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Le sort du pin des Alpes entre les pattes du casse-noix moucheté

Le casse-noix moucheté ne transporte pas assez de graines de l'arole en altitude. Eike Lena Neuschluz sda-ats

(Keystone-ATS) L’arole, qui marque la limite alpine des arbres, dépend plus du casse-noix moucheté que du climat pour progresser vers les hauteurs. Le pin des Alpes, capital contre les dangers naturels, ne s’adaptera donc pas au réchauffement climatique, craignent les scientifiques.

Sous l’influence du réchauffement climatique, de nombreuses espèces montagnardes de plantes et d’animaux colonisent des régions plus fraîches et des altitudes supérieures. Mais la progression vers les hauteurs ne dépend pas seulement du climat, comme l’ont découvert des scientifiques de l’Institut Senckenberg et de l’Institut fédéral de recherches sur la forêt WSL.

Dans le cas de l’arole, la réalité est par exemple plus compliquée. Ce sont bien davantage les interactions écologiques qui déterminent où s’installent les jeunes pousses, et donc jusqu’à quelle altitude la limite alpine des arbres sera repoussée à l’avenir, indiquent les chercheurs dans un communiqué publié lundi.

“Le climat n’est qu’un cadre pour l’établissement de l’arole. La progression de cette espèce par dissémination de graines vers des régions plus élevées dépend avant tout des interactions avec d’autres plantes et des animaux, notamment le casse-noix moucheté”, explique la chercheuse Eike Lena Neuschulz, de l’Institut Senckenberg, citée dans le communiqué.

Transporteur

Pour atteindre des altitudes plus élevées, les graines d’arole, qui ne sont pas transportées par le vent et sont difficiles d’accès, ont besoin d’un transporteur. Mais le casse-noix moucheté, qui se nourrit presque exclusivement de ces graines, reste fidèle à la limite actuelle des arbres et ne transporte que peu de graines vers des altitudes supérieures.

C’est ce qui ressort des études scientifiques réalisées entre 1850 et 2250 mètres dans deux vallées à proximité de Davos, précisent les chercheurs. L’équipe y a documenté le rajeunissement des aroles et leur germination pendant trois ans. Les facteurs climatiques comme la température moyenne et l’humidité du sol sont moins importants lors des premières années de croissance, ont-ils notamment découvert.

Menace

Selon l’étude, certaines essences, dont l’arole, ne pourront pas s’adapter aux futures modifications climatiques de leur environnement. “Si le climat se réchauffe, et que la concurrence avec des essences en provenance d’altitudes moins élevées continue, les interactions écologiques complexes devraient être bouleversées. La forêt d’aroles pourrait alors être menacée”, analyse Felix Gugerli, du WSL.

“Ce serait un véritable problème, car cette forêt est un environnement de haute montagne important dans les Alpes. Sa diversité écologique est élevée, et elle contribue à la protection contre les dangers naturels”, selon Eike Lena Neuschulz. Ces travaux sont publiés dans le Journal of Ecology.

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