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Christoph Blocher et l’UDC disent non à l’accord-cadre Suisse-UE

Christoph Blocher ne veut pas d'une reprise automatique du droit européen sans que la Suisse ait son mot à dire (archives). KEYSTONE/PETER KLAUNZER sda-ats

(Keystone-ATS) Christoph Blocher et son comité “UE-Non” lancent la bataille contre l’accord-cadre qui pourrait lier la Suisse à l’UE. Ils dénoncent une perte de souveraineté. Astrid Epiney, rectrice de l’Université de Fribourg, juge cette nouvelle campagne anti-UE stérile.

La conclusion de cet accord n’est plus qu’une formalité, selon le tribun UDC. Le Conseil fédéral n’attend plus que le moment opportun pour le présenter.

Le Zurichois et son comité ont donc décidé de lancer la campagne contre ce projet. Plusieurs encarts publicitaires ont déjà paru dans la presse ces derniers jours. L’accord-cadre aurait en effet des “effets désastreux” et “détruirait la voie bilatérale”, ont déclaré vendredi les intervenants devant la presse à Berne.

“Détournement de la démocratie”

L’accord-cadre institutionnel est sur la table depuis 2008. Il doit définir des règles contraignantes pour la participation de la Suisse à certains secteurs du marché intérieur européen. L’Union européenne (UE) refuse de signer de nouveaux accords avec la Suisse (dans le domaine de l’électricité par exemple) tant que ce volet n’est pas réglé.

Or un tel accord mettrait littéralement la Suisse sous tutelle, selon le comité. Il automatiserait la reprise du droit européen sans que la Suisse ait son mot à dire et au mépris du droit de référendum.

En cas de litige, ce serait la Cour de justice de l’UE qui trancherait, sans aucune garantie d’impartialité. La Suisse serait privée de possibilité de recours et pourrait même faire l’objet de sanctions de la part de Bruxelles. Enfin, l’UE veut imposer un organe de surveillance qui contrôlerait en permanence la fidélité de la Suisse au contrat-cadre.

Pas un hasard

“La Suisse ne pourrait plus agir en Etat souverain et indépendant”, conclut Christoph Blocher qui compare cette campagne à celle de l’EEE en 1992. L’accord-cadre est certes encore en cours de négociation. “Mais tant que ces points essentiels ne sont pas écartés, nous le combattrons”, a ajouté Albert Rösti, président de l’UDC.

Le moment choisi pour relancer la fronde contre l’UE se greffe sur le calendrier serré de la mise en oeuvre de l’initiative contre l’immigration de masse. Comme aucune solution consensuelle n’a été trouvée avec l’UE, ne reste plus que la clause de sauvegarde unilatérale qui réintroduirait des contingents pour les ressortissants européens.

Pour l’ancien conseiller fédéral, il est clair que l’UE fait pression pour lier la question de la libre circulation des personnes à celle de l’accord-cadre. Le Conseil fédéral n’en veut pas pour des raisons tactiques. Il craint que cela ne passe pas devant le peuple.

Nul doute que la campagne contre tout rapprochement un peu trop soutenu à l’UE s’annonce animée. Le comité “Non à l’adhésion insidieuse à l’UE (EU-No)”, fondé en 2013, compte aujourd’hui 130 membres collectifs et 6228 membres individuels. Elle dispose de sections romande et tessinoise et a le soutien appuyé de l’UDC et de l’Action pour une Suisse indépendante et neutre (ASIN).

Contre les intérêts des bilatérales

Pour Astrid Epiney, professeure de droit européen et rectrice de l’Université de Fribourg, ne pas entrer en matière sur l’accord-cadre met en péril les bilatérales à moyen terme. “La relation Suisse-UE doit pouvoir se développer, car la voie du statu quo n’est pas viable”, a-t-elle indiqué à l’ats.

Selon elle, il est prématuré de porter un jugement définitif sur l’accord-cadre, alors que le texte n’est pas connu, qu’on ignore encore les procédures et compétences exactes de la Cour de Luxembourg et que plusieurs points restent controversés entre Berne et Bruxelles.

De plus, il est trompeur de parler de perte d’autonomie. Comme avec tout traité international, la Suisse accepte une perte de son “autonomie” depuis qu’elle a souscrit aux accords bilatéraux avec l’UE. Cette approche était à l’origine aussi voulue par l’UDC.

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