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Plus de délai pour échanger ses billets de mille francs à fourmis

Le Parlement devra dire si les Suisses pourront encore échanger indéfiniment leurs anciens "Borromini" (archives). KEYSTONE/MARTIN RUETSCHI sda-ats

(Keystone-ATS) Les Suisses pourront encore échanger leurs anciennes coupures de mille francs à fourmis. Le Conseil fédéral a remis mercredi au Parlement un projet visant à supprimer le délai d’échange des billets de banque. Il renonce à punir ceux qui détériorent leurs espèces.

La Banque nationale suisse (BNS) émet tous les 15 à 20 ans de nouvelles séries de billets de banque. Elle rappelle ensuite les anciennes coupures. Six mois plus tard, ces dernières ne sont plus considérées comme des moyens de paiement ayant cours légal.

Mais elles peuvent être échangées auprès de la BNS à leur valeur nominale pendant 20 ans. Ce délai a été fixé en 1921. On pensait alors que les billets qui n’étaient pas échangés étaient majoritairement perdus ou détruits. Mais les choses ont changé.

Les gens vivent non seulement plus longtemps, mais ils voyagent aussi davantage. Le franc suisse est aujourd’hui une monnaie utilisée dans le monde entier comme valeur refuge. Il y a certainement beaucoup de personnes qui ont encore au fond de leur tiroir d’anciennes coupures et qui ne savent pas qu’il y a un délai pour les échanger.

Dès la sixième série

La Suisse entend se mettre au diapason des principaux pays industrialisés et prévoir un échange sans limite dans le temps. Ce principe vaudra pour les billets émis entre 1976 et 1979 (dont le célèbre mille francs aux fourmis ou le cent francs avec le portrait de Francesco Borromini) ainsi que pour les séries suivantes.

Pas question en revanche d’échanger un billet de 20 francs à l’effigie de Guillaume-Henri Dufour. Jusqu’à la cinquième série, à laquelle appartenait cette coupure, le montant correspondant aux billets de banque non échangés était versé à un fonds couvrant les dommages non assurables causés par des forces naturelles (fondssuisse). Il ne recevra à l’avenir plus d’argent de la part de la BNS.

Catastrophes

Lors de la consultation, la suppression de ce versement a été critiquée, entre autres par le PS et le PDC. Certains cantons, comme Genève et le Valais, qui ne connaissent pas d’assurance bâtiment obligatoire, en pâtiraient. Les phénomènes extrêmes comme l’éboulement de Bondo (GR) ou les gros dégâts aux cultures dus au gel en avril risquent en outre d’augmenter.

Le gouvernement n’en démord pas: fondssuisse dispose de suffisamment de moyens pour fournir ses prestations. Doté actuellement d’un capital de 269 millions, il dépense en moyenne 3,6 millions. Les revenus de son capital devraient suffire au fonds, qui n’intervient d’ailleurs que dans les cas pour lesquels il n’est pas possible de s’assurer et selon le principe de subsidiarité.

Si les catastrophes naturelles venaient à augmenter, il est probable que les assurances proposeraient de nouveaux produits. Le prochain versement, qui aurait dû intervenir en 2020, aurait pu atteindre de 500 millions à 1 milliard de francs, ce qui dépasse largement les besoins du fonds. La tempête Lothar en 1999 et les graves inondations de 2005 ont provoqué des factures de l’ordre de respectivement 52 et 11 millions.

Criminalité

Autre critique, notamment formulée à gauche: la suppression du délai de remboursement pourrait favoriser l’utilisation de l’argent liquide à des fins criminelles. Le Conseil fédéral n’y croit pas. Les détenteurs d’anciens billets continueront de devoir les échanger auprès d’un guichet de la BNS. Comme aujourd’hui, la banque analysera l’authenticité et la provenance de coupure.

Le gouvernement a toutefois cédé sur un point pourtant critiqué par une minorité de cantons, l’UDC et l’Union suisse des paysans. Il renonce pour l’instant à profiter de l’occasion pour punir ceux qui détériorent outre mesure les pièces de monnaie et les billets de banque. Des clarifications supplémentaires sont nécessaires.

Le Conseil fédéral voulait introduire la possibilité d’une déduction sur la valeur nominale lors de l’échange. Il aurait fixé dans une ordonnance clairement les cas concernés. Cela aurait notamment pu s’appliquer en cas d’ouverture inappropriée d’une mallette de sécurité ou de détérioration intentionnelle.

Une décoloration, un pâlissement, des plis ou des déchirures étaient en revanche considérés par le gouvernement comme résultant d’une utilisation normale des billets.

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