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Données mobiles pour mesurer la consommation d’alcool des jeunes

Une équipe de chercheurs de l'EPFL et de l'IDIAP ont récolté des données mobiles auprès de quelque 250 jeunes dans le but d'estimer leur consommation d'alcool lors de sorties nocturnes (photo prétexte). KEYSTONE/CHRISTIAN BEUTLER sda-ats

(Keystone-ATS) Des scientifiques de l’Institut de recherche Idiap et de l’EPFL ont cherché à comprendre les contextes propices à la consommation d’alcool chez les jeunes. Ils se sont basés sur des données factuelles, à savoir les données mobiles récoltées lors de sorties nocturnes.

Les scientifiques ont créé deux applications téléchargées par les participants sur leur smartphone. La première permettait aux volontaires de photographier et de reporter toutes les boissons consommées pendant la soirée, alcoolisées ou non, de même que le lieu de consommation, indique l’EPFL mardi dans un communiqué.

Un rappel leur était envoyé chaque heure afin de rajouter d’éventuelles boissons oubliées. Les chercheurs savaient ainsi pour chaque nuit et chaque utilisateur si de l’alcool avait été consommé ou non. Ils ont classifié les nuits “avec alcool” ou “sans alcool”.

Des capteurs

La seconde application était constituée de différents capteurs. Ils récoltaient en continu des informations sur la soirée: activité, localisation, état de la batterie, sollicitation de l’écran, points bluetooth et wifi à proximité ou la liste des applications utilisées pendant la nuit.

Les chercheurs ont ensuite fait correspondre les données contextuelles récoltées par les capteurs avec la classification “avec alcool” ou “sans alcool” grâce aux photos des boissons prises la même nuit. Ils ont ainsi pu comprendre quels environnements favorisent la consommation d’alcool chez les jeunes: en solo ou en groupe, avec peu ou beaucoup de déplacements, dans des lieux commerciaux ou non.

Déduction automatique

Finalement, les scientifiques ont utilisé l’apprentissage automatique (ou Machine Learning) pour qu’un ordinateur puisse automatiquement déduire si une soirée sera alcoolisée ou non face à un ensemble de données mobiles récoltées par des capteurs.

La méthode permet d’obtenir un résultat correct dans plus de 75% des cas. Les résultats sont publiés dans le journal scientifique IEEE Transactions on Mobile Computing.

Pour cette étude, les chercheurs ont recruté 241 participants âgés de 16 à 25 ans. Ils ont partagé leurs données de manière anonyme durant 10 week-ends, les vendredis et samedis de 20h00 à 4h00 du matin, lors de sorties à Lausanne et à Zurich.

Nouvelle approche

Cette recherche est la première à utiliser des données riches collectées par les smartphones pour comprendre la consommation d’alcool chez les jeunes en Suisse. Elle représente une nouvelle approche pour des études de santé publique et prévention, puisqu’elle permet d’analyser des informations factuelles et non des perceptions.

“Traditionnellement, les études sur la consommation d’alcool chez les jeunes se font à partir de questionnaires que les participants remplissent par exemple le lendemain”, explique Daniel Gatica-Perez, professeur titulaire à l’EPFL à la Faculté des Sciences et Techniques de l’Ingénieur et à l’Institut des humanités digitales, et directeur du groupe Social Computing à l’Institut de recherche Idiap.

“Or on sait que nous oublions généralement de reporter une grande partie de notre consommation. La même remarque s’applique aux contextes : notre perception est subjective”, relève le professeur.

Base pour d’autres études

L’étude ouvre la porte à l’exploration d’autres facettes dans le domaine, comme la consommation à la maison. Les chercheurs soulignent toutefois l’importance d’inclure des entretiens qualitatifs, menés ici par une partenaire chercheuse de l’Université de Zurich. Ils permettent de comprendre les nuances et la complexité de la vie nocturne et de valider certains des résultats.

SWI swissinfo.ch - succursale de la Société suisse de radiodiffusion et télévision

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