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Le Conseil des Etats serre la vis aux entreprises

En vue de limiter l'immigration, les employeurs devraient être obligés de se tourner vers les chômeurs inscrits dans les offices régionaux de placement avant de recruter à l'étranger. Le Conseil des Etats a choisi le modèle proposé par l'ex-président du PLR Philipp Müller, à gauche sur la photo. KEYSTONE/ANTHONY ANEX sda-ats

(Keystone-ATS) Les patrons souhaitant recruter à l’étranger devront parfois convoquer d’abord des chômeurs de Suisse et justifier leur éventuel refus. Le Conseil des Etats a décidé jeudi de leur serrer la vis pour appliquer l’initiative contre l’immigration de masse.

Comme le National, il a été guidé par le souci de sauvegarder les relations bilatérales avec l’UE. Pas question de contingenter l’immense majorité des permis de séjour, y compris pour les Européens, comme l’avait proposé le gouvernement faute de mieux.

Les mesures doivent être compatibles avec l’accord sur la libre circulation des personnes afin que le Conseil fédéral puisse ratifier l’extension de l’accord à la Croatie et la Suisse être pleinement réintégrée à l’accord européen sur la recherche Horizon 2020, a rappelé Beat Vonlanthen (PDC/FR).

Le Conseil fédéral a proposé une application conséquente de l’initiative, mais il aurait préféré trouver un accord avec l’UE. La votation du Brexit a porté un “coup de poignard” à ses efforts, a relevé la ministre de justice et police Simonetta Sommaruga. Le gouvernement doit faire preuve de courage et de réalisme, il retire sa proposition, a-t-elle annoncé.

Seule l’UDC et son allié indépendant Thomas Minder ont voté en faveur d’une application stricte de l’initiative ne faisant pas la différence entre l’immigration de l’UE et des pays tiers. La constitution exige une gestion autonome de l’immigration de même que des contingents et des plafonds annuels, a fait valoir Peter Föhn (UDC/SZ). Elle prime sur un accord international.

Aider les chômeurs

Le Conseil des Etats a préféré suivre sa commission préparatoire comme l’y invitait Mme Sommaruga. Certains employeurs devraient être obligés non seulement d’annoncer les postes vacances aux services de l’emploi, mais encore de convoquer des chômeurs inscrits en entretien et de justifier leur refus en cas de recrutement à l’étranger.

Seules les professions et les régions touchées par un taux de chômage supérieur à la moyenne seraient concernées. Soit au plus 1% des procédures de recrutements annuels, avait assuré dès mercredi le concepteur du modèle Philipp Müller (PLR/AG) en vantant une solution ciblée ni chère, ni bureaucratique, contrairement aux contingents.

Quelle que soit la solution retenue, la solution aura un impact sur la charge administrative des entreprises, a noté Olivier Français (PLR/VD). La voie trouvée par la commission a l’avantage de ne pas introduire de préférence indigène générale.

Application “light”

La minorité PDC n’en a pas moins dénoncé un “monstre bureaucratique” et une solution ne respectant pas du tout l’article constitutionnel. Défait par 16 voix contre 26 pour le modèle Müller, le parti a tenté de ramener les sénateurs sur la voie du National avec plusieurs aménagements.

La Chambre du peuple souhaite obliger le Conseil fédéral à prendre des mesures pour épuiser le potentiel offert par la main-d’oeuvre indigène. A partir d’un certain seuil d’immigration, il pourrait obliger les employeurs à communiquer les postes vacances aux offices régionaux de placement.

D’autres mesures seraient possibles, mais pas sans l’aval du comité mixte Suisse/UE si elles enfreignent l’accord sur la libre circulation des personnes. Un droit de veto que le PDC a tenté de faire sauter en proposant que s’il est actionné, le gouvernement soit obligé de saisir le Parlement dans les 60 jours. A ce dernier de proposer autre chose dans le respect du droit international.

La minorité voulait également que le service de l’emploi transmette une liste restreinte de chômeurs au patron, mais sans obliger forcément ce dernier à les convoquer pour un entretien et à justifier leur refus. Ce serait plus favorable à l’économie, a défendu le parti. Son concept prévoyait enfin que les cantons puissent proposer des mesures valables seulement sur leur territoire.

La gauche a soutenu la commission. La priorité à l’embauche d’un chômeur est une réponse ciblée et plus simple que celle du National. Les problèmes sur le marché du travail doivent être résolus, a expliqué Paul Rechsteiner (PS/SG). La constitution ne sera pas entièrement respectée, mais c’est une première étape, le peuple devra voter à nouveau, a ajouté Daniel Jositsch (PS/ZH).

Le débat se poursuit.

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