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Le harcèlement sexuel une réalité très répandue en Suisse

Ce sont surtout les femmes qui sont harcelées, mais pas seulement. vario images

Selon une étude, la première du genre au niveau national, les victimes sont avant tout des femmes, des employés à temps partiel, des binationaux ou des nouvelles recrues.

Patricia Schulz, directrice du Bureau fédéral de l’égalité entre femmes et hommes, est surprise par l’ampleur du phénomène.

Cette étude a été présentée mardi à Berne par le Bureau fédéral de l’égalité entre femmes et hommes (BFEG) et le Secrétariat d’Etat à l’économie (SECO).

Menée auprès de 2020 personnes, elle révèle que l’agression sexuelle ou le viol, très rares, représentent les pires cas de harcèlement.

Mais ce phénomène comprend aussi les remarques sexistes ou scabreuses sur l’apparence physique, la présentation de matériel pornographique ou les tentatives d’approche accompagnées de promesses de récompense ou de menaces de représailles.

Surtout par des hommes

Sur l’ensemble de leur vie professionnelle, 28% des salariées et 10% des salariés ont été victimes de harcèlement sexuel (respectivement 10% et 4% au cours des douze derniers mois).

Les commentaires et plaisanteries dégradants sont les cas le plus souvent cités tant par les hommes que par les femmes. Viennent ensuite, chez les travailleuses, les regards qui déshabillent, les remarques désobligeantes et les contacts corporels indésirables.

Les salariés font de leur côté plus fréquemment face à des coups de fil, lettres ou courriels non souhaités, ainsi qu’à des gestes obscènes ou à des insinuations de nature sexuelle.

Les auteurs sont dans 64% des cas des hommes, seuls ou à plusieurs, alors que la proportion de femmes n’atteint que 15%. Des groupes composés de personnes des deux sexes sont en cause dans les 20% restants.

De surprise en surprise

Patricia Schulz, directrice du bureau fédéral de l’égalité entre femmes et hommes, est surprise par l’ampleur du phénomène. «Je suis surprise aussi par la proportion d’hommes de dix pour cent. En comparaison avec des études internationales existante c’est vraiment élevé», a-t-elle déclaré à swissinfo.

Autre surprise: la différence entre la Suisse romande et la Suisse alémanique, les hommes germanophones s’estimant plus souvent confrontés à des cas de harcèlement sexuel que les Romands.

Les collègues avant tout

Dans plus de la moitié des cas, le comportement importun est l’oeuvre de collègues. Suivent loin derrière, les clients et les patients. Les supérieurs sont plus souvent mis en cause par des femmes (près de 15% des cas) que par des hommes (environ 5%).

Certaines branches sont plus frappées que d’autres: édition/impression, hôtellerie/restauration, industries alimentaires et chimique. Les femmes citent plus souvent les secteurs banques/assurances, postes/télécommunications, des services personnels ainsi que des industries du textile, de la construction et du commerce de détail.

Les hommes sont, de leur côté, plus souvent confrontés à un comportement importun dans les domaines de la santé et du social. Le phénomène du harcèlement concerne davantage les entreprises de plus de 50 employés que celles plus petites.

Mais ce sont aussi davantage les grandes sociétés (plus de 500 employés) qui prennent des mesures de prévention.

L’employeur a intérêt à agir

Le président de la Confédération Pascal Couchepin a souligné les incidences économiques négatives de ce type de comportement. L’employeur a intérêt à agir.

Il peut en effet être condamné à verser au salarié harcelé une indemnité allant jusqu’à six salaires mensuels s’il n’a pas pris les mesures nécessaires. Pire, les absences au travail et la perte d’image liés aux cas de harcèlement entraîneraient des coûts encore plus importants.

Patricia Schulz souligne: «Pour les entreprises cela occasionne des frais élevés parce que, très souvent, les victimes de harcèlement sexuel démissionnent si elles ne se sentent pas soutenues par l’entreprise. Il s’agit ensuite de les remplacer et de former une nouvelle personne.»

Peu de procès

Le plus souvent, les victimes se défendent elles-mêmes ou parlent de l’incident à leur entourage. Le recours à un service interne ou à une aide externe sont assez rares.

Près de 100 cas ont été portés devant un office de conciliation ou un tribunal.

«Nous ne connaissons pas le nombre de cas réglés au sein des entreprises», a encore noté Patricia Schulz. Elle explique le faible nombre de procès par les craintes de se lancer dans une longue procédure ainsi que par le sentiment de honte de la personne harcelée.

swissinfo et les agences

Par comportement discriminatoire, on entend tout comportement importun de caractère sexuel ou tout autre comportement fondé sur l’appartenance sexuelle, qui porte atteinte à la dignité de la personne sur son lieu de travail.

En particulier le fait de proférer des menaces, de promettre des avantages, d’imposer des contraintes ou d’exercer des pressions de toute nature sur une personne en vue d’obtenir d’elle des faveurs de nature sexuelle.

Le BFEG et le SECO incitent les employeurs à prendre leurs responsabilités via un site internet et des brochures.

Pour l’instant, seul un tiers des entreprises ont pris des mesures préventives.

La gamme est large: information sur la nature du harcèlement, déclaration de principe de la direction prônant une tolérance zéro, indications sur les personnes ou services à qui s’adresser, menaces claires de sanctions, allant jusqu’au licenciement, à l’égard des harceleurs.

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