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La question de la libre circulation pourrait enfin avancer

(Keystone-ATS) Après deux années d’indécision, la question de la libre circulation avec l’UE semble bouger. Le Conseil fédéral pourrait présenter vendredi les grandes lignes de l’application de l’initiative “contre l’immigration de masse”. Et Bruxelles semble aussi prêt à bouger.

“Il est possible qu’au niveau technique, nous trouvions une solution convenable”, a confié lundi à Bruxelles Mina Andreeva, la porte-parole du président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker. Dans la diplomatie, où chaque syllabe est pesée, cette déclaration peut laisser croire à une percée.

Jusqu’à présent, l’UE campait sur sa position officielle, répétant que la libre circulation des personnes n’était “pas négociable”. Et Berne n’était plus autorisée qu’à participer à des consultations: pas de discussion officielles, pas de négociations.

Au vu du désintérêt appuyé de Bruxelles pour les problèmes de politique intérieure de la Suisse, la porte-parole a également surpris en déclarant que la Commission “a investi beaucoup de temps et d’énergie afin de trouver une solution”.

Pas encore au but

“Mais nous ne sommes pas encore au but”, a souligné Mina Andreeva. Toute solution doit être approuvée par les Etats membres, “et nous y travaillons en ce moment”. La porte-parole contredisait en ceci des informations de la NZZ am Sonntag selon lesquelles la Commission recherche une solution que les Etats membre n’auraient pas besoin de valider.

D’après le journal dominical alémanique, les négociateurs suisses et européens travaillent sur un mécanisme qui s’appuie lui-même sur l’accord de libre circulation. Cette disposition prévoit que le comité mixte peut décider de “mesures correctives” en cas de problèmes économiques ou sociaux. La Suisse pourrait, sur cette base, limiter l’immigration sans porter atteinte à l’accord.

Dans le cas où aucun arrangement ne pourrait être trouvé, le Conseil fédéral envisage d’introduire unilatéralement une clause de sauvegarde, affirme la NZZ am Sonntag. La libre circulation des personnes fonctionnerait jusqu’à un plafond, mais, au-delà, des contingents s’appliqueraient. Cette deuxième solution serait privilégiée par le gouvernement.

Surprise des Vingt-huit

La réaction de l’UE demeure toutefois incertaine. D’après une source au sein de la Commission européenne, certains Etats membres ont fait part de leur surprise mardi lors d’une réunion d’un groupe de travail AELE face aux informations en provenance de Suisse. Le Service européen d’action extérieure leur avait en effet indiqué qu’il n’y avait aucune négociation entre l’UE et la Suisse, mais seulement des discussions informelles.

La porte-parole de l’UE a refusé de commenter les articles de presse. Il est toutefois certain que des mesures unilatérales bloqueraient les liens institutionnels de la Suisse avec l’UE. La conclusion d’un accord-cadre serait difficilement imaginable dans ces circonstances, ce qui bloquerait d’autres accords d’accès au marché unique européen.

Volte-face du Conseil fédéral

En agissant de la sorte, le Conseil fédéral ferait une volte-face radicale. Lors des consultations, il avait en effet indiqué que la mise en oeuvre de son concept ne devait pas s’opposer à la libre circulation des personnes: des contingents pour les citoyens de l’UE ne devaient être introduits que si un accord était trouvé avec Bruxelles.

En outre, les deux partenaires vont devoir intensifier les négociations ces prochains temps. Jean-Claude Juncker et la présidente de la Confédération Simonetta Sommaruga ont eu des contacts réguliers ces dernières semaines, a relevé la porte-parole. Ils doivent s’entretenir encore une fois avant la fin de l’année, mais des discussions bilatérales ne sont pas prévues, selon elle.

Le Conseil fédéral se retrouve pressé par le temps. Le Parlement fédéral et lui ont trois ans pour mettre en oeuvre l’article constitutionnel sur l’immigration, soit jusqu’en février 2017. Le gouvernement doit ensuite adopter un arrêter fédéral visant à contrôler l’immigration.

L’article exige aussi l’instauration préférence nationale pour les Suisses sur le marché du travail. Aucune décision ne semble se dessiner sur ce point.

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