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Elections municipales à enjeu national en Afrique du Sud

De nombreux électeurs ont bravé le froid de l'hiver austral pour aller voter. KEYSTONE/AP/SCHALK VAN ZUYDAM sda-ats

(Keystone-ATS) Les Sud-Africains ont voté mercredi pour des élections municipales aux allures de test pour le Congrès national africain (ANC), au pouvoir. L’opposition pourrait l’emporter dans plusieurs grandes villes pour la première fois depuis la fin de l’apartheid en 1994.

L’ANC dirige la plupart des 278 métropoles du pays. Sa majorité est surtout menacée dans trois villes: la capitale Pretoria, le “hub” économique Johannesburg et Port Elizabeth, cité industrielle du bord de l’océan Indien. Selon les sondages, la bataille s’annonce serrée dans ces métropoles avec l’Alliance Démocratique (DA), le principal parti d’opposition de centre-droit qui gouverne déjà Le Cap.

Les bureaux de vote étaient ouverts jusqu’à 19h00 (locales et suisses) pour ce scrutin où plus de 26 millions d’électeurs étaient appelés aux urnes, un record dans la jeune démocratie sud-africaine. Les résultats dans les grandes villes devraient être connus d’ici jeudi matin.

“Un jour historique”

“C’est un jour historique, c’est notre moment. Venez et votez pour le changement”, a lancé dans la matinée le chef de la DA, Mmusi Maimane, en sortant d’un bureau de vote de la banlieue ouest de Johannesburg.

Dans les townships de Johannesburg, les électeurs ont bravé le froid de l’hiver austral pour se rendre aux urnes. “Je veux voir un vrai changement, car depuis qu’on a le droit de vote, nos conditions de vie n’ont pas changé. Il y a de plus en plus de logements en tôle”, déplore Jacky Mathonsi, professeur de 42 ans, dans le bidonville d’Alexandra où les conditions de vie sont très précaires.

“Je suis très content du travail de ce gouvernement”, répond Benedict Tuge, 50 ans. “Beaucoup de choses ont changé depuis 1994. Vous connaissez beaucoup de gouvernements qui donnent des maisons gratuites aux gens?”, demande l’homme qui a voté à Soweto, bastion de l’ANC, à quelques mètres de l’ancienne maison de Nelson Mandela.

Selon les sondages de l’institut Ipsos South Africa, c’est à Port Elizabeth que l’opposition a le plus de chances de s’imposer. Dans cette ville où le chômage bat des records (36% contre 26,7% au niveau national), les déçus de l’ANC sont nombreux.

La gauche radicale comme arbitre

Comme dans plusieurs zones du pays, certains townships de la ville sont toujours privés de services publics de base comme l’eau ou l’électricité, accentuant le mécontentement des plus défavorisés qui jugent que trop peu de progrès ont été faits depuis la fin de l’apartheid.

Mais en face, l’ANC ne panique pas. Ces dernières semaines, ses cadres – y compris le président Jacob Zuma – ont fait campagne pour rassurer leur électorat.

C’est finalement un troisième parti qui pourrait jouer le rôle d’arbitre: les Combattants pour la liberté économique (EFF), formation de gauche radicale emmenée par le populiste Julius Malema.

Fondé en 2013 par cet ancien leader des jeunes de l’ANC, l’EFF devrait grignoter des parts de l’électorat le plus radical du parti au pouvoir. Mardi, Julius Malema avait laissé la porte ouverte à une coalition avec d’autres partis d’opposition si l’ANC venait à être mise en minorité dans une grande métropole.

Défaite symbolique

Un revers du parti au pouvoir dans une grande ville serait un coup dur pour M. Zuma, déjà affaibli ces derniers mois par plusieurs scandales et par la situation économique morose de l’Afrique du Sud.

“Une défaite à Port Elizabeth ou à Johannesburg, historiquement peuplées par des travailleurs noirs, serait profondément symbolique pour l’ANC. Le président serait alors beaucoup plus vulnérable”, prédit Judith February, chercheur à l’Institut des études de sécurité (ISS).

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