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La crise du coronavirus met en évidence l’importance sociale des grands-parents

Une vieille femme avec deux enfants assis dans l herbe
Une image courante avant la crise du coronavirus: une grand-mère raconte une histoire à ses petits-enfants à Daillens, dans le canton de Vaud. © Keystone / Gaetan Bally

Les grands-parents ont à nouveau le droit de serrer leurs petits-enfants dans leurs bras, mais pas de les garder. L’annonce faite par le responsable de la cellule de crise Covid-19 de l’administration suisse, Daniel Koch, a fait le tour du monde et fortement perturbé les aînés. La pandémie met en avant le rôle social majeur joué par les grands-parents dans notre société.

Heidi Klossner Biglen a 62 ans et habite le canton de Berne. Après deux mois sans voir ses petits-enfants à cause de la pandémie de coronavirus, elle a été très heureuse d’apprendre de la bouche de Daniel Koch, le responsable de la cellule de crise de la Confédération, qu’elle avait à nouveau le droit de les prendre dans ses bras. Habituellement, Heidi Klossner Biglen et son mari s’occupent de leurs petits-enfants durant une journée toutes les deux semaines. Ce temps passé avec eux permet de les voir grandir et de leur offrir une certaine expérience de la vie. «Nous apprenons d’eux, ils apprennent de nous», résume la grand-maman.

Barbara Müller*, 63 ans, s’occupe à nouveau de son petit-fils depuis une semaine. La déclaration de Daniel Koch a eu sur elle un effet libérateur. Barbara Müller n’aurait jamais cessé de voir son petit-fils de sa propre initiative, mais elle a cédé face à la pression sociale: «Je connais beaucoup de grands-parents et tous ont renoncé à garder leurs petits-enfants.»

La crise du coronavirus a mis en évidence le rôle social majeur joué par les grands-parents en Suisse. Uniquement sur un plan financier, la valeur annuelle des services de garde bénévoles assurés par les aînés est estimée à environ 8 milliards de francs suisses.

Une recommandation controversée

Daniel Koch a affirmé que les grands-parents pouvaient à nouveau serrer leurs petits-enfants dans leurs bras, mais pas encore les garder. Une recommandation qui a fait le tour du monde et qui a reçu son lot de critiques. Le chef de la cellule de crise se base sur une étudeLien externe qui constate que les cellules des jeunes enfants possèdent beaucoup moins de récepteurs permettant au coronavirus d’atteindre l’organisme. 

Daniel Koch a voulu mettre fin à la souffrance des grands-parents et de leurs petits-enfants, nous a indiqué l’Office fédéral de la santé publique (OFSP). Il a pris en compte à la fois le risque d’infection et le stress psychologique subi par les grands-parents, et il a conclu que les étreintes étaient justifiées pour soulager les enfants et les aînés.

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Mais une porte-parole de l’OFSP précise qu’il s’agit d’une simple étreinte, «une pression». La garde des enfants ainsi que les visites plus longues sont toujours déconseillées. 

Il n’y a pas pour l’instant de consensus international sur le rôle des enfants dans la transmission du virus et sur l’attitude à adopter. Chaque pays édicte ses propres recommandations. 
 

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Les enfants manquent à leurs grands-parents

«Depuis le début de la pandémie, nous entendons une multitude de grands-parents affirmer que leurs petits-enfants leur manquent beaucoup, confie Geraldine Capaul, rédactrice en chef du magazine suisse alémanique GrosselternLien externe (grands-parents). La plupart d’entre eux s’occupent régulièrement de leurs petits-enfants pendant des journées entières. Du jour au lendemain, ils n’ont plus pu les voir et en souffrent.»

Les autorités suisses n’ont pas pu nous indiquer si les grands-parents respectaient l’interdiction de garder des enfants. Mais d’après le sociologue François Höpflinger, la grande majorité a jusqu’à présent suivi les recommandations, car la situation a été perçue comme temporaire. «L’assouplissement actuel de certaines restrictions crée une grande incertitude, déclare le sociologue. Les interdictions de contact peuvent être tolérées à court terme, mais à plus long terme elles risquent de se heurter à une résistance, surtout de la part des grands-parents actifs et en bonne santé.»

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Les contacts entre grands-parents et petits-enfants ont augmenté dans tous les pays européens au cours des dernières années, relève François Höpflinger. La particularité de la Suisse est que les grands-parents sont nettement moins nombreux qu’ailleurs à vivre avec leurs petits-enfants sous le même toit: seul 1,1% des ménages privés sont composés de trois générations, contre 5,7% au Japon et 16,5% en Chine.

En ces temps de pandémie, c’est à la fois une bonne et une mauvaise nouvelle: les grands-parents vivant en Suisse souffrent davantage de la séparation de leurs petits-enfants, mais ils sont aussi moins exposés au coronavirus. D’après une étudeLien externe, le nombre élevé de décès enregistrés en Italie est notamment dû à la proximité entre les différentes générations.

La crise a également ébranlé la société suisse et dévoilé l’importance des liens familiaux. Il est possible qu’une fois la pandémie passée, les différentes générations se rapprochent et fassent preuve de plus de solidarité.


*Nom connu de la rédaction


Traduction de l’allemand: Marie Vuilleumier

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