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UNIGE: le courant électrique à l’origine de la diversité neuronale

La diversité des neurones corticaux peut être visualisée par différents marqueurs, par leur morphologie et leur connectivité. Denis Jabaudon/UNIGE sda-ats

(Keystone-ATS) En manipulant les propriétés bioélectriques des cellules-souches qui génèrent les neurones, il est possible de changer la composition cellulaire du cerveau au cours du développement. C’est ce que rapportent des chercheurs genevois et américains dans la revue Cell.

Présent chez tous les mammifères, le cortex cérébral est une structure complexe composée d’une multitude de types de neurones. Ils s’assemblent pour former des circuits contrôlant le mouvement, la perception ou le langage, a indiqué jeudi l’Université de Genève (UNIGE) dans un communiqué.

A chaque activité correspondent des circuits composés de neurones bien précis qui sont créés les uns après les autres au cours de l’embryogenèse par des cellules-souches nommées progéniteurs. Celles-ci sont présentes dans les profondeurs du cerveau.

“Nous nous sommes demandé comment ces progéniteurs savent quel type de neurones ils doivent fabriquer à chaque moment du développement de l’embryon”, explique Denis Jabaudon, professeur au Département de neurosciences fondamentales de l’UNIGE, cité dans le communiqué.

Charge électrique

Pour cette étude, l’équipe de l’UNIGE a choisi d’aborder la question sous un nouvel angle. “D’habitude, ce sont des facteurs génétiques qui sont les stars du fonctionnement cellulaire”, ajoute Ilaria Vitali, chercheuse au sein de l’équipe. “Ici, nous nous sommes intéressés à d’autres acteurs, les propriétés électriques des progéniteurs”.

En effet, si le rôle de l’activité électrique dans le fonctionnement des circuits du cerveau est bien établi, on ne savait jusqu’ici presque rien sur l’effet de l’électricité sur les propriétés des progéniteurs cérébraux.

Utilisant une pipette mesurant moins de deux microns de diamètre pour percer la membrane cellulaire, les scientifiques ont mesuré chaque jour la charge électrique des progéniteurs d’embryons de souris. “Nous avons constaté qu’alors que le foetus grandit et que les types de neurones fabriqués se complexifient, le voltage des progéniteurs augmente de plus en plus”, explique Denis Jabaudon.

Choisir le type de neurones

Afin de confirmer cette observation, les scientifiques ont modifié génétiquement des cellules embryonnaires. “Nous avons exprimé à la surface des progéniteurs des canaux synthétiques laissant passer des particules chargées électriquement, ce qui nous a permis de manipuler à notre guise leur voltage et de charger ou décharger ces cellules”, explique Sabine Fièvre, co-première auteure de l’étude.

Et effectivement, si les progéniteurs sont artificiellement chargés en début d’embryogenèse, ils fabriquent alors précocement des neurones apparaissant normalement à la fin du développement de l’embryon.

“Et inversement, si nous déchargeons les progéniteurs, ceux-ci fabriquent à nouveau des neurones apparaissant normalement plus tôt lors du développement de l’embryon”, s’enthousiasme le Pr Jabaudon.

Ces résultats démontrent pour la première fois que l’activité bioélectrique des progéniteurs joue un rôle capital dans la fabrication des différents types de neurones. Ceci pourrait expliquer les effets de certaines maladies du développement liées à une activité électrique anormale, comme par exemple l’épilepsie.

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