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Tapis rouge pour Carlo Azeglio Ciampi

Pascal Couchepin et Carlo Azeglio Ciampi (à d.) passent devant la garde d'honneur de l'armée suisse. Keystone

Le président italien Carlo Azeglio Ciampi est arrivé mercredi en Suisse pour une visite d'Etat de deux jours.

A cette occasion, la Suisse et l’Italie doivent notamment signer un accord de coopération scientifique et technologique.

Le président italien a atterri à l’aéroport de Berne-Belp mercredi en fin de matinée. Où il a été accueilli par le président de la Confédération Pascal Couchepin et la ministre des Affaires étrangères Micheline Calmy-Rey.

Par la suite, devant le Palais fédéral à Berne, Carlo Azeglio Ciampi a reçu les honneurs militaires. Son homologue helvétique a parlé des nombreux liens qui existent entre la Suisse et l’Italie.

«La colonie italienne est la plus forte colonie étrangère en Suisse», a rappelé Pascal Couchepin.

Pour sa part, Carlo Azeglio Ciampi a souligné le rôle de la Confédération comme terre d’accueil pour les persécutés politiques et les travailleurs italiens aux heures les plus noires de la péninsule.

Tous deux ont mis en avant les valeurs communes et la confiance réciproque que partagent la Suisse et l’Italie, ainsi que leur volonté commune d’intensifier les relations entre les deux pays.

Le président italien a émis le souhait que la Suisse «devienne une partie de plus en plus insérée et active dans le débat sur l’avenir de l’Europe et des développements au sein de l’Union européenne.

Une tempête dans un verre d’eau

La visite du président italien survient peu de jours après un incident qui a défrayé la chronique.

La semaine dernière, la magistrature tessinoise avait retenu quelques heures deux parlementaires italiens en mission d’enquête.

Ces hommes recherchaient des informations par leurs propres moyens, sans passer par l’entraide judiciaire internationale. Ce qui a semé une certaine confusion en Suisse et suscité de fortes critiques de la part du centre droit du gouvernement italien.

«C’est une tempête dans un verre d’eau», relativise cependant l’ambassadeur de Suisse à Rome, Alexis Lautenberg. Cela ne change absolument rien à cette 51e visite d’Etat.

Le président Ciampi est en effet accueilli à Berne comme ses prédécesseurs et conformément au protocole. Avec tapis rouge, repas officiels et échange de cadeaux.

Une pomme de discorde au Gothard

Quoi qu’il en soit, la Suisse et l’Italie ne sont pas à l’unisson sur tous les dossiers. Lors de son discours, le président de la Confédération a d’ailleurs fait quelques allusion aux problèmes qui font de l’ombre aux relations entre Berne et Rome.

Ainsi, le transport fait partie de ces fameux dossiers que l’on peut qualifier de «chauds».

La Suisse est en train d’investir des milliards de francs pour la construction de deux transversales ferroviaires alpines. Mais la politique de transfert de la route au rail ne peut fonctionner que si l’Italie dispose à temps des structures nécessaires pour placer les camions sur les trains.

«L’infrastructure ferroviaire italienne souffre d’un certain retard par rapport aux autres pays européens, affirme l’ambassadeur d’Italie à Berne Lorenzo Ferrarin. En effet, dans les années du boom économique, l’Italie a mis l’accent sur la route.»

La politique des transports des deux pays est donc allée dans une direction opposée. En Suisse, 70% du trafic passe par le rail et 30% par la route. En Italie, cette proportion est inversée.

En fait, quelle que soit la solution adoptée, elle passe par des coûts d’infrastructure énormes. «Or chaque pays a ses priorités en matière de budget», rappelle Lorenzo Ferrarin.

Le Gothard de la discorde

Mais c’est en fait surtout le passage du Gothard qui suscite l’animosité des Italiens.

Les camionneurs de la Péninsule ont des raisons de se plaindre: l’interdiction du trafic nocturne, le filtrage des camions et la préférence accordée aux routiers suisses.

L’ambassadeur Ferrarin résume la position italienne ainsi: «On peut affirmer que le système pratiqué au Gothard contient des éléments discriminatoires. Il ne s’agit pas seulement d’une question de sécurité.» Reste maintenant à la Suisse à expliquer son point de vue.

Attractivité excessive

La fiscalité de l’épargne est un autre dossier difficile. Grâce au secret bancaire et à l’impunité pour les évasions fiscales survenues à l’étranger, la Suisse reste très attractive pour les capitaux étrangers.

Une partie de ces capitaux sont rentrés en Italie. En effet, le gouvernement de Silvio Berlusconi a par deux fois prononcé une amnistie fiscale – l’opération «scudo» – pour les fraudeurs qui rapatrient l’argent.

En dépit de cela, comme membre de l’Union européenne, l’Italie reste critique par rapport à la position de la Suisse.

Cependant, le gouvernement suisse a fait une concession en proposant un impôt à la source.

La balle est à nouveau dans le camp de Bruxelles, raison pour laquelle ce thème «sera très édulcoré lors de la rencontre avec Ciampi», note l’ambassadeur Lautenberg.

Un accord prometteur dans la recherche

Mais un dossier prometteur couronnera cette visite d’Etat. La présence du président de la République italienne sera en effet l’occasion de signer un accord sur la coopération scientifique et technologique.

«Il s’agit du premier accord du genre entre les deux pays, rappelle l’ambassadeur Ferrarin. Il définit les conditions cadre et permet une collaboration future entre les universités et les scientifiques suisses et italiens.»

«Il n’y a pas encore de projets concrets, mais on pose les bases d’une collaboration facilitée qui apporter un bénéfice à l’Université de la Suisse italienne qui entretient depuis sa création d’excellentes relations avec les universités lombardes», précise son homologue suisse à Rome Alexis Lautenberg.

Ce n’est d’ailleurs pas par hasard si, au second jour de sa visite, le président Ciampi visite au Tessin la seule université de langue italienne hors des frontières de la Péninsule.

Pour l’ambassadeur Lautenberg, cette visite sera «l’occasion officielle de réaffirmer les bonnes relations réciproques.»

swissinfo, Daniele Papacella
(traduction: Olivier Pauchard)

Carlo Azeglio Ciampi est président de la République depuis 1999. Auparavant, il a été quinze ans président de la Banque d’Italie et a assumé de nombreuses charges au niveau international.

Entre 1993 et 1994, il a présidé un gouvernement technique durant la difficile phase qui a suivi l’opération judiciaire dénommée «Mains propres». Une grande partie de la classe politique était alors impliquée dans des actions illégales liées au financement des partis.

Il a donc dirigé la transition entre ce que l’on appelle souvent «la 1ère République» et le système bipolaire actuel.

Le président n’est pas membre d’un parti politique. Il a été élu avec des voix de majorité et de l’opposition.

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