Des perspectives suisses en 10 langues

Le Parlement allemand renverse sa définition du viol

Le Parlement allemand a décidé qu'en matière de viol, un "non" est un "non". KEYSTONE/EPA DPA/SOPHIA KEMBOWSKI sda-ats

(Keystone-ATS) L’Allemagne a renversé jeudi sa définition du viol, jusqu’alors limitée aux situations de violence ou de menace grave. Un vote de la chambre basse du Parlement proclame le principe du “Non, c’est non”.

Tout acte sexuel commis “contre la volonté identifiable d’une autre personne” devient une infraction pénale, allant de l’agression au viol selon qu’il y ait pénétration ou non, a décidé le Bundestag à l’unanimité des 601 votants.

L’expression de ce refus peut être “explicite”, c’est-à-dire verbale, ou “implicite”, par des larmes ou la tentative de repousser physiquement l’agresseur, précise le texte. Le projet a été discuté pendant deux heures, devant la chancelière Angela Merkel, et salué par une ovation debout.

Ce projet de loi doit encore être soumis cet automne à l’approbation de la chambre haute. Il constitue “un important changement de paradigme” en Allemagne, s’est félicitée la BFF, un organisme de soutien aux femmes victimes de violences.

Projet réécrit

Après des années d’un débat tumultueux, ravivé par les agressions sexuelles du Nouvel An à Cologne (ouest), les députés ont entièrement réécrit le projet présenté mi-mars par le ministre de la Justice, Heiko Maas.

L’actuel article 177 du Code pénal, qui remonte à 1998, cantonne le viol aux relations sexuelles obtenues “par la violence, par une menace portant sur la vie ou l’intégrité corporelle”, ou lorsque la victime se trouve “privée de toute défense”.

Ce texte, qui exclut les rapports imposés sous la menace de représailles professionnelles ou lorsque la victime est ivre, inconsciente ou tétanisée, est depuis longtemps critiqué pour son caractère restrictif.

La BFF avait documenté en 2014, dans un rapport qui avait fait grand bruit, 107 cas d’agressions échappant aux poursuites. Un arrêt controversé de la Cour fédérale, en 2012, avait refusé de sanctionner un viol conjugal au motif que la victime aurait pu “appeler les voisins” et n’était donc pas “privée de toute défense”.

Prudence balayée

Dans son projet initial, le gouvernement ajoutait un nouveau cas “d’abus sexuel”, couvrant les relations avec une personne “incapable de résistance” en raison “de son état physique ou psychique” ou de la “surprise”.

Mais cette voie prudente a été balayée par un double mouvement: l’émotion née des centaines d’agressions sexuelles à Cologne, qui n’ont encore abouti à aucune condamnation, et le procès pour “dénonciation calomnieuse” d’une mannequin qui avait porté plainte pour viol.

SWI swissinfo.ch - succursale de la Société suisse de radiodiffusion et télévision

SWI swissinfo.ch - succursale de la Société suisse de radiodiffusion et télévision