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Vaud veut faire se rencontrer agresseurs et victimes

Les rencontres se tiendront à la prison des Léchaires, à Palézieux (archives). KEYSTONE/JEAN-CHRISTOPHE BOTT sda-ats

(Keystone-ATS) Mettre face-à-face agresseurs et victimes pour amener l’auteur à prendre conscience des conséquences de ses actes et aider la victime à surmonter son traumatisme: le canton de Vaud lance un projet pilote de justice restaurative avec de jeunes adultes.

La justice restaurative – parfois aussi appelée justice restauratrice – permet d’échanger, d’établir un dialogue. Différentes formes existent: Vaud a opté pour le “dialogue restauratif”, qui se fera dès cet automne sur une base volontaire avec des jeunes adultes de 18 à 22 ans incarcérés à la prison des Léchaires, à Palézieux.

Pas avec victime directe

Cet espace d’échanges réunira des auteurs de crimes et délits avec des victimes de faits similaires, et non avec leur victime directe, a expliqué jeudi Sylvie Bula, cheffe du Service pénitentiaire. Ce projet pilote s’inspire de ce qui se pratique à l’étranger, en Belgique et au Canada, mais aussi à la prison de Lenzburg (AG).

Comme à Lenzburg, le canton travaillera en collaboration avec le “Forum suisse de justice restaurative”, qui sera chargé d’entendre les agresseurs et les victimes susceptibles d’y prendre part. Des groupes comptant deux à six détenus et un nombre comparable de victimes seront formés. Encadrés par des professionnels, ils se réuniront à huit reprises, au rythme de deux heures par semaine.

Eviter la spirale délictueuse

Un premier bilan sera tiré au premier trimestre 2020. L’objectif est que ces jeunes n’entrent pas dans une spirale délictueuse. La conseillère d’Etat Béatrice Métraux reconnaît que les effets de la justice restaurative ne sont pas établis scientifiquement, mais des études parlent d’une baisse du taux de récidive de 7 à 10%.

“Les auteurs n’ont pas toujours une pleine vision des conséquences de leurs actes sur une victime en chair et en os. La justice restaurative permet de les responsabiliser, de leur faire prendre conscience qu’il y a des personnes qui ont souffert et souffrent encore. Cela permet d’avancer dans le travail sur le délit et l’empathie”, a expliqué Sylvie Bula.

Victimes entendues

Du côté des victimes, la démarche leur permet de se faire entendre. Les victimes n’ont pas toujours eu l’opportunité de témoigner. “Elles ont envie d’être entendues et reconnues comme victimes. Des victimes m’écrivent et me disent: il a été condamné et moi ?”, a expliqué la cheffe du Département des institutions et de la sécurité.

La participation à ces dialogues restauratifs n’aura aucun effet sur l’exécution de la peine. Pas question d’espérer une réduction, a averti Mme Métraux. Le nouvel outil s’adresse en priorité aux auteurs de brigandages, de lésions corporelles ou de vols par effraction.

Béatrice Métraux souligne que la justice restaurative n’est pas un “positionnement politique”, mais une “mission” donnée par le programme de législature et les assises de la chaîne pénale. “On ne peut pas éternellement construire de nouvelles prisons. Il faut aussi trouver d’autres pistes”, a-t-elle ajouté. L’expérience ne nécessite pas de base légale particulière et le financement est estimé à 3500 francs seulement.

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