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Le bombardement de l’hôpital de MSF, une “erreur tragique”

(Keystone-ATS) Le bombardement d’un hôpital de Médecins sans frontières (MSF) à Kunduz en octobre est une “erreur tragique”, conclut une enquête menée par les Etats-Unis. Le bâtiment aurait été confondu avec une autre cible. Pour MSF, ce rapport est plutôt un “catalogue d’erreurs”.

“L’effarant catalogue d’erreurs mises en lumière aujourd’hui (mercredi) démontre la négligence grossière des troupes américaines ainsi que leurs violations des règles de la guerre”, a estimé le directeur général de l’organisation non gouvernementale, Christopher Stokes.

Survenu le 3 octobre, le bombardement de l’armée américaine, qui appuyait alors l’armée afghane dans sa reprise de Kunduz, avait tué 22 personnes dont 12 membres de l’ONG.

“C’est une erreur tragique. Jamais les forces américaines n’auraient intentionnellement visé un hôpital ou toute autre installation protégée”, a déclaré lors d’une conférence de presse le général John Campbell, commandant des forces américaines et de l’Otan en Afghanistan (Isaf).

Responsables suspendus

Les activités des personnes les plus étroitement liées à cet incident ont été suspendues, a dit John Campbell. Il a indiqué que des sanctions seraient prises, ajoutant que certaines règles d’engagement n’avaient pas été respectées.

Selon l’enquête américaine, à la suite d’une panne électronique notamment, les membres de l’équipage ont été privés d’outils de navigation précis et de communication pendant le raid, qui devait viser initialement un bâtiment des services de renseignement afghans conquis par les talibans.

Troupes “épuisées”

Le général a souligné “l’épuisement” des troupes américaines, engagées depuis cinq jours dans de féroces combats contre les talibans à Kunduz, grande ville du nord qu’ils avaient conquise.

L’armée américaine a par ailleurs confirmé que MSF l’avait contactée 12 minutes après le début de la frappe pour la prévenir qu’elle était attaquée.

Le général Wilson Shoffner, responsable adjoint de la communication de l’Isaf, a dit que les bombardements avaient cessé avant que l’armée américaine ne réalise son erreur.

Tollé international

Le long bombardement des forces spéciales américaines avait déclenché un tollé international.

Le président afghan Ashraf Ghani a estimé mercredi après les annonces américaines que le raid contre MSF était “une douloureuse illustration du prix de la guerre”, le qualifiant d'”erreur qui doit être évitée”.

Depuis le 3 octobre, la direction de MSF réfute quant à elle catégoriquement le terme d'”erreur”. Sa présidente Joanne Liu va même jusqu’à évoquer des “soupçons de crime de guerre” et exige une enquête internationale indépendante.

Talibans soignés

MSF a récemment admis qu’une “vingtaine de talibans” étaient traités dans son hôpital. L’ONG souligne que ses équipes avaient transmis les coordonnées GPS de l’hôpital aux armées afghane et américaine avant le raid.

Elle avait en outre prévenu les états-majors dès que les premières bombes sont tombées, ce qui n’a pas empêché le bombardement de se poursuivre pendant près d’une heure.

Outre l’enquête du Pentagone, les faits font l’objet de deux autres investigations: une de l’Otan et une des forces afghanes.

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