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EPFL: simuler le volume, la forme et la taille des particules fines

Des surfaces en apparence lisses ont une tout autre allure à l'échelle atomique. Ramin Aghababaei/EPFL sda-ats

(Keystone-ATS) Des chercheurs de l’EPFL sont parvenus par simulation informatique à calculer le volume, la forme et la taille de particules fines produites par friction. Une avancée avec des débouchés potentiels dans de nombreux domaines.

Le frottement des plaquettes de freins contre les disques d’un véhicule ou de pneus sur la route génère des millions de particules fines à l’origine, notamment, de troubles respiratoires. La formation de ces débris entraîne également une usure des matériaux qui se traduit, au bout du compte, par une perte économique et énergétique.

L’an dernier, des chercheurs du Computational Solid Mechanics Laboratory (LSMS) de l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL) et de la Cornell University, aux Etats-Unis, ont pu expliquer à l’aide d’une simulation informatique quand se formaient ces particules. Ce travail a ouvert un nouveau champ d’études dans le secteur de la tribologie, la science qui recouvre ce domaine.

Aujourd’hui, les scientifiques rapportent dans la revue Proceedings of the National Academy of Sciences (PNAS) être parvenus à calculer le volume, la forme et la taille de ces débris. Des éléments de compréhension essentiels à l’évaluation de leur dangerosité, les particules les plus fines étant les plus nocives.

Révision de la “loi d’Archard”

La simulation informatique a reproduit le phénomène physique d’usure par adhérence au niveau atomique: “Notre étude montre que la taille des zones de contact entre les aspérités détermine le volume des particules qui se formeront”, explique Ramin Aghababaei, premier auteur de l’étude.

Dans le milieu de la science des matériaux, son étude se présente comme une révision de la “loi d’Archard”, le modèle le plus fondamental et en partie empirique développé en 1953 par le chercheur britannique Jack F. Archard. Cette loi indique dans le cas de l’usure par adhérence que le volume des débris est proportionnel à la force normale et à la distance de glissement entre deux surfaces.

“Jusqu’ici, les chercheurs et ingénieurs ajoutaient un coefficient lorsque leurs observations expérimentales ne correspondaient pas à cette loi. Mais notre recherche a permis de confirmer la justesse de cette formule et donne donc une base scientifique à ce coefficient”, ajoute le chercheur.

Essor du domaine

“La cause de l’apparition de ces débris et le calcul de leur volume restaient jusqu’ici peu compréhensibles des chercheurs, car leurs outils les limitaient à la simple observation empirique”, explique Jean-François Molinari, directeur du LSMS et coauteur de l’étude. Pendant près d’un demi-siècle, la tribologie a fait figure de parent pauvre dans le paysage scientifique.

Une époque quasi révolue, selon le professeur, grâce au développement de nouvelles techniques expérimentales à l’échelle atomique et de la simulation numérique qui permet de comprendre des comportements physiques restés jusqu’ici invisibles à l’oeil humain et aux caméras les plus performantes.

Ces travaux peuvent trouver des applications dans l’industrie automobile et aérospatiale, ainsi qu’en métallurgie, pour fabriquer, par exemple, des enduits qui évitent les pertes de matériaux et d’énergie. Limiter l’usure des prothèses médicales et les douleurs que subissent les patients est un autre débouché.

Ramin Aghababaei va maintenant démarrer son propre groupe de recherche à l’Aarhus University, au Danemark, en travaillant, entre autres, sur la prévention de l’usure des éoliennes.

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