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Législatives: le pays tente de se stabiliser politiquement

Un vote très indécis samedi au Lesotho, l'un des pays les plus pauvres d'Afrique (archives) KEYSTONE/AP sda-ats

(Keystone-ATS) Les électeurs du Lesotho ont voté samedi pour des législatives aux résultats incertains. L’objectif de ce scrutin est de permettre à ce petit royaume africain de rompre avec son instabilité politique chronique, nourrie par une armée omniprésente.

Ces élections, les troisièmes en cinq ans, ont été précipitées par la mise en minorité en mars de la coalition de sept partis dirigée par le premier ministre Pakalitha Mosisili, au pouvoir depuis 2015.

Les bureaux de vote ont ouvert à 07h00 (heure suisse) dans cette monarchie de 2 millions d’habitants enclavée au milieu des montagnes d’Afrique du Sud, considérée comme un des pays les moins développés de la planète. Environ 1,2 million d’électeurs étaient appelés à voter jusqu’à 17h00 (heure suisse). Les premiers résultats fiables ne sont pas attendus avant plusieurs jours.

Dans un froid mordant, des dizaines d’électeurs coiffés de bonnets et drapés dans les traditionnelles couvertures bariolées locales se sont pressés dès l’aube pour déposer leur bulletin dans l’urne. La journée s’est déroulée dans le calme.

Duel au couteau

“Nous voulons du changement et je suis ici pour voter pour un parti qui, souhaitons-le, fera de nous sa priorité”, a déclaré samedi une jeune électrice. Un de ses voisins dans la file a fait le voyage de Johannesburg où il travaille pour voter. “Un jour, notre voix permettra à nos enfants d’avoir un emploi et une éducation et ils n’auront pas à aller en Afrique du Sud pour travailler”, espère-t-il.

Au terme d’une campagne active, le scrutin s’oriente vers un duel au couteau entre le sortant Mosisili, 72 ans, et l’ex-chef du gouvernement Thomas Thabane, 77 ans, qui avait été contraint de quitter le pays en 2014 après une tentative de coup d’Etat militaire.

Même s’il n’a quitté son exil sud-africain qu’il y a seulement trois mois, M. Thabane et son parti, le Congrès des Basotho (ABC), ont réussi à mobiliser les foules, notamment dans la capitale Maseru et ses environs où les jeunes électeurs sont nombreux.

“Le vote des villes est largement acquis à l’ABC”, déclare l’analyste Mafa Sejanamane, de l’université du Lesotho. L’influence du Congrès des démocrates (DC) de M. Mosisili dans ses bastions ruraux s’est en même temps “considérablement érodée”, note-t-il.

“Il est donc très peu probable qu’un des deux partis réunisse seul une majorité absolue”, pronostique M. Sejanamane.

L’armée en arbitre

Dans la monarchie parlementaire dirigée par le roi Letsie III, dont les pouvoirs sont largement honorifiques, le parlement est composé de 120 sièges de députés, 80 élus au suffrage majoritaire, les 40 autres répartis à la proportionnelle. Ce système électoral et la présence sur la ligne de départ d’une ribambelle de petits partis laissent présager d’une nouvelle coalition gouvernementale synonyme d’instabilité.

D’autant plus que le pays se remet difficilement du putsch manqué de 2014. Accusé d’avoir alors ordonné l’assaut du QG de la police, le chef de l’armée, le général Tlali Kamoli, a été démis de ses fonctions l’an dernier. Mais son influence continue d’alimenter les rumeurs d’intervention militaire, malgré les mises en garde de la Communauté de développement d’Afrique australe (SADC) qui a assuré qu’elle ne tolèrerait aucun détournement des résultats du scrutin.

“L’armée a ses propres intérêts (…) je ne suis pas leur favori”, a concédé l’ex-premier ministre Thomas Thabane, faisant des militaires la principale source d’incertitude du scrutin.

Sida dévastateur

Dans ce climat, les électeurs attendent peu du vote de samedi. Leur participation a chuté de 66% en 2002 à 46% en 2015.

S’il fournit à la puissante Afrique du Sud l’essentiel de son eau, le Lesotho reste un des pays les plus pauvres du continent, largement dépendant de l’agriculture et de l’élevage. Près du quart de sa population est en outre touchée par le sida.

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