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Allemagne: manifestations anti-libre-échange transatlantique

Les détracteurs du TTIP craignent notamment la création d'un mécanisme d'arbitrage parallèle pour les investisseurs étrangers qui viendrait affaiblir le pouvoir des autorités publiques face aux grandes entreprises. KEYSTONE/AP/MARKUS SCHREIBER sda-ats

(Keystone-ATS) De 163’000 à 320’000 manifestants ont défilé samedi dans sept villes allemandes pour dénoncer le projet de traité de libre-échange transatlantique (TTIP). Le texte est soutenu par Angela Merkel mais toujours plus décrié en Europe, notamment par la France.

Dans un pays où la population est largement hostile à ce traité en cours de négociation entre les Etats-Unis et l’UE, les organisateurs des manifestations de samedi – une trentaine d’ONG, de syndicats et partis politiques – ont affirmé avoir mobilisé quelque 320’000 personnes.

La police dans les 7 villes concernées par les défilés avançait pour sa part une estimation de 163’000 à 188’000 manifestants.

A Berlin, de 50’000 à 70’000 personnes se sont rassemblées malgré les fortes pluies qui se sont abattues en début de manifestation, à la mi-journée. La mobilisation a également été forte dans les deux autres principales villes du pays, Hambourg et Munich, moins importante à Francfort, Cologne, Stuttgart et Leipzig.

“Démocratie au lieu du TTIP”

Mille pancartes et drapeaux bariolées y étaient tenus à bout de bras, barrés de slogans comme “Démocratie au lieu du TTIP”, “Non c’est non”, ou encore “Partager plutôt que diviser”.

Outre le TTIP, pour lequel une nouvelle ronde de négociations vient d’être fixée à début octobre, les manifestants entendaient exprimer leur opposition au Ceta, le traité de libre-échange avec le Canada dont la signature finale est attendue à la fin du mois prochain.

Ces deux traités inquiètent de longue date de nombreux Allemands, alors que Mme Merkel n’a cessé d’insister sur les “chances de créations d’emplois” qui doivent en découler.

L’Etat de droit doit prévaloir

“En Europe, il faut que ce soient les gens qui reviennent au premier plan (…), c’est pour ça qu’il faut stopper le TTIP”, juge à Berlin Axel Kaiser, coordinateur d’une plate-forme de petites et moyennes entreprises contre ce traité.

“Nous nous battons pour des processus de décision démocratiques, pour que les principes de l’Etat de droit s’appliquent dans les accords commerciaux”, estime un autre militant, Ulrich Schneider.

Négocié depuis mi-2013 par le gouvernement américain et la Commission européenne, l’accord TTIP vise à supprimer les barrières commerciales et réglementaires de part et d’autre de l’Atlantique pour créer une vaste zone de libre-échange.

Ses détracteurs craignent, outre une remise en cause des normes sociales, sanitaires et environnementales européennes, la création d’un mécanisme d’arbitrage parallèle pour les investisseurs étrangers qui viendrait affaiblir le pouvoir des autorités publiques face aux grandes entreprises.

Négociations secrètes

Les organisateurs des manifestations en Allemagne ne cessent également de dénoncer des négociations tenues dans le plus grand secret.

Soutenu par la chancelière Merkel, le TTIP divise aussi son gouvernement, le vice-chancelier social-démocrate Sigmar Gabriel ayant vertement critiqué le traité.

Face à la défiance accrue, la commissaire européenne au Commerce, Cecilia Malmström, a dénoncé samedi dans le quotidien Bild “les incompréhensions, légendes urbaines et mensonges dans le débat” autour de ce traité.

Selon un sondage de l’institut Ipsos, 52% des Allemands estiment que le libre-échange mène à un affaiblissement des normes sociales et permet l’importation de produits dommageables pour la santé.

Autres pays opposés

D’autres pays européens, comme l’Autriche mais surtout la France, sont opposés au traité. Mercredi, le secrétaire d’Etat français au Commerce extérieur Matthias Fekl a affirmé que les négociations entre la Commission européenne et les Etats-Unis n’avaient plus le soutien politique de Paris. Le Premier ministre français Manuel Valls a également demandé “un coup d’arrêt clair” dans les négociations.

Washington, tout comme Mme Merkel, veulent encore achever les négociations avant la fin de l’année, tant que Barack Obama se trouve à la Maison-Blanche.

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