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La plus ancienne baleine à fanons découverte au Pérou

Reconstitution artistique de Mystacodon selenensis. Alberto Gennari/Institut royal des Sciences naturelles de Belgique sda-ats

(Keystone-ATS) Des paléontologues ont découvert au Pérou la plus ancienne baleine à fanons (mysticète) connue à ce jour. Le fossile vieux de 36,4 millions d’années constitue un chaînon manquant dans l’évolution des baleines, rapportent les chercheurs dans la revue Current Biology.

Exhumé dans le bassin de Pisco, au sud du Pérou, il fait environ quatre mètres de long et témoigne du fait que les ancêtres des baleines à fanons modernes se nourrissaient, au moins en partie, par aspiration. Et cela bien avant que leurs dents ne soient remplacées par des fanons, d’où son nom de Mystacodon (mysticète denté).

“Cette découverte remplit un vide important dans l’histoire du groupe. Et elle fournit des indices sur le mode de vie des premiers mysticètes”, explique Olivier Lambert, de l’Institut royal des Sciences naturelles de Belgique, co-auteur de l’étude.

Mystacodon avait encore des dents, comme les basilosauridés, un groupe de baleines éteintes à la gueule faite pour mordre et découper, et qui chassaient probablement leurs proies d’une façon proche des orques modernes.

Alimentation par aspiration

“Or, d’après nos observations, son crâne montre certaines adaptations à une alimentation par aspiration. Mystacodon représente donc une étape intermédiaire entre les ancêtres basilosauridés et les mysticètes modernes”, note le spécialiste. Par ailleurs, l’abrasion des dents du spécimen découvert confirme cette hypothèse.

Les mysticètes modernes, comme la baleine bleue et la baleine à bosse, ont la mâchoire supérieure pourvue de longues plaques de kératine prolongées par des poils. Ces fanons leur permettent de retenir de grandes quantités de proies – de petits animaux marins tels que des crevettes et de petits poissons – dans la gueule.

Les analyses montrent en outre que les membres postérieurs des baleines se seraient résorbés plus récemment que ce qui avait été estimé jusqu’alors, indique l’institut belge dans un communiqué. Des scientifiques français, italiens et péruviens ont également participé à ces travaux.

Au mauvais endroit

“Pendant longtemps, notre compréhension de l’évolution des baleines a été entravée par le fait que la plupart des paléontologues cherchaient des fossiles dans des zones relativement proches, en Europe et en Amérique du Nord. Cependant, les étapes clés de l’évolution des baleines se sont produites du côté de l’Inde, du Pakistan, du Pérou et même de l’Antarctique”, souligne encore le Belge.

“Les fouilles dans ces régions ont permis la découverte de fossiles permettant une compréhension bien meilleure de l’origine et d’autres étapes critiques de l’histoire des cétacés”, selon lui. Les scientifiques doivent encore étudier la structure interne des os, et notamment leur densité, pour déterminer si Mystacodon était adapté à une vie à proximité du fond.

Une structure des os plus compacte confirmerait en effet un tel mode de vie, un squelette plus lourd permettant à la baleine de rester à proximité du fond en faisant moins d’efforts.

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