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Décoration prestigieuse pour une Genevoise d’adoption

Genevoise d'adoption, Noëlla Rouget, résistante et déportée, a reçu vendredi à Genève les insignes de Grand-Croix de l'Ordre national du mérite, une des plus hautes distinctions de l'Etat français. L'ancien conseiller fédéral Pascal Couchepin a assisté à la cérémonie. KEYSTONE/MARTIAL TREZZINI sda-ats

(Keystone-ATS) Genevoise d’adoption, la Française Noëlla Rouget, résistante et déportée, est distinguée par son pays. Elle a reçu vendredi les insignes de Grand-Croix de l’Ordre national du mérite, une des plus hautes distinctions de l’Etat français.

“Noëlla Rouget a eu un comportement héroïque et exemplaire tout au long de sa vie”, a déclaré le général Benoît Puga. Grand Chancelier de la Légion d’honneur, il est venu à Genève remettre cette décoration à la centenaire afin de lui épargner un déplacement à Paris. Compte tenu de son importance, cette médaille est habituellement remise par le président de la République française.

“Vous avez su, au moment de la victoire, ne pas succomber à la haine, à la rancune, à l’esprit de vengeance”, a-t-il poursuivi en s’adressant à Mme Rouget. Et de lire la demande de grâce qu’elle avait adressée au président, le général de Gaulle, le 14 janvier 1966, permettant à l’auxiliaire de la Gestapo qui l’avait arrêtée et torturée d’échapper à la peine de mort.

“Il me semble devoir, si je veux être logique avec moi-même, vous présenter cette requête”, écrivait-elle, avec pour seuls arguments sa croyance en Dieu, en son pays qui allait abolir la peine de mort, en de Gaulle qu’elle avait suivi dans les rangs de la résistance et son affection pour la nièce du général, rencontrée à Ravensbrück. “Ce pardon est magnifique”, a souligné le général Puga.

Promesse de témoigner

Née Peaudeau le 25 décembre 1919, Noëlla s’engage dès 1940 dans la résistance à Angers (F), où elle enseigne le français. Arrêtée en juin 1943, tout comme comme son fiancé, elle sera déportée à Ravensbrück (D) le 31 janvier 1944, tandis que son compagnon sera torturé puis exécuté en France.

Elle sera libérée en avril 1945. “Comment aurais-je pu imaginer, alors que je pesais 32 kg et que je souffrais de tuberculose, que je serait encore en vie 75 ans plus tard?” a-t-elle déclaré vendredi lors de la cérémonie à la résidence du consul de France. Peu après, en convalescence à Château-d’Oex (VD), elle rencontrera son futur mari, le Genevois André Rouget, lors d’un bal.

Noëlla Rouget a dédié “cette noble distinction” à toutes ses camarades de Ravensbrück: “Je suis une des dernières survivantes de l’enfer, j’ai pu tenir cette promesse faite à nos mortes de témoigner autant qu’il m’a été possible de le faire.” Durant de nombreuses années, elle a parlé devant des classes et accompagné des élèves visiter les camps de concentration.

Autres médailles

Elevée à la dignité de Grand-Croix de l’Ordre national du mérite, Mme Rouget rejoint les 142 récipiendaires de cette décoration qui récompense les mérites distingués, militaires ou civils, rendus à la France. La cérémonie a eu lieu en présence de ses deux fils, de proches et de personnalités, dont l’ex-conseiller fédéral Pascal Couchepin, l’ambassadeur de France et le consul honoraire d’Allemagne.

Seules deux Grand-Croix de l’Ordre national du mérite sont remises chaque année. Mme Rouget, qui est déjà Grand Officier, a aussi reçu la Croix de Guerre et la Médaille du combattant volontaire en 1945. En 1961, elle a été nommée Chevalier de la Légion d’honneur et, en 1996, promue Commandeur. Son amie Geneviève de Gaulle-Anthonioz lui avait remis ces insignes à Genève.

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