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L’anguille, en détresse, désignée poisson de l’année 2018

L'anguille - ici un spécimen du zoo de Zurich - est le poisson de l'année 2018. Elle est menacée d'extinction (archives). KEYSTONE/EDDY RISCH sda-ats

(Keystone-ATS) L’anguille est plus ancienne que les êtres humains, mais elle est menacée d’extinction. Pour secouer l’opinion face à cette menace, la Fédération suisse de pêche (FSP) l’a désignée “Poisson de l’année 2018”, a-t-elle indiqué mardi.

L’anguille ne sera sauvée que si on libère ses anciennes voies de migration et qu’on protège ses populations, écrit la FSP. Jusqu’à l’ère industrielle, les anguilles comptaient parmi les poissons les plus courants de Suisse. Par la suite, le Rhin, le Rhône et le Ticino subirent un aménagement massif pour l’utilisation de la force hydraulique, ce qui signa la fin de l’essor de l’anguille.

Si on en trouve encore en Suisse, c’est uniquement à la suite de mesures de repeuplement. L’anguille figure sur la liste rouge des espèces menacées. Afin d’éviter sa disparition, la FSP réclame des fleuves sans entraves. Les centrales hydroélectriques infranchissables peuvent notamment empêcher leur migration vitale.

“Citoyenne du monde”

Déjà au temps des dinosaures, il y a plus de 100 millions d’années, les premiers anguillidés (Anguilliformes) ondulaient au-dessus du fond des mers. En termes de facultés d’adaptation, l’anguille est une “citoyenne du monde”. On trouve encore aujourd’hui cette espèce dans presque toutes les eaux du globe – de la mer jusqu’aux ruisseaux alpins.

La reproduction et la migration de l’anguille sont aventureuses et pleines de mystères. Des 15 familles comptant environ 800 espèces, plusieurs restent dans les eaux côtières, d’autres migrent à l’intérieur des terres en traversant fleuves, rivières et ruisseaux parfois sur plus de 1000 kilomètres.

Aucun homme n’a encore pu observer son accouplement ou l’éclosion de sa descendance. Une intense recherche d’indices a mené à la mer des Sargasses où l’on a trouvé les plus petites larves d’anguilles. Ces dernières doivent donc aussi éclore dans le secteur et de là, grâce à leur forme en feuille de saule, elles sont acheminées passivement par le Gulf Stream en direction de l’Europe durant deux à trois ans.

Migratrices au long cours

Les anguilles suisses faisaient partie de ces migrateurs au long cours. A l’époque où la migration piscicole n’était pas entravée, elles rejoignaient la Suisse entre la quatrième et la sixième année de leur vie. Là où elles trouvent un territoire accueillant, elles se fixent et mangent pour se constituer des réserves en vue de leur migration de retour à travers les mers vers leur zone de frai.

Cette période peut parfois durer jusqu’à vingt ans. Lorsque l’heure du voyage nuptial arrive, son corps se transforme en anguille argentée et elle entame son long chemin de retour, qui peut aller jusqu’à 6000 kilomètres, vers la mer des Sargasses, son lieu de naissance. Depuis 2007 la capture d’anguilles est fortement limitée ou interdite dans l’espace de l’Union européenne (UE).

Quotas annuels

La civelle est l’alevin de l’anguille européenne, classée vulnérable par l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN). Sa pêche, très réglementée, nécessite une licence spécifique et est soumise à des quotas définis annuellement, aux fins de consommation ou de repeuplement.

Sa vente hors de l’UE est interdite, mais une très forte demande existe en Asie. Le prix de la civelle peut atteindre 200 euros (234 francs) le kilo à la sortie de l’eau, jusqu’à 600 euros le kilo en bout de chaîne.

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