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Tout sauf une Suisse dans l’Union européenne

L’ancien ministre Christoph Blocher sera une nouvelle fois une locomotive pour son parti en vue des élections fédérales. Keystone

Empêcher toute tentative d’intégration de la Suisse à l’Union européenne, à commencer par les bilatérales III: c’est le thème dominant de la campagne de l’Union démocratique du centre (droite conservatrice) en vue des élections fédérales. Son slogan est éloquent: «Les Suisses votent UDC».

Le parti est à l’unisson. Des dirigeants à la base, tous les démocrates du centre avec lesquels nous avons parlé durant l’assemblée des délégués de l’UDC, le 26 mars dernier à Lugano, ont indiqué que la sauvegarde de l’indépendance et de la souveraineté de la Suisse sera la priorité numéro un de la prochaine législature.

Une souveraineté et une indépendance que l’UDC considère menacées par un nouveau paquet d’accords bilatéraux que Berne et Bruxelles tentent actuellement de faire aboutir. En effet, outre une série d’accords sectoriels, ce paquet devrait contenir une partie institutionnelle.

«Le lien institutionnel signifie que la Suisse devrait accepter automatiquement le droit européen, sans que le peuple se prononce», s’insurge l’ancien ministre de la Justice et Police et vice-président du parti Christoph Blocher. Selon lui, il s’agit là d’une sorte de «contrat colonial».

«La Suisse doit continuer à négocier bilatéralement avec l’UE dans des secteurs spécifiques, mais elle ne peut pas négocier au niveau institutionnel», estime pour sa part le ministre de la Défense Ueli Maurer. A son avis, le lien institutionnel irait même plus loin que ce que prévoyait l’Espace économique européen (EEE) auquel le peuple suisse avait refusé d’adhérer en 1992.

Ceux qui ont perdu ce scrutin de 1992 ne veulent pas accepter le résultat des urnes. «Ils continuent leur lutte en complotant en coulisses pour changer les cartes qui sont sur la table», commente Werner Furrer, membre de la section internationale de l’UDC.

C’est pour cette raison que le parti a décidé de transmettre au gouvernement une résolution – adoptée à l’unanimité par l’assemblée des délégués – et qui réclame notamment le retrait de la demande d’adhésion à l’UE et demande de communiquer à Bruxelles le refus de tout lien institutionnel et judiciaire avec l’étranger.

Valeurs suisses et chrétiennes

C’est justement le souci de préserver la souveraineté et l’indépendance de la Suisse, avec ses valeurs essentielles telles que le fédéralisme et la démocratie directe, qui a conduit l’ancien démocrate-chrétien (centre-droit) du canton des Grisons, Livio Zanolari, à adhérer à l’UDC. «Il est important que la Suisse puisse maintenir ses propres structures, ses propres institutions et déterminer elle-même ses propres lois», affirme-t-il. Or dans un tel contexte, il juge que l’UDC est le parti qui «fournit les réponses les plus adaptées pour l’avenir de la Suisse».

Le Grison, qui a été le chef de la communication de plusieurs ministres, est la troisième personnalité de premier plan du Parti démocrate-chrétien à rejoindre les rangs de l’UDC en peu de temps. Dans son programme de législature, l’UDC se reconnait explicitement dans les «racines chrétiennes de notre Etat, de notre culture et de notre ordre juridique». Une stratégie pour attirer des membres et des électeurs qui s’identifient aux valeurs traditionnelles du PDC?

«Nous nous battons depuis toujours pour les valeurs fondamentales de notre pays et, parmi celles-ci, il y a celles du christianisme, qui ont modelé l’histoire de la Suisse, à commencer par le Pacte de 1291», répond le député et vice-président de l’UDC Yvan Perrin.

Christoph Blocher aussi réfute la thèse d’une chasse active de l’UDC sur le terrain du PDC. Il précise cependant que «quelques centaines» de membres du PDC sont déjà passés dans les rangs de l’UDC suite à son éviction du gouvernement, en 2007.

Dans son programme, l’UDC met également l’accent sur une autre valeur traditionnelle du PDC: la famille. Elle le fait en mettant en avant son opposition à «l’ingérence croissante de l’Etat» dans ce domaine et à des subventions distribuées selon le principe de l’arrosoir.

