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Deux frères poursuivent leur combat en justice contre Exit

A Genève, les deux frères qui voulaient empêcher leur aîné de mettre fin à ses jours avec l'aide d'Exit Suisse romande poursuivent leur combat devant la justice. Ils accusent l'association d'omission de prêter secours et d'avoir prescrit la substance létale de manière illégale. KEYSTONE/ALESSANDRO DELLA BELLA sda-ats

(Keystone-ATS) A Genève, les deux frères qui voulaient empêcher leur aîné de mourir avec l’aide d’Exit Suisse romande poursuivent leur combat en justice contre l’association. Ils ont recouru contre la décision de non-entrée en matière du Ministère public.

Dans son ordonnance du 16 mai, dont l’ats a pris connaissance lundi, le Ministère public écarte toute omission de prêter secours. Les deux frères avaient porté plainte contre Exit fin octobre. Ils estimaient que leur aîné, âgé de 82 ans, était en parfaite santé physique et que son désir de mourir était lié à une dépression. Or l’Association pour le droit de mourir dans la dignité ne lui avait pas proposé d’aide psychologique.

Exit faisait valoir le fait qu’elle apporte désormais son aide aux personnes atteintes de “polypathologies invalidantes liées à l’âge”. Mais ce critère ne correspond pas aux exigences de l’Académie suisse des sciences médicales (ASSM): le patient doit être capable de discernement, être en fin de vie en raison de sa maladie et avoir la possibilité de suivre des traitements alternatifs.

“Mobile égoïste”

Dans l’attente de trancher cette question, la justice avait interdit à Exit de prescrire ou de remettre toute substance létale à l’octogénaire. Ce veuf avait fait état de souffrances psychiques et physiques intolérables pour expliquer son recours à l’association dont il était membre depuis de nombreuses années. Il a finalement mis fin à ses jours seul le 11 novembre 2016.

Dans leur recours du 29 mai contre l’ordonnance de non-entrée en matière, les frères rappellent les déclarations du vice-président d’Exit à L’Illustré du 2 novembre: il disait être “sûr” que l’homme se suiciderait “dans les prochains jours”. Selon eux, il y a bien eu omission de prêter secours. Le “mobile égoïste” était “de sauver la face” de l’association vu l’interdiction prononcée par la justice.

Ordonnance illégale

Le défunt s’étant tué sans aide, le Ministère public n’a pas non plus retenu, dans son ordonnance de non-entrée en matière, d’infraction à la loi fédérale sur les médicaments et dispositifs médicaux. Les recourants considèrent, eux, que du natrium-pentobarbital, utilisé dans le cadre de l’assistance au suicide, a été prescrit de manière illégale à leur frère, même s’il ne l’a pas utilisé.

La jurisprudence du Tribunal fédéral exige que cette substance soit remise sous ordonnance médicale. Dans le cas présent, le médecin qui a établi cette ordonnance est à la retraite, n’a jamais eu son propre cabinet et est membre du comité d’Exit, dénoncent les recourants, qui l’accusent aussi d’escroquerie et de faux dans les titres, avec la complicité du vice-président d’Exit.

Préciser le cadre

Cette affaire se poursuit devant la justice genevoise, alors qu’Exit Suisse alémanique débattra lors de son assemblée générale, à mi-juin, de la possibilité d’élargir son champ d’action. Elle veut permettre le recours au suicide assisté aux personnes âgées en forme physiquement, mais qui souhaitent mourir par lassitude, comme l’ont révélé Le Matin Dimanche et la SonntagsZeitung dimanche.

La question est aussi politique. Le Grand Conseil neuchâtelois a adopté en mars une initiative cantonale demandant au Parlement fédéral de se pencher sur les bases légales de l’assistance au suicide. Selon le Vert Laurent Kaufmann, auteur du texte, il s’agit de préciser le cadre dans lequel travaillent les organisations actives dans ce domaine, comme Exit ou Dignitas, qui fixent leurs propres règles.

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