Des perspectives suisses en 10 langues

Empa/EPFL: corsets de carbone pour des vieux ponts métalliques

Le pont de Diamond-Creek près de Melboune a été renforcé avec des bandes de PRFC en 2018 et sa solidité a été testée avec un camion de 42 tonnes après les travaux. Empa sda-ats

(Keystone-ATS) Une équipe de l’Empa avec des partenaires de l’EPFL sauve des ponts ferroviaires du XIXe siècle en les consolidant avec des plaques de fibres de carbone. Un pont ferroviaire suisse et un pont routier australien ont déjà été renforcés de la sorte.

Ces monuments industriels, souvent conçus et calculés par des ingénieurs du XIXe siècle, se font en effet doucement manger par la rouille ou craquent des articulations sous les convois Intercity et les poids lourds, a indiqué jeudi le Laboratoire fédéral d’essai des matériaux et de recherche (Empa) dans un communiqué.

La bonne nouvelle est qu’on peut les sauver en les corsetant de plaques de polymères renforcés de fibres de carbone (PRFC), une technique respectant les exigences de la protection des monuments et parfaitement réversible. Ainsi consolidés, ces ouvrages retrouvent toute leur résistance.

Masoud Motavalli et Elyas Ghafoori, de l’Empa, ont déjà renforcé deux anciens ponts par cette méthode comparativement douce: le pont ferroviaire de Münchenstein (BL), datant de 1892, et le pont routier de Diamond-Creek en Australie, datant de 1896.

Si leur système reçoit un bon accueil au niveau mondial, le travail ne manquera pas: en Europe, près de 30% des ponts ont plus de 100 ans. De même aux États-Unis, en Australie et au Japon. Partout, les autorités et les compagnies de chemins de fer cherchent à les maintenir opérationnels.

L’Empa a pour partenaire de recherche Alain Nussbaumer qui, à l’EPFL, étudie la fatigue et la rupture des structures en acier. Les PRFC s’imposent souvent comme la solution adaptée à ce type de problèmes. Ils résistent à la corrosion et ne sont pas sujets à la fatigue; d’autre part, étant légers, ils ne surchargent pas l’ouvrage comme le font les pièces de renforcements en acier.

Une ancre au lieu de colle

Cependant, alors qu’il est simple de coller des plaques de PRFC sur les structures de bois ou de béton, il n’en va pas de même avec des porteurs en acier. Ils sont fréquemment rouillés ou couverts d’épaisses couches de peinture, sans compter les rivets qui viennent compliquer la tâche.

Les scientifiques ont contourné le problème en ne cherchant pas à coller les plaques sur les éléments de l’ouvrage mais en les y ancrant. Ce qui économise le ponçage d’importantes surfaces. En outre, l’ouvrage peut rester en service durant les travaux.

La pose des pièces d’ancrage des plaques est délicate, et l’Empa étudie cette technique depuis plus de dix ans. Le système développé par les chercheurs est maintenant protégé par un brevet.

Il a largement fait ses preuves: le pont de Münchenstein est consolidé depuis 2015 aux PRFC à fibres précontraintes. Jour après jour, plusieurs douzaines de trains de voyageurs ou de marchandises empruntent l’ouvrage historique.

Système de surveillance

Un système de surveillance à long terme composé d’un réseau de capteurs sans fil mesure la charge et les mouvements des différentes parties du pont et envoie ces données à l’Empa en temps réel. Renforcé en janvier 2018, le pont de Diamond-Creek est également équipé de capteurs de charge.

Pour contrôler l’effet du dispositif, les chercheurs y ont fait rouler un tracteur à remorque de 42 tonnes sur le pont avant et après l’intervention. Les premières données montrent que les forces exercées sur l’ancienne structure sont réduites de moitié. On peut donc en déduire que le pont restera encore en service deux fois plus longtemps que sans le dispositif, conclut l’Empa.

SWI swissinfo.ch - succursale de la Société suisse de radiodiffusion et télévision

SWI swissinfo.ch - succursale de la Société suisse de radiodiffusion et télévision