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Artur Mas inculpé pour le référendum sur la Catalogne

(Keystone-ATS) Le président catalan Artur Mas a été inculpé jeudi à Barcelone pour avoir organisé un référendum sans valeur légale sur l’indépendance de la Catalogne. Cette consultation avait eu lieu en 2014 malgré l’interdiction de la Cour constitutionnelle espagnole.

M. Mas s’est vu formellement notifier des poursuites pour “désobéissance civile”, “détournements de fonds publics” et “usurpations de fonctions” notamment. En théorie, ces délits peuvent entraîner son inhabilité, ce qui l’empêcherait de diriger la région.

Le dirigeant séparatiste a quitté le tribunal supérieur de justice de Catalogne après une heure d’audience. Il s’est arrêté sur les marches où une foule de quelque 3000 sympathisants l’attendait. Entouré des membres de son exécutif, mais aussi du Parlement régional, de dirigeants indépendantistes, il a alors chanté l’hymne catalan, un geste de défi à l’égard du pouvoir judiciaire espagnol.

Premier responsable

“Je me déclare premier responsable de cette initiative politique”, a déclaré plus tard M. Mas devant la presse. Ces poursuites découlent selon lui d’un “abus de pouvoir” du gouvernement espagnol. “Je suis le premier responsable de tout. Je dis bien de tout. Je ne fuis devant aucune responsabilité”, a-t-il insisté.

L’audience était présentée par ses partisans comme une tentative de plus de réprimer le sécessionnisme, même si la cour a attendu que les élections régionales en Catalogne, remportées par les indépendantistes, soient passées pour lancer la convocation aux fins d’inculpation. “A bas la justice espagnole”, ont crié des sympathisants devant le tribunal.

Hasard du calendrier

Hasard du calendrier, le rendez-vous judiciaire avait été fixé pour le jeudi 15 octobre, une date anniversaire symbolique pour les partisans de la séparation d’avec l’Espagne. C’est le jour de la mort de leur héros Lluis Companys, fusillé par des soldats du dictateur Francisco Franco au château de Montjuic, une forteresse militaire, il y a 75 ans.

Lluis Companys, président catalan à l’époque, avait, six ans plus tôt, proclamé un éphémère “Etat catalan de la République fédérale espagnole”, le 6 octobre 1934, pendant une dizaine d’heures.

Jeudi, Artur Mas s’est rendu au petit matin au pied de la tombe de son prédecesseur, au château de Montjuic, surplombant Barcelone, au côté de la maire de la ville, Ada Colau. L’anniversaire a été célébré par des centaines de militants qui ont défilé dans la nuit autour de cette forteresse militaire, en brandissant des torches enflammées.

Rébellion démocratique

M. Mas était convoqué jeudi pour avoir organisé le 9 novembre 2014, au nom de la “liberté d’expression”, une “rébellion démocratique” sous forme de consultation sans valeur légale sur l’indépendance de la Catalogne. Le gouvernement national du conservateur Mariano Rajoy refusait depuis 2012 l’organisation d’un référendum d’autodétermination.

Près de 2,3 millions de personnes ont participé au référendum, 1,9 million se prononçant pour l’indépendance. La consultation avait cependant été auparavant interdite par la Cour constitutionnelle, saisie par le gouvernement.

Deux autres responsables ou ex responsable de l’éxécutif avaient déjà été inculpées mardi, Irene Rigau et Joana Ortega. Des centaines de personnes avaient alors déjà manifesté devant le tribunal, entraînant un communiqué du tribunal dénonçant ces “attaques directes contre l’indépendance de la justice”.

Victoire mitigée aux régionales

Ces audiences interviennent après la victoire le 27 septembre des indépendantistes aux régionales, avec une majorité absolue des sièges au Parlement régional (72 sur 135). Les séparatistes entendent faire sécession en 2017 au plus tard, bien qu’ils n’aient pas la majorité absolue des voix (47,8% des suffrages).

Le gouvernement de Mariano Rajoy, qui affronte des législatives le 20 décembre, refuse toute évolution du statut catalan, contrairement aux autres grands partis espagnols. Il a annoncé qu’il veillerait “au respect de la loi”.

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