toujours de tout – abris, nourriture, eau potable, système de santé et d’hygiène. Nous avons un besoin massif de financement pour faire face à la crise».

Les besoins en abris sont également énormes. Selon l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), des tentes et bâches en plastique ont été distribuées à 134’000 familles. Mais au moins 900’000 maisons ont été détruites ou endommagées.

Cinq ans pour reconstruire

Au-delà de la phase d’urgence, l’ambassadeur du Pakistan à l’ONU Zamir Akram a estimé qu’il faudra cinq ans pour reconstruire les zones touchées. Les dégâts aux récoltes de coton, de blé et de riz risquent de créer chômage et pénuries alimentaires, a-t-il averti. Une question clé est de savoir si les paysans pourront planter les germes de blé pour la récolte d’hiver.

Il faudra reconstruire les infrastructures, ponts, routes, écoles et hôpitaux balayés par les eaux, a-t-il ajouté. L’ambassadeur a chiffré à 2,5 milliards de dollars l’aide nécessaire seulement pour la région du nord-ouest. Au total, le coût de la reconstruction pourrait dépasser les 10 milliards.

L’ambassadeur a écarté les risques de détournement de l’aide par les groupes fondamentalistes. Il a assuré que l’argent versé par les donateurs ira aux personnes dans le besoin.

En Suisse aussi

La solidarité se manifeste également en Suisse. La Chaîne du bonheur, système de collecte et de solidarité humanitaires soutenu par le service public audiovisuel, a déjà récolté 3,1 millions de francs. Mercredi, elle organise une journée nationale de solidarité avec les victimes des inondations au Pakistan.

Comme ailleurs, la collecte avait démarré lentement. Mais «maintenant que les gens peuvent constater l’ampleur de la catastrophe, ils se montrent solidaires», a déclaré la porte-parole de la Chaîne du Bonheur, Priska Spörri.

D’autres organisations suisses sont également présentes sur le terrain. L’Entraide protestante suisse (EPER) a commencé à distribuer de la nourriture et des ustensiles de première nécessité à 30’000 personnes du district de Malakand, dans le nord-ouest du pays.

Quatre millions

Le gouvernement suisse a quant à lui octroyé 4 millions à titre d’aide d’urgence. Le comité international de la Croix-Rouge recevra 3 millions de francs, le PAM un million.

L’agence d’aide au développement suisse (DDC) a envoyé six experts dans les régions frappées par le désastre pour déterminer les besoins des victimes à moyen-terme, essentiellement en matière d’eau potable et d’abris. Cinq autres experts de la DDC sont sur le terrain pour coordonner les opérations.

Lundi, la ministre suisse des Affaires étrangères a indiqué que les autorités analysaient la forme que prendrait à l’avnir l’aide au développement au Pakistan à la lumière des inondations actuelles.

En août 2008, le gouvernement avait décidé de réduire de 17 à 12 le nombre de pays cibles pour les projets prioritaires d’aide au développement. Le Pakistan, inscrit sur la liste prioritaire depuis 40 ans, faisait partie des pays concernés par les réductions budgétaires.

Selon le site internet de la DDC, certains des programmes sortants seront inclus dans un nouveau programme de développement ciblé sur le nord du Pakistan. Le Parlement a approuvé un budget de 5 millions de francs dans ce sens.

swissinfo.ch et les agences (avec la collaboration de Simon Bradley à Genève)

Toutes aides confondues (ONU et non-ONU), les Etats-Unis sont jusqu’ici le plus gros donateur avec 97 millions, soit 38,6% des 250 millions versés. Suit la Grande-Bretagne avec 40 millions, le Canada 32 (y compris les promesses).

Les privés (entreprises et individus) ont promis 28 millions, le Fonds d’intervention d’urgence de l’ONU en a débloqué 26 et l’Allemagne promis 19.

Suivent le Japon (14 millions), le Danemark (10 millions), l’Australie (9), la Norvège (6), le Koweït (5) et la Suisse qui, avec 4 millions, arrive en 12e position, selon le décompte des Nations Unies.

La Chaîne du Bonheur organisera mercredi 18 août entre 6h et minuit une journée nationale de collecte en faveur des sinistrés des inondations au Pakistan et dans les régions avoisinantes.

Dons à la Chaîne du Bonheur: Compte postal 10-15000-6 (mention “Inondations Asie”).

L’appel de la Chaîne du Bonheur est lancé en étroite collaboration avec 8 organisations d’entraide partenaires – Caritas Suisse, EPER, Terre des hommes Aide à l’enfance, la Croix-Rouge suisse, Handicap International, l’Armée du Salut, CBM Suisse et l’OSEO – qui ont déjà commencé à distribuer une aide d’urgence sur le terrain en collaboration avec leurs partenaires locaux.

Dons à l’Unicef: Compte postal 80-7211-9 (Mention: aide d’urgence au Pakistan).

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