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Etat d’urgence aux Maldives: le tourisme touché mais pas coulé

Lundi, le président Abdulla Yameen a décrété l'état d'urgence pour quinze jours, procédant à une série d'interpellations après le camouflet infligé à son régime par la Cour suprême qui a cassé les condamnations de neuf opposants (archives). KEYSTONE/AP/MOHAMED SHARUHAAN sda-ats

(Keystone-ATS) Les Maldives ont à nouveau plongé dans le chaos politique cette semaine. Cette situation récurrente écorne l’image de l’archipel idyllique, mais sans jamais dissuader les touristes. Même si les visiteurs européens se font moins nombreux ces dernières années.

Lundi, le président Abdulla Yameen a décrété l’état d’urgence pour quinze jours dans ce micro-Etat de 340’000 habitants à majorité sunnite, procédant à une série d’interpellations après le camouflet infligé à son régime par la Cour suprême qui a cassé les condamnations de neuf opposants.

Dans la foulée, la Chine – premier pourvoyeur de touristes vers les Maldives – a déconseillé la destination à ses ressortissants. Cette consigne tombe mal pour l’industrie touristique maldivienne, car la fête du Nouvel an chinois, mi-février, est le pic de la fréquentation chinoise.

Les Etats-Unis, la Grande-Bretagne, l’Inde ou encore l’Australie ont aussi émis des avertissements pour leurs voyageurs, à des degrés divers. La France “recommande” de ne pas se rendre dans la ville de Malé et dans les villages”, en raison “du risque élevé de manifestations à caractère violent”.

Surtout dans la capitale

Depuis l’instauration de l’état d’urgence, “seules quelques personnes ont annulé ou demandé le report de leur voyage aux Maldives, une toute petite proportion”, résume à l’AFP le président du syndicat des tour-opérateurs français (Seto), René-Marc Chikli.

“On reste vigilants bien sûr. Mais c’est dans la capitale Malé qu’il se passe des choses, et les îles touristiques sont complètement déconnectées du reste du pays”, souligne-t-il.

“Ile-hôtel”

“Les vacanciers ne sortent quasiment jamais de leur ‘île-hôtel'”, renchérit Emmanuel Foiry, PDG du tour-opérateur Kuoni: “quelques clients ont appelé pour ne plus partir mais ce n’est pas le raz-de-marée; il n’y a rien de nouveau car on a ce type de ‘soubresauts’ depuis plusieurs années dans le pays”.

Il reconnaît “que l’image de l’archipel n’est pas bonne par rapport au président en place, on ne parle pas comme ça de la Polynésie ou des Seychelles. Il y a confrontation entre une image idyllique et un régime horrible”, selon lui.

“Tendance baissière” du marché européen

Outre divers troubles et mutineries ces dernières années ou un précédent état d’urgence en 2015, le gouvernement maldivien avait fait parler de lui à l’étranger en 2011 en décidant d’interdire les spas dans les hôtels de luxe, suite aux pressions d’un parti islamiste les comparant à des lieux de prostitution… une interdiction levée une semaine plus tard.

En 2016, les lagons turquoise de cet archipel posé au sud du Sri Lanka – dont l’économie est très dépendante du tourisme – ont attiré 1,3 million de visiteurs (+4,2% sur un an). Derrière les Chinois, avec 324’000 arrivées, suivent les Allemands et les Britanniques. Les données officielles maldiviennes font état d’un marché européen “sur une tendance baissière entre 2012 et 2016, avec 10% de parts de marché en moins”.

Les “oeillères” des touristes

Contactés par l’AFP, Thomas Cook, voyagiste britannique, et TUI France, premier opérateur touristique français, indiquent n’avoir pas reçu de demandes d’annulations pour les Maldives.

TUI France, qui propose 16 hôtels dans l’archipel, indique qu’en 2018 “la destination repart à la hausse”, notamment car elle est “de nouveau abordable en matière de prix” en matière d’hôtellerie.

“Les Maldives sont moins chères que les Seychelles ou la Polynésie et continuent d’attirer du monde notamment grâce au développement du tourisme asiatique. Mais l’archipel est sous tension avec deux mondes qui cohabitent, un modèle qui peut rester préservé tant qu’il n’y a pas de débordements ou d’exactions contre des touristes”, estime Jean-Pierre Nadir, président du portail Easyvoyage.

“Il n’y a pas de désaffection marquée” malgré cet envers du décor, renchérit Jean-Marc Rozé, secrétaire général des Entreprises du voyage (qui regroupe les agences de voyages françaises). “C’est assez paradoxal, mais c’est lié au fait que le touriste se focalise sur son île, et qu’il a des oeillères sur ce qu’il peut se passer juste à côté”.

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