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Nombreuses manifestations et interpellations en Russie

La police a appréhendé plus de 1500 manifestants en Russie. KEYSTONE/EPA/YURI KOCHETKOV sda-ats

(Keystone-ATS) Plusieurs milliers de personnes ont manifesté lundi à Moscou et dans d’autres villes de Russie pour dénoncer la corruption du régime du président Vladimir Poutine. Plus de 1500 protestataires, dont le plus farouche opposant au Kremlin, Alexeï Navalny, ont été arrêtés.

Aux cris de “La Russie sans Poutine” et “La Russie sera libre”, des milliers de personnes (4500 selon la police) ont afflué à la rue Tverskaïa, qui mène à la place Rouge et au Kremlin, submergeant les promeneurs venus assister à des reconstitutions médiévales en costumes à l’occasion de ce jour férié à Moscou. Des mouvements de contestation similaires ont été signalés dans quelque 180 villes du pays.

D’après l’ONG OVD-Info, plus de 1500 manifestants ont été interpellés par la police. Dans la capitale russe, 823 personnes ont été arrêtées. A Saint-Pétersbourg, ce chiffre, encore provisoire, est estimé à 600 “et peut encore augmenter”. Un porte-parole d’OVD-Info a fait état également de plus d’une centaine d’interpellations dans d’autres villes de province.

30 jours pour Navalny

Alexeï Navalny, qui tente de mobiliser l’opinion publique russe à un an de l’élection présidentielle qui devrait voir Vladimir Poutine briguer un nouveau mandat de six ans, avait appelé dimanche soir ses partisans à manifester.

L’opposant n’a pas pu, lui-même, se mêler au rassemblement moscovite. La police l’a interpellé à la sortie de son immeuble alors qu’il se rendait au rassemblement.

Dans la soirée, un tribunal moscovite l’a condamné à 30 jours de prison pour infractions répétées à la législation encadrant les manifestations publiques. “Non seulement ils ont volé tout le pays, mais en plus à cause d’eux, je vais manquer le concert de Depeche Mode à Moscou” prévu début juillet, a ironisé le blogueur anticorruption de 41 ans sur son compte Twitter, après s’être vu infliger la peine maximale encourue.

Dans un premier temps, les autorités russes avaient autorisé un défilé à l’écart du centre-ville, mais des pressions ont été exercées par le pouvoir sur des sociétés locales, qui ont refusé de fournir aux organisateurs microphones et équipements vidéo.

Condamnations

Face à ces restrictions, Alexeï Navalny a choisi de modifier le lieu de la manifestation et appelé à un rassemblement rue Tverskaïa, en dépit des mises en garde du ministère public qui a prévenu que “toutes les mesures nécessaires” seraient prises pour prévenir des désordres.

A Moscou comme en province, les forces anti-émeutes ont répondu avec fermeté, dispersant la foule parfois à coups de matraque et embarquant les manifestants par cars entiers.

Les Etats-Unis ont condamné “avec force” ces interpellations et réclamé la “libération immédiate” des manifestants. “Les Russes méritent un gouvernement qui soutienne (…) la possibilité d’exercer leurs droits sans crainte ou représailles”, a déclaré le porte-parole de la Maison-Blanche Sean Spicer.

Le président du Parlement européen Antonio Tajani a lui fait part de “son inquiétude”, alors que l’ONG Amnesty International a dénoncé des “scènes alarmantes” d’interpellations et violences envers les manifestants.

Poutine défié

Après des manifestations d’une ampleur inattendue le 26 mars, cette nouvelle mobilisation défie directement Vladimir Poutine en plein centre de la capitale à neuf mois de la présidentielle lors de laquelle il devrait briguer un quatrième mandat. Elle intervient alors que le chef de l’Etat doit tenir jeudi son émission annuelle de questions-réponses avec les Russes.

Alexeï Navalny, dont les films enquêtes sur la corruption des alliés du président sont partagés massivement sur les réseaux sociaux, avait déjà passé 15 jours en détention après avoir été interpellé, comme un millier de ses partisans, lors de rassemblements similaires le 26 mars.

Outre son ampleur inédite depuis plusieurs années, le mouvement avait surpris par la présence très nombreuse d’étudiants voire de lycées, de nouveau très visibles lundi malgré les pressions exercées, selon l’opposant, par les universités ou les écoles pour les dissuader.

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