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Le Sénat vote à son tour la prolongation de l’état d’urgence

L'Assemblée nationale a observé une minute de silence en mémoire de l'attentat de Nice qui, entre autres, a motivé la décision du Sénat. Celui-ci a adopté un projet de loi prorogeant l'état d'urgence. KEYSTONE/EPA/JEREMY LEMPIN sda-ats

(Keystone-ATS) Le Sénat a adopté par 310 voix contre 26 mercredi soir, après l’avoir durci, le projet de loi prorogeant l’état d’urgence pour une durée de six mois, jusqu’en janvier 2017. L’Assemblée nationale avait voté quelques heures plus tôt à une très large majorité.

Le Sénat, où la droite est majoritaire, ayant modifié le texte de l’Assemblée, une commission mixte paritaire (CMP) Assemblée-Sénat a été convoquée pour mercredi soir.

Selon plusieurs sources parlementaires, un accord devrait être conclu et le texte mis au point par la CMP serait entériné jeudi en séance publique par l’Assemblée et le Sénat. Le projet de loi sera alors définitivement adopté.

En cas d’échec de la CMP, une nouvelle lecture aura lieu dans chacune des assemblées avant que l’Assemblée, qui a constitutionnellement le dernier mot, procède – jeudi ou vendredi – à une lecture définitive.

Après Nice

L’exécutif a souhaité que le texte autorise à nouveau les perquisitions administratives et permette l’exploitation des données trouvées dans tout système informatique ou de communication saisi dans ce cadre, ce qu’avait demandé le parti d’opposition Les Républicains.

En outre, si une perquisition révèle l’existence d’un autre lieu fréquenté par la personne visée, un droit de suite permettra de le perquisitionner dans la foulée.

Après l’attaque qui a fait 84 morts à Nice le 14 juillet, le président François Hollande a décidé de finalement proroger pour la quatrième fois l’état d’urgence. Proposant une prolongation de trois mois, l’exécutif a consenti à la demande des Républicains de le faire pour six mois, jusqu’au 26 janvier 2017.

Appel citoyen

“J’appelle les Français à prendre contact avec les associations de protection civile (…), à suivre des formations aux premiers secours et aux gestes qui sauvent”, car “nous devons être des concitoyens capables d’intervenir et de sauver”, a déclaré mercredi M. Hollande.

Lors d’une visite dans un centre de formation de la gendarmerie, il a appelé les Français à rejoindre les différentes réserves des forces de sécurité. Avec tous ces réservistes “une garde nationale se constitue” en France, a-t-il jugé.

Quinze mille réservistes opérationnels de gendarmerie et de police seront disponibles “d’ici la fin du mois”, contre 12’000 actuellement, pour “assurer la sécurité des différents événements de l’été”. La Défense va “mobiliser les 28’000 titulaires d’un contrat d’engagement pour qu’ils se tiennent prêts pour les prochaines semaines”, a-t-il précisé.

Unité indispensable

Les groupes PS et radicaux de gauche ont voté pour le projet de loi, de même que celui des Républicains, à quelques exceptions près, et de l’UDI qui ont réclamé un “durcissement”. Les Républicains avaient fait lundi dix propositions en ce sens.

Seuls le groupe Front de gauche et quelques députés écologistes ont, comme les fois précédentes, voté contre le projet qu’ils jugent au mieux inefficace, au pire comme une atteinte aux droits fondamentaux.

Le Syndicat de la magistrature a une fois de plus dénoncé ce régime d’exception.

Le défenseur des droits Jacques Toubon a réitéré dans un communiqué ses réserves sur cet “‘état d’exception permanent’, de nature à fragiliser l’Etat de droit et l’exercice des libertés fondamentales”.

M. Hollande a estimé mercredi qu'”après un tel drame, la colère est légitime (…) mais elle ne peut dégénérer dans la haine et la suspicion” et que “le débat lui aussi est nécessaire (…) mais il ne peut pas atteindre l’unité indispensable ni abîmer la cohésion nécessaire”.

Pas de législation d’exception

Tout en soulignant que la France devait s’attendre à d'”autres attentats” et d'”autres innocents tués”, le gouvernement s’est cependant refusé à adopter des mesures sécuritaires supplémentaires voulues par l’opposition de droite. Celle-ci a notamment réclamé la création de centres de rétention à titre préventif pour les personnes soupçonnées de radicalisation islamiste.

Pas question d’instaurer en France “une “législation d’exception” car le pays doit rester un Etat de droit, a rétorqué le Premier ministre, Manuel Valls.

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