Par le biais d’une initiative populaire, l’UDC propose en revanche aux parents qui prennent personnellement soin de leurs enfants une déduction fiscale «au moins équivalente à celle accordée aux parents qui confient la garde de leurs enfants à des tiers».

Responsabilité individuelle

Moins d’Etat, moins de dépenses publiques et davantage de responsabilité individuelle sont les autres principes suivis par le parti qui veut «absolument limiter les impôts et les taxes au cours des prochaines années», indique le secrétaire général de l’UDC, Martin Baltisser. «Il faut être raisonnable, argumente-t-il. On ne peut pas demander que ce soit toujours les mêmes qui payent et qui payent de plus en plus. Actuellement, on en demande trop.»

C’est pour cela que l’UDC exige que «les assurances sociales soient structurées de manière à ce que leur financement puisse être garanti à long terme. On ne peut pas promettre des prestations sans des compensations visant à maintenir un équilibre», ajoute le secrétaire général.

Ainsi, l’UDC est par exemple d’avis que «l’âge de retraite devra être de 65 ans pour les hommes et les femmes et que le catalogue des prestations de l’assurance maladie devra être adapté et non pas encore étendu».

Un gouvernement au suffrage universel

Une autre bataille que conduira l’UDC au cours de la prochaine législature sera celle pour l’élection du gouvernement par le peuple. La récolte des signatures pour une initiative populaire en ce sens échoit en effet au mois de juillet.

La composition actuelle du gouvernement est «peu équilibrée», estime Livio Zanolari. «En pratique, la coalition de centre-gauche dispose de six sièges sur sept, alors qu’elle ne représente qu’un peu plus de 50% de l’électorat», dénonce-t-il.

Cela n’arriverait pas si les ministres étaient désignés non pas par le Parlement, mais directement par le peuple, comme c’est le cas pour les membres des exécutifs cantonaux et communaux, souligne pour sa part Christoph Blocher.

Mais le peuple est-il infaillible? «Le peuple aussi commet des erreurs, répond Werner Furrer. Mais il en paye les conséquences, alors que lorsque c’est le gouvernement ou le Parlement qui se trompe, ce sont les citoyens qui payent.»

L’Union démocratique du centre (UDC) est née en 1971 de la fusion du Parti des paysans, artisans et indépendants et des Partis démocratiques des cantons de Glaris et des Grisons.

Durant les années 1990, l’UDC a fortement progressé et est devenue lors des élections fédérales de 1999 la principale force politique du Parlement fédéral. Lors des élections de 2003 et 2007, elle s’est encore renforcée. En 2007, elle a atteint 29% des suffrages, ce qui en fait le premier parti de Suisse.

L’UDC se positionne clairement à la droite du spectre politique: moins d’Etat, collaboration restreinte avec l’Union européenne et durcissement du droit sur les étrangers et les requérants d’asile sont les points centraux de son programme.

Sous la Coupole, l’UDC est représentée par un ministre, 59 députés et 6 sénateurs. Englobant encore un représentant de la Ligne de Tessinois et un de l’Union démocratique fédérale, il constitue avec 67 sièges, le groupe parlementaire le plus important.

Pour les élections fédérales du 23 octobre, le parti vise à dépasser largement la barre des 30% d’électeurs, indique son vice-président Yvan Perrin.

Dans son programme 2011-2015, l’UDC souligne vouloir un Etat libéral dans lequel la propriété et la sphère privées sont protégées et où les citoyens sont traités selon le principe de la responsabilité individuelle.

Le parti réclame davantage de marché et moins de bureaucratie, un budget public plus parcimonieux, moins de taxes et moins de prestations sociales.

En matière de justice et de police, l’UDC demande davantage de sévérité envers les criminels.

En matière de politique extérieure, le parti lutte contre l’adhésion à l’Union européenne, à l’Espace économique européen et à l’OTAN.

Par rapport aux étrangers, il demande une politique d’asile plus rigoureuse et une politique d’immigration contrôlée qui réponde aux besoins de la Suisse.

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