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Didier Burkhalter, le discret radical qui étincelait à l’étranger

Didier Burkhalter s'est fait un nom sur la scène internationale. Ici avec l'ancien secrétaire d'Etat américain John Kerry en 2106 lors du Forum économique mondial à Davos. KEYSTONE/JEAN-CHRISTOPHE BOTT sda-ats

(Keystone-ATS) Conseiller fédéral discret et retenu, Didier Burkhalter avait impressionné lors de son année présidentielle, en 2014, par sa gestion du conflit ukrainien et de la crise avec Bruxelles. Il était depuis retombé dans l’ombre, et était toujours plus critiqué.

Le libéral-radical neuchâtelois de 57 ans avait surpris son monde lors de son année présidentielle, point d’orgue de sa carrière sous la coupole fédérale. Médias et politiques s’attendaient à un président au style réservé et sérieux. Ce fut un président à l’aura internationale.

Cumulant la présidence de la Confédération avec celle de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), il a permis à la Suisse de briller sur la scène internationale, notamment en jouant le rôle de médiateur dans le conflit ukrainien.

Celui que d’aucuns taxaient de “George Clooney du gouvernement”, toujours accompagné de sa “première dame” Friedrun, a même joué les “people” à travers le monde. En témoigne le fameux cliché avec le président américain Barack Obama sa femme Michelle.

Ses succès sur la scène internationale lui avaient alors permis de faire taire certaines critiques, notamment de l’UDC, du PDC et du camp rose-vert. Cette année présidentielle contraste fortement avec le reste du mandat du Neuchâtelois, davantage marqué par sa discrétion et sa retenue.

Pas de paillettes à la culture

Elu en 2009, Didier Burkhalter a d’abord hérité du Département de l’intérieur. Le costume de ministre des affaires sociales et culturelles ne lui a guère convenu, et au bout de deux ans, il a endossé les habits de ministre des affaires étrangères.

Pragmatique, Didier Burkhalter a appliqué sa perception réaliste de la politique aux dossiers. Loin de l’esbrouffe et des paillettes, il préfère étudier les questions dans les détails et entendre les parties concernées. Chez lui, les concessions sont mûrement réfléchies et ne s’éloignent jamais trop de ses convictions libérales.

Le Neuchâtelois est ainsi parvenu à sortir de l’ornière la prise en charge des médecines alternatives. Après la résistance de son prédécesseur Pascal Couchepin, il a réintégré provisoirement les méthodes telles que l’homéopathie ou la médecine chinoise dans l’assurance de base.

Au chapitre de l’assurance maladie, le libéral-radical s’est fait passablement d’ennemis avec sa décision de supprimer la prise en charge des lunettes médicales. Sa réforme visant à promouvoir les modèles d’assurance avec réseaux de soins intégrés (managed-care) a échoué devant le peuple en 2012, et il a laissé le soin à son successeur, Alain Berset, de réformer les retraites.

Glaciation avec l’UE

Au Département des affaires étrangères, le mandat du libéral-radical a été marqué par l’adoption, le 9 février 2014, de l’initiative de l’UDC contre l’immigration de masse. Une longue période de glaciation s’en est suivie avec l’Union européenne, durant laquelle le radical humaniste a cédé peu à peu la première place à Simonetta Sommaruga et Johann Schneider-Ammann.

En 2015, le dossier s’est encore éloigné du ministre des affaires étrangères. Le Conseil fédéral a préféré nommé comme super négociateur en chef Jacques de Watteville, secrétaire d’Etat aux questions internationales au sein du Département des finances plutôt que le secrétaire d’Etat aux affaires étrangères Yves Rossier.

Davantage que son retrait, le silence de Didier Burkhalter sur le dossier européen a fait renaître les critiques, relayées par les médias, de la gauche, de l’UDC et même de son propre parti. Le ministre a rechigné à prendre son bâton de pèlerin pour promouvoir son projet d’accord institutionnel avec Bruxelles, remis en cause par l’UDC à travers son initiative contre les juges étrangers.

Semblant de plus en plus isolé en Suisse, il s’est aussi montré moins offensif à l’étranger, ne jouant plus un rôle aussi décisif que lors de la conclusion de l’accord sur le nucléaire iranien.

Réputation de sérieux

Lui qui place la dignité au sommet de sa hiérarchie des valeurs est du type bûcheur. Il n’a jamais raté une élection et s’est forgé une réputation de sérieux. Pragmatique, il a évité soigneusement tous les sujets qui fâchent en attendant d’atteindre le firmament politique suisse.

L’air de rien, cet économiste de formation a gravi les échelons de l’appareil étatique, passant de l’exécutif communal neuchâtelois, au National et au Conseil des Etats.

Avant de passer du côté gouvernemental en novembre 2009, ce père de trois garçons s’était illustré comme “réformateur” en réclamant une recomposition des départements fédéraux et un renforcement de la présidence. Arrivé à l’exécutif, il a dû se contenter d’un léger lifting.

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