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Feu vert du Parlement européen à l’accord entre l’UE et le Canada

Le traité controversé a été adopté par 408 voix contre 254 et 33 abstentions. KEYSTONE/AP/JEAN-FRANCOIS BADIAS sda-ats

(Keystone-ATS) Le Parlement européen a approuvé mercredi le CETA, accord de libre-échange controversé entre l’Union européenne (UE) et le Canada. Ce texte doit faire disparaître les tarifs douaniers sur près de 99% des marchandises entre les deux partenaires.

L’Accord économique et commercial global (AECG / en anglais CETA) a passé la rampe par 408 voix contre 254, et 33 abstentions. Il pourrait entrer en vigueur provisoirement dès le 1er mars, car sa ratification par les parlements nationaux prendra des années.

Le montant des échanges entre l’UE et le Canada s’élevait à 64 milliards d’euros en 2015. Une étude de la Commission européenne estime que dans les sept ans suivant l’accord, les exportations de l’UE pourraient augmenter de 24% et celles de son partenaire de 20%.

L’UE et le Canada négocient le CETA depuis 2009. Ses partisans le décrivent comme le modèle de ce que devrait être un traité bilatéral. Il exclut de son champ les services publics. Il reconnaît les Indications géographiques protégées et les normes européennes de santé, de sécurité alimentaire, d’environnement ou de droits sociaux.

Centaines de manifestants

Ses adversaires le jugent au contraire anti-démocratique, trop favorable aux multinationales, léger sur l’environnement ou encore dangereux pour l’agriculture européenne. Entre 700 et 1000 opposants ont manifesté mercredi dans Strasbourg en criant “No CETA !”.

Sur leurs banderoles: “Démanteler la démocratie ? Hors de question !”, “Plus vous insistez, plus nous résistons”. Ils ont érigé un cheval de Troie gonflable, symbole des risques qu’impliquerait l’accord. Des dizaines de personnes ont bloqué l’entrée du bâtiment en se couchant par terre, retardant le débat de quelques minutes.

Celui-ci, parfois houleux, a duré trois heures. La commissaire européenne au Commerce Cecilia Malmström a décrit “un accord progressiste avec un partenaire progressiste”. Rien n’affectera “la sûreté de la nourriture que nous mangeons ou des produits que nous achetons”, ni n’entraînera la privatisation des services publics.

“Il y a 17’000 entreprises qui exportent vers le Canada et rencontrent des difficultés, dont 80% sont des PME”, a souligné la libérale suédoise. Elle a aussi évoqué les menaces que ferait peser sur l’UE le protectionniste Donald Trump à la Maison Blanche. “Nous sommes à un moment où beaucoup s’opposent à ce que représente l’UE (…). Contre ces tendances, nous pouvons montrer que le protectionnisme ne fonctionne pas.”

Critiques aux extrêmes

Globalement, l’accord était soutenu par les eurodéputés de droite, ainsi que les libéraux et la majorité des socialistes. Les Verts, l’extrême gauche, l’extrême droite et certains socialistes ont voté contre.

Yannick Jadot, candidat écologiste à l’élection présidentielle en France, accuse le CETA de nourrir la méfiance des citoyens envers une Europe dérégulatrice et, selon lui, soumise aux multinationales. “Qu’est-ce qui justifie les Brexit, qu’est-ce qui explique les Trump – c’est la mondialisation que vous construisez. Vous alimentez le feu dont se nourrissent les extrêmes droites.”

Autre candidate à la présidentielle française, la présidente du Front national Marine Le Pen a elle-même dénoncé “un traité scélérat” qui “détruira une fois de plus des centaines de milliers d’emplois en Europe”.

Tribunaux arbitraux

Parmi les principales critiques, les tribunaux arbitraux amenés à être mis en place une fois que le traité aura été définitivement approuvé. Ces juridictions pourront être saisies par une entreprise afin de demander réparation à un Etat qui aurait pris une réglementation contraire à ses intérêts.

Le Parlement de la région francophone belge de Wallonie s’en était inquiété en octobre 2016, entraînant une brève rébellion et une mini-crise diplomatique avec le Canada. La signature formelle du traité par l’UE et le Canada en avait été retardée de quelques jours.

Avec l’approbation du Parlement européen, un long et incertain processus de ratification s’ouvre désormais dans l’ensemble des pays de l’UE. Ce qui ne manquera pas d’influer sur les autres accords discutés par Bruxelles. Encore plus contesté, le TTIP (ou Tafta), négocié avec les Etats-Unis, a d’ores et déjà été gelé avec l’élection à la Maison Blanche de Donald Trump.

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