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Transparency, une ONG sur le modèle d’Amnesty

Logo Transparency international. https://www.transparency.de/

Depuis sept ans, hommes d´affaires peu scrupuleux et fonctionnaires corrompus doivent compter avec Transparency International (TI). Fondée en Allemagne par un ancien de la Banque mondiale, cette ONG se veut championne de la lutte anticorruption.

Peter Eigen est un pro de l’aide au développement. Pendant 25 ans, il a partagé son temps entre le travail sur le terrain – principalement en Afrique et en Amérique latine – et l’enseignement universitaire. De 1988 à 1991, il a dirigé la mission régionale de la Banque mondiale en Afrique orientale.

En 1993, il fonde à Berlin la première section de ce qui deviendra Transparency International. Le constat de départ est simple: des quantités considérables d’aide au développement sont détournées pour finir dans les poches de personnages peu scrupuleux et le sujet reste tabou au point que personne n’ose en parler.

TI va oser le faire: en 1996, l’organisation publie son premier palmarès de la corruption mondiale. Les pays scandinaves sortent largement en tête de ce classement des nations «propres», aux côtés de Singapour et de la Nouvelle-Zélande. Et sans surprises, les derniers de la classe sont des pays en développement, avec un bonnet d’âne pour le Nigeria.

TI n’a jamais prétendu que ce classement est impartial, exact et objectif. En fait, il est basé sur des enquêtes d’opinion auprès des hommes d’affaires et la fiabilité des sources varie considérablement d’un pays à l’autre. Il n’empêche qu’il reçoit rapidement un large écho médiatique et incite les pays les moins bien notés à faire un effort, au moins pour corriger leur image.

La Suisse, longtemps classée dans les dix premiers, a rétrogradé l’an dernier au 11ème rang. Selon Anne Lugon-Moulin, coordinatrice de projets pour la section helvétique de TI, le niveau de corruption y serait d’ailleurs sous-estimé. En effet, le fédéralisme génère du copinage et du clientélisme que l’indice ne mesure pas, pas plus qu’il ne tient compte de la criminalité économique, puisqu’il ne mesure que la corruption publique.

Mais l’action de TI ne se limite pas à la publication de ce classement. Aujourd’hui, l’organisation compte des sections dans 82 pays, un peu sur le modèle d’Amnesty. Car si les problèmes sont en gros les mêmes partout, les solutions diffèrent énormément d’une région à l’autre. Ainsi, près d’un tiers des nations de la planète vivent encore sous un régime de droit coutumier et la lutte anticorruption y dépend bien plus largement du bon vouloir des personnes que de la promulgation de nouvelles lois.

Les principales armes des sections de TI sont donc le lobbying et la persuasion. Et l’organisation peut revendiquer fièrement d’être à l’origine de la Convention de l’OCDE contre la corruption ou du code de bonne conduite que viennent d’adopter onze des plus grandes banques du monde pour lutter contre le blanchiment.

Ces succès ne vont pas sans générer des critiques. Au printemps dernier, l’hebdomadaire satirique français Le Canard Enchaîné accusait TI de servir en fait les intérêts économiques américains, d’utiliser d’anciens agents de la CIA en Amérique latine et d’être largement financée par des entreprises privées.

A ces attaques, reprises peu après par Le Monde Diplomatique, Peter Eigen répond alors que ces accusations sont sans fondement et que la part de financement privé de TI ne dépasse pas 5 pour cent au niveau mondial.

La section suisse, quant à elle, est financée principalement par la Direction du développement et de la coopération et par le Secrétariat d’Etat à l’économie, mais bénéficie également d’un soutien important de deux grosses multinationales.

Marc-André Miserez

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