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Yémen: consultations à Genève achevées sans avoir vraiment démarré

L'émissaire de l'ONU Martin Griffiths refuse de blâmer les rebelles comme le fait le gouvernement pour les consultations à Genève. KEYSTONE/EPA KEYSTONE/SALVATORE DI NOLFI sda-ats

(Keystone-ATS) La première série de consultations à Genève vers une négociation de paix au Yémen s’est achevée sans vraiment avoir démarré. Selon l’émissaire de l’ONU, le dialogue a été lancé même sans les rebelles. Le gouvernement yéménite accuse ceux-ci d'”irresponsabilité”.

“Le processus pour une feuille de route vers la paix a démarré, pas de la manière que nous aurions souhaité, mais il a débuté”, a déclaré devant la presse Martin Griffiths. Peu auparavant, un responsable du gouvernement du président Abd Rabbo Mansour Hadi avait annoncé que la délégation allait quitter Genève.

Si M. Griffiths aura pu dialoguer avec celle-ci à plusieurs reprises, le premier processus depuis celui au Koweït en 2016 n’aura jamais pu débuter à plein régime en trois jours. Et ce en raison de l’absence des rebelles Houthis bloqués à Sanaa et qui ont notamment accusé le Britannique de n’avoir pas honoré un accord pour l’acheminement de blessés à Mascate, au sultanat d’Oman.

Ils demandaient aussi des garanties de pouvoir rentrer à Sanaa, dans la région du Yémen qu’ils contrôlent, depuis Genève. Contrairement à la situation observée il y a quelques mois à Oman où ils n’avaient pu rejoindre la capitale yéménite qu’après un dialogue avec l’Arabie saoudite, à la tête de la coalition en soutien aux forces du gouvernement.

Houthis accusés de sabotage

Devant la presse, le ministre yéménite des Affaires étrangères Khaled al-Yamani a accusé les Houthis de “saboter” une nouvelle fois les négociations. Il reproche à ces “conspirateurs d’un coup d’Etat” une “totale irresponsabilité”.

“Ce n’est pas un blocage fondamental dans le processus”, a tenté de relativiser de son côté M. Griffiths, un discours d’ailleurs qualifié “d’accommodant” par M. al-Yamani. Le gouvernement, qui n’était pas optimiste avant même le lancement des consultations, affirme que toute initiative de paix devra prendre en compte le rétablissement des “autorités légitimes” qui ne contrôlent que le sud du pays, le retrait des Houthis et leur abandon des armes lourdes.

L’émissaire a garantit que les Houthis “voulaient être ici et sont déçus”. “Personne n’a tenté de bloquer personne pour venir à Genève” et les rebelles seront présents lors d’une prochaine série de consultations, a-t-il affirmé. Il a refusé d’attribuer la responsabilité de ce décalage. “Ce n’est pas mon boulot de trouver des fautes. Mon boulot est de trouver un accord”, a-t-il dit.

Impossible pour le moment de dire quand la prochaine série de consultations aura lieu à Genève. “Il ne faut pas laisser trop de temps” entre deux périodes. Dans les prochains jours, l’émissaire va se rendre à Mascate et, si possible, à Sanaa pour dialoguer avec les représentants des rebelles Houthis. L’objectif reste de discuter de mesures de confiance pour donner un “signal d’espoir” aux Yéménites et à la communauté internationale.

Autorités prêtes à des libérations

Pour le moment, M. Griffiths n’aura pu aborder la question des détenus, de l’assistance humanitaire et de l’aéroport de Sanaa qu’avec le gouvernement. La première sera la priorité dans les prochaines semaines. M. al-Yamani s’est lui dit prêt à des libérations pilotées par le Comité international de la Croix-Rouge (CICR).

Au Yémen, des affrontements ont eu lieu vendredi à Hodeïda, ville portuaire importante où arrive la majorité de l’assistance humanitaire. Même si une trêve ne constitue pas de précondition pour avancer dans le processus politique pour l’émissaire de l’ONU.

Outre les parties, le conflit oppose également les soutiens régionaux des deux camps, la coalition saoudo-émiratie et l’Iran accusée d’alimenter en armes lourdes les Houthis. Un groupe d’experts vient de conclure à de possibles crimes de guerre. L’Arabie saoudite a elle récemment reconnu des “erreurs” dans un raid qui a coûté la vie à 51 personnes en août, dont 40 enfants.

Le Yémen est confronté à la “pire catastrophe humanitaire” dans le monde en raison du conflit depuis environ quatre ans, selon l’ONU. Trois quarts de la population dépend d’une assistance humanitaire et près de trois millions d’enfants sont atteints de malnutrition aiguë. Les prix des denrées ont doublé. Au total, le conflit a fait quelque 10’000 victimes.

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