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Acier: la Maison Blanche accorde un nouveau sursis à ses alliés

La Maison Blanche accorde un nouveau sursis à ses principaux alliés sur l'acier (archives). KEYSTONE/AP/KHUE BUI sda-ats

(Keystone-ATS) Les Etats-Unis ont consenti à prolonger jusqu’au 1er juin la période d’exemption provisoire des droits de douanes sur les importations d’acier et d’aluminium du Canada, du Mexique et de l’Union européenne. L’UE déplore un sursis qui “prolonge l’incertitude”.

“L’administration (Trump) a prolongé de 30 jours les négociations avec le Canada, le Mexique et l’Union européenne”, a-t-elle indiqué lundi soir dans un communiqué, tout en soulignant qu’elle resterait au cours des négociations “focalisée” sur la préservation de la sécurité nationale des Etats-Unis.

Mais l’UE ne s’est pas satisfaite de la concession du président américain Donald Trump. “La décision américaine prolonge l’incertitude du marché, qui affecte déjà les décisions commerciales”, a réagi l’exécutif européen dans un communiqué tôt mardi matin.

L’UE “devrait être totalement et définitivement exemptée de ces mesures, car elles ne peuvent être justifiées par des raisons de sécurité nationale”, a ajouté la Commission. Le dialogue avec les Etats-Unis va se poursuivre, mais “nous ne négocierons pas sous la menace”, a-t-elle insisté.

Berlin “attend toujours une exemption durable”, a indiqué de son côté la porte-parole du gouvernement allemand dans un communiqué. Plus tôt, le gouvernement britannique s’était félicité du sursis américain, mais en soulignant qu’il continuerait à rechercher une “exemption définitive” avec ses “partenaires de l’UE et le gouvernement américain”.

“Patients, mais prêts”

Le président américain Donald Trump avait promulgué le 8 mars des droits de douane de 25% sur les importations d’acier et de 10% sur celles d’aluminium tout en exemptant immédiatement le Canada et le Mexique. Fin mars, il avait également exempté provisoirement l’UE.

Dans le cas d’Ottawa et de Mexico, le président américain a par ailleurs lié une éventuelle exemption définitive à la renégociation du traité de libre-échange nord-américain (Aléna).

Ce bref répit intervient alors que les Européens ont multiplié les demandes d’exemption définitive ces dernières semaines et fait largement savoir qu’ils étaient “prêts” à riposter en cas de mise en oeuvre de ces taxes. “Nous sommes patients, mais nous sommes aussi prêts” à agir, avait ainsi averti lundi le porte-parole de la Commission européenne, Margaritis Schinas.

Plainte à l’OMC

En échange d’exemptions de ces taxes, les Américains réclament des concessions commerciales. Ils ont ainsi obtenu de la Corée du Sud une réduction de ses exportations d’acier vers les Etats-Unis et une plus grande ouverture de son marché à leurs constructeurs automobiles. La Maison Blanche a d’ailleurs annoncé lundi soir la finalisation de l’accord de principe annoncé fin mars avec Séoul.

“Un des problèmes qui apparaît est celui du traitement équitable des automobiles et nous aimerions voir quelques concessions de l’Europe”, a rappelé la semaine passée le principal conseiller économique de Donald Trump, Larry Kudlow.

Pour les Européens, c’est la Chine, de loin le premier producteur mondial d’acier et souvent accusée de subventionner massivement son industrie, qui est à l’origine de la surcapacité dans le secteur. Pékin, qui subit depuis fin mars les taxes américaines, a de son côté porté plainte contre les Etats-Unis devant l’Organisation mondiale du commerce (OMC).

Tabac, bourbon, jeans

Sans attendre la décision définitive américaine, Bruxelles a poursuivi ces dernières semaines les démarches qui lui permettront de répondre à d’éventuelles taxes américaines tout en respectant les règles de l’OMC.

La mesure la plus immédiate vise à taxer de manière “ciblée et proportionnée” des dizaines de produits emblématiques fabriqués aux Etats-Unis, parfois dans des Etats ayant voté pour Donald Trump, dont le tabac, le bourbon, les jeans ou les motos pour compenser en valeur les pertes potentielles pour l’industrie européenne.

Une liste de produits a déjà été approuvée mi-avril par les Etats membres mais, selon une source européenne, il faudrait encore quelques semaines avant que l’UE puisse en toute légalité frapper les Etats-Unis de premières mesures de rétorsion.

Si Washington venait à imposer le 1er juin ses nouvelles taxes, Bruxelles pourrait également déposer une plainte devant l’OMC, estimant que, sous couvert de préserver la sécurité nationale, elles ne servent qu’à avantager les entreprises américaines. Cette action prendrait alors des années avant d’aboutir.

L’Europe a exporté 5,3 milliards d’euros (6,3 milliards de francs) d’acier et 1,1 milliard d’euros d’aluminium en 2017 vers les Etats-Unis.

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