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Défis du marché européen: le cannabis, l’ecstasy et les “darknets”

Avec 38%, le cannabis représente la plus grande part du marché des drogues (archives). KEYSTONE/AP The Canadian Press/JUSTIN TANG sda-ats

(Keystone-ATS) Hausse de la consommation d’un cannabis toujours plus puissant, résurgence de l’ecstasy et développement des marchés en ligne clandestins. Telles sont les principales conclusions du rapport 2016 de l’Observatoire européen des drogues et des toxicomanies (OEDT).

“L’Europe est confrontée à des problèmes de drogue de plus en plus importants. L’offre et la demande de nouvelles substances psychoactives, de stimulants, d’héroïne et d’autres opiacés continuent d’augmenter, ce qui a des conséquences majeures en termes de santé publique”, note Dimitris Avramopoulos, commissaire européen pour les affaires intérieures, cité dans l’étude.

Publiée mardi à Lisbonne, cette dernière se base sur des rapports nationaux transmis par les Etats membres de l’UE, la Turquie et la Norvège.

Le marché des drogues illicites dans l’UE est estimé à 24,3 milliards d’euros en 2013 (26,8 milliards de francs). Avec 38%, le cannabis (importé ou produit localement) représente la plus grande part de ce marché et sa production est devenue “un générateur de revenus majeur pour la criminalité organisée”, selon l’OEDT. Viennent ensuite l’héroïne (28%), la cocaïne (24%), les amphétamines (8%) et l’ecstasy (3%).

Le cannabis représente aussi les trois quarts des saisies de drogue en Europe (50% pour l’herbe et 24% pour la résine). Il arrive très loin devant la cocaïne et le crack (9%), les amphétamines (5%), l’héroïne (4%) ou encore l’ecstasy (2%). L’observatoire estime à environ 1% la part des adultes européens consommateurs quotidiens ou quasi quotidiens de cannabis.

Et plus de 88 millions d’adultes, soit plus d’un quart des personnes âgées de 15 à 64 ans dans l’Union européenne, ont déjà consommé des drogues illicites, rappelle l’OEDT.

Production intensive

Les niveaux de teneur en principe actif de l’herbe (8% à 12% de tétrahydrocannabinol, THC) et de la résine de cannabis (12% à 18% de THC) sont historiquement élevés. Une hausse qui est “peut-être due à l’émergence de techniques de production intensive en Europe et, plus récemment, à l’introduction de plants à forte teneur en principe actif au Maroc”.

Si le cannabis reste la drogue la plus consommée en Europe (51,4 millions d’hommes et 32,4 millions de femmes y ont goûté au moins une fois), l’OEDT constate que l’éventail disponible est toujours plus diversifié. Il note notamment une “résurgence” de l’ecstasy, “tant auprès des consommateurs de stimulants classiques qu’auprès d’une nouvelle génération de jeunes usagers”.

“Des poudres, cristaux et comprimés fortement dosés, avec toute une série de logos, de couleurs et de formes, sont disponibles, de même qu’une production à la commande et un recours à un marketing sophistiqué et ciblé. Il pourrait s’agir d’une stratégie délibérément mise en oeuvre par les producteurs afin d’améliorer la réputation de cette drogue après une longue période pendant laquelle sa piètre qualité” et les nombreux faux ont fait diminuer sa consommation, note-t-il.

Des disparités régionales peuvent être observées sur le marché des stimulants, la consommation de cocaïne étant plus élevée dans les pays d’Europe de l’Ouest et du Sud. Les amphétamines, quant à elles, sont plus présentes au Nord et à l’Est. Tous ces produits ont vu une amélioration de leur pureté, avec des prix stables.

Drogues en ligne

L’observatoire souligne que “le potentiel d’expansion de l’offre de drogue en ligne semble considérable”, avec le marché des “darknets” (réseaux clandestins non référencés), les échanges de pair à pair, le cryptage des données et des techniques de paiement difficiles à retracer (utilisation de monnaie électronique type bitcoin), même si la plupart des transactions se déroulent hors ligne.

Enfin, l’OEDT met en garde contre les nouvelles substances psychoactives (cannabinoïdes et opiacés de synthèse notamment), parfois toxiques. “Les jeunes consommateurs peuvent, à leur insu, servir de cobayes humains pour des substances dont les risques potentiels pour la santé sont dans une large mesure inconnus”. Pas moins de 98 nouvelles substances ont été signalées en 2015, 101 en 2014.

Au moins 6800 décès par surdose, principalement associés à l’héroïne, ont été recensés dans l’UE en 2014, avec des hausses “préoccupantes” en Irlande, Lituanie, Suède et au Royaume-Uni.

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