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Les questions de procédure dominent le procès des Tigres tamouls

Le procès des Tigres tamouls a repris mardi matin devant le Tribunal pénal fédéral ä Bellinzone. KEYSTONE/TI-PRESS/ALESSANDRO CRINARI sda-ats

(Keystone-ATS) Le procès des Tigres tamouls a repris mardi devant le Tribunal pénal fédéral. Les avocats de la défense ont produit de nouveaux arguments visant au renvoi de l’acte d’accusation au Ministère public de la Confédération.

Défenseur du gérant d’une société de transfert de fonds, Me Ludovic Tirelli a parlé de “tromperies” des autorités. Evoquant l’arrestation de son client lors d’un contrôle par la police vaudoise à la frontière qui avait abouti à la découverte de 120’000 euros dans sa voiture, l’avocat s’est étonné de la rapidité du Ministère public de la Confédération (MPC) qui a ordonné une perquisition le jour même.

Comme d’autres confrères, Me Tirelli a aussi dénoncé l’audition de son client “pour établir sa situation”, alors que la Sûreté vaudoise le qualifiait de “suspect” dans son procès-verbal. “Il aurait dû être d’emblée considéré comme prévenu”, a martelé l’avocat. Ce faisant, l’accusation aurait violé les droits de la défense.

Me Tirelli a rappelé que son client, qui se rendait régulièrement au Sri Lanka dans le cadre de son activité, y avait été arrêté après l’ouverture de l’enquête en Suisse. Détenu durant trois ans, il a été maltraité avant d’être acquitté par la justice de son pays. Ce jugement exclurait d’ailleurs un nouveau procès en Suisse pour les mêmes faits.

Pas d’enquête secrète

La procureure fédérale Juliette Noto a démenti les sous-entendus de la défense évoquant un complot des Etats européens visant à abattre les organisations soutenant les Tigres tamouls.

Elle a admis que celles-ci aient pu être évoquées au cours de réunions des autorités de poursuite. “Mais tout élément communiqué lors de telles séances doit être ensuite transmis par commission rogatoire. Il n’y a pas d’enquête secrète ni de dossier parallèle, pas de mensonge ni de tromperie.”

Me Philippe Graf a dénoncé l’absence de la Bank-Now sur le banc des accusés. Cet institut avait accordé en effet de nombreux petits crédits à des réfugiés tamouls.

La banque n’aurait, selon le défenseur du responsable présumé des collectes de fonds en Suisse, pas fait preuve de la diligence requise malgré les soupçons qu’elle pouvait nourrir quant à l’utilisation des crédits. Pour mémoire, la Bank-Now figure parmi les plaignants, alors qu’un de ses anciens collaborateurs répond d’escroquerie et faux dans les titres.

Inculpation tardive

Me Pascal de Preux s’est étonné, quant à lui, que son client ait été entendu comme prévenu en 2014, plus de quatre ans après le dépôt d’une plainte et après sept heures d’audition. Même si ce collecteur de fonds présumé aurait pu être assisté, les droits de la défense ont été violés, estime l’avocat. Qui demande le retraît de ces procès-verbaux du dossier d’accusation.

La procureure a indiqué que la plainte pénale qui avait conduit aux premières convocations en 2010 n’était pas fondée et qu’elle avait été classée. L’inculpation en 2014 se fondait sur d’autres faits.

En ouverture d’audience, Mme Noto a conclu au rejet des moyens présentés la veille par Me Jean-Pierre Garbade. Regrettant que cette intervention de trois heures portât autant sur le fond de l’accusation que sur des questions préjudicielles, elle a dénoncé une volonté d’influencer la cour.

Pour Mme Noto, les affirmations de l’avocat sur le rôle du procureur Patrick Lamon lors de l’enquête sont “clairement diffamatoires”. Et la prétendue machination ourdie par ce magistrat laissant à penser que la Bank-Now était impliquée dans des crédits liés à un trafic de drogue n’est autre qu’une “invention malhonnête”.

Les défenseurs se sont aussi émus de l’absence de traduction de nombreuses auditions, pièces et documents. Les prévenus auraient ainsi été privés du droit à une procédure équitable.

Les débats reprendront lundi. A cette occasion, la présidente du Tribunal pénal fédéral (TPF) Nathalie Zufferey Francioli communiquera sa décision sur les demandes de renvoi de la défense.

Douze Tamouls et un Allemand comparaissent depuis lundi devant le TPF pour avoir participé, à des titres divers, au financement de la guérilla des Tigres tamouls jusqu’en 2009. Les chefs d’accusation sont le soutien à une organisation criminelle, l’escroquerie et le faux dans les titres.

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