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Syrie: Damas approuve l’accord russo-américain, opposition prudente

Soldats syriens près de l'académie militaire d'Alep (archives). KEYSTONE/EPA SYRIAN ARAB NEW AGENCY/SYRIAN ARAB NEW AGENCY / HANDO sda-ats

(Keystone-ATS) Le régime de Bachar al-Assad a approuvé samedi l’accord américano-russe destiné à raviver les négociations de paix en Syrie. L’opposition doute en revanche que ce texte permette de mettre fin aux combats, alors que les affrontements s’intensifient à Alep (nord).

“Le gouvernement syrien a approuvé l’accord russo-américain (…) dont l’un des objectifs est de parvenir à une solution politique à la crise en Syrie”, a rapporté l’agence officielle Sana, citant des “sources informées”. Selon elle, il “y aura une cessation des hostilités dans la ville d’Alep pour des raisons humanitaires”.

L’accord a été conclu par le secrétaire d’Etat américain John Kerry et son homologue russe Sergueï Lavrov à l’issue de dix heures de discussions à Genève. Il a été salué par la Turquie – qui a lancé fin août une offensive dans le nord de la Syrie contre le groupe Etat islamique (EI) et les Kurdes-, par la Grande-Bretagne, la France et la cheffe de la diplomatie européenne Federica Mogherini.

Scepticisme

De son côté, l’opposition syrienne ne cache pas son scepticisme. Les rebelles modérés de l’Armée syrienne libre (ASL) ont ainsi déclaré samedi qu’il y avait peu de chances que ce nouvel accord ait un véritable impact sur le cours du conflit.

Plusieurs responsables de mouvements membres de l’ASL ont rappelé que les derniers accords de ce genre n’ont pas été respectés. Ils ont accusé notamment Damas et Moscou d’avoir poursuivi les bombardements.

Le Haut comité syrien des négociations (HCN), créé fin 2015 en Arabie saoudite, a pour sa part indiqué qu’il ne réagirait qu’une fois que ses membres auront été consultés. Une de ses membres, Bassma Kodmani, a toutefois affirmé que l’application de cet accord dépendait avant tout de Moscou.

“Nous voulons que la Russie persuade le régime d’appliquer l’accord. Nous ne nous attendons pas à ce que le régime le fasse de plein gré”, a-t-elle indiqué à l’AFP.

Poursuite des combats

L’accord prévoit l’instauration d’une trêve dans tout le pays, lundi au coucher du soleil, une amélioration des conditions de travail des organisations humanitaires et l’élaboration d’un plan ciblant les groupes islamistes.

Quelques heures après l’annonce de la conclusion de l’accord, l’armée syrienne attaquait toutefois des positions rebelles à Alep, dans l’espoir de gagner le maximum de terrain possible avant l’entrée en vigueur de la trêve. Cette opération se heurte toutefois à la résistance des rebelles qui ont dit prévoir une contre-offensive.

Des bombardements ont également été signalés à Idleb (nord-ouest). Des avions présentés comme russes ont visé un marché et d’autres quartiers de la ville, faisant au moins 24 morts, selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH).

Coordination anti-terroriste

John Kerry a demandé à toutes les parties de respecter l’accord. Le plan “nécessite de cesser toutes les attaques, notamment les bombardements aériens, et toutes les tentatives de gagner du terrain aux dépens d’autres parties de l’accord. Il requiert un accès humanitaire sans obstacle, durable à toutes les zones assiégées et difficiles d’accès, dont Alep”, a-t-il dit.

Sergueï Lavrov a pour sa part estimé que ce plan va aussi permettre de mettre en place une “coordination efficace pour lutter contre le terrorisme”. Si la trêve dure “une semaine”, les forces américaines accepteront de collaborer avec l’armée russe, a expliqué John Kerry.

Alors que Moscou doit faire pression sur le régime, Washington doit convaincre les rebelles de se dissocier des djihadistes avec lesquels ils sont notamment alliés dans les provinces d’Alep et Idleb. Le principal groupe concerné est le Front Fateh al-Cham, ex-Front al-Nosra qui a renoncé à son rattachement à Al-Qaïda mais reste considéré comme un mouvement “terroriste”.

“Une grande question est comment exactement les Etats-Unis et la Russie comptent déterminer les zones où l’opposition est suffisamment distante du Front Fateh al-Cham et celles où ils sont trop proches et qui constituent ainsi des cibles légitimes”, note Charles Lister, chercheur au Middle East Institute.

A ce sujet, M. Lavrov a annoncé la création d’un “centre conjoint” russo-américain destiné à coordonner d’éventuelles frappes. Objectif: “distinguer les terroristes de l’opposition modérée”.

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