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Le président du Guatemala accusé de diriger un réseau de corruption

(Keystone-ATS) Le scandale de corruption qui secoue le Guatemala depuis des mois a atteint vendredi la tête de l’Etat. Le président Otto Pérez Molina a été mis en accusation par le parquet. En outre, l’ex-vice-présidente a été arrêtée.

A deux semaines du scrutin présidentiel du 6 septembre, auquel M. Pérez ne se représente pas, la justice a marqué un grand coup en quelques heures. Elle a arrêté l’ancienne vice-présidente Roxana Baldetti, puis accusé le président de diriger le réseau de corruption découvert au sein des douanes.

“Nous trouvons dans toute l’organisation et l’organigramme (de ce réseau, Ndlr.) la participation très regrettable du président de la République et de Roxana Baldetti”, a affirmé Ivan Velasquez. Ce dernier préside la Commission internationale contre l’impunité au Guatemala (Cicig).

Ecoutes téléphoniques

M. Velasquez s’exprimait lors d’une conférence de presse conjointe avec le parquet, qui a confirmé ces accusations et avec qui une procédure a été lancée pour que le président comparaisse devant la justice. Selon lui, les 86’000 écoutes téléphoniques réalisées dans le cadre de l’enquête, démarrée en mai 2014, incluaient des références au “numéro un” et à “la numéro deux”.

“Si aujourd’hui nous disons que ‘le numéro un’ correspond au président et ‘la numéro deux’ à la vice-présidente, c’est parce que nous avons des éléments pour le prouver. Au-delà des conversations” enregistrées, a assuré M. Velasquez.

Réaction du président

Le président conservateur a réagi peu après. Il a promis de “faire face” à ces accusations, sans plus de détails, devant des journalistes l’accompagnant dans une opération de distribution d’aliments à des habitants touchés par la sécheresse.

En atteignant le sommet de l’Etat, l’enquête ne devrait que renforcer l’écoeurement des Guatémaltèques. Ils ont été des milliers à descendre dans les rues ces derniers mois pour réclamer la démission du président.

Des pots-de-vin

Le scandale a éclaté au grand jour le 16 avril avec le placement en détention du directeur des impôts et de nombreux autres fonctionnaires. Ils sont accusés d’avoir touché des pots-de-vin pour exonérer des importateurs de frais de douane.

L’enquête désignait au départ Juan Carlos Monzon comme étant la tête du réseau. Cet ancien secrétaire privé de la vice-présidente a pris la fuite.

Général à la retraite

Un mois plus tard, les présidents de la Banque centrale, Julio Suarez, et de la Sécurité sociale, Juan de Dios Rodriguez, ami intime du président Pérez, étaient arrêtés. Ils seraient impliqués dans l’attribution suspecte d’un contrat d’achat de médicaments.

Otto Pérez Molina, un général à la retraite de 64 ans au pouvoir depuis 2012 et dont le mandat court jusqu’au 14 janvier 2016, était déjà dans le viseur de la justice depuis plusieurs mois. Une requête pour lever son immunité a été rejetée mi-août par les députés.

Corruption passive

Ces dures accusations à son encontre surviennent quelques heures après l’arrestation de l’ancienne vice-présidente, qui avait démissionné mi-mai. Mme Baldetti, 53 ans, est poursuivie pour association de malfaiteurs, fraude et corruption passive.

Malgré le ras le bol populaire, le candidat favori pour l’élection est Manuel Baldizon, du parti Liberté démocratique (droite). Son partenaire pour la vice-présidence est l’ex-patron de la Banque centrale Edgar Barquin, visé par une enquête pour blanchiment d’argent.

Violence et pauvreté

La Cicig dénonçait récemment le financement de candidats par des organisations criminelles et des trafiquants de drogue. Le pays a connu la guerre civile de 1960 à 1996. Il est actuellement éprouvé par une violence et une pauvreté record.

Mais le Guatemala n’est pas le seul pays d’Amérique centrale à souffrir de la corruption. Des scandales similaires touchent le parti du président du Honduras Juan Orlando Hernandez, l’ex-président du Salvador Francisco Flores et celui du Panama, le milliardaire Ricardo Martinelli.

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