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Trois parmi les muses du Paléo

The Muse. Trois petits gars pour un son «énaurme». Paléo

The Muse, nouveau phénomène du rock britannique. Colossal. Dionysos, scandaleusement trop peu connu, Higelin, celui que l’on croît connaître. Jubilatoires.

Choix forcément subjectif parmi les grands moments de ce vendredi au Paléo festival de Nyon.

Le constat est banal, mais tellement vrai: pas un spectateur du Paléo (ni d’aucun grand festival, d’ailleurs) ne pourra jamais dire qu’il a tout vu. Même s’il court d’une scène à l’autre.

Ce vendredi, il y a Cali, Miossec et Thomas Fersen sous le Chapiteau. Pour prouver (ouf!) que la chanson française a une vie après Obispo et la Star Ac’. Il y a aussi The Darkness sur la Grande Scène, pour les nostalgiques du glam’ rock début seventies.

Et il y a encore tous les autres, les latinos – très présents cette année au Village du Monde -, les DJs, ceux qui montent, ceux qu’on découvre et ceux dont un pote vous dira toujours que vous avez «tout raté» en leur préférant une paëlla, une bière ou un sit-in autout d’un joint…

La bacchanale



Alors, tant qu’à faire, autant commencer par une découverte. Chouchou des programmateurs de Couleur 3, Dionysos n’a certainement pas encore la renommée qu’il mérite. Le public se masse pourtant en nombre devant la Grande Scène. Et personne ne sera déçu!

Depuis dix ans, cette bande de joyeux drilles ravit ceux qui désespéraient d’une créativité authentiquement éclectique à la française.

Aussi «pêchus» que Téléphone, nettement moins pompeux qu’Indochine, ces quatre garçons (et cette fille) pas vraiment dans le vent savent aussi bien rocker en anglais que «folker» en français.

Avec de l’inattendu au détour de chaque titre, de la folie, des clins d’œil et de l’humour à revendre, Dionysos fait souffler un vent de bacchanale sur un Paléo manifestement ravi.

L’autre «fou chantant»

Sous le Chapiteau, l’ambiance est nettement plus recueillie. Fans et curieux de 7 à 77 ans attendent Jacques Higelin, qui ce soir promet d’«enchanter Trenet».

«Il est le seul qui puisse dignement lui succéder», avait dit d’Higelin Charles Aznavour au soir de la disparition de celui qui était là – et tellement là! – avant tous les autres.

Maître Jacques ne s’est donc pas fait prier. Seul en scène avec le percussionniste Dominique Mahut, il revisite désormais, aux claviers et au grand piano, les mots et les hymnes du «fou chantant».

Et en matière de folie, Higelin en connaît un rayon. A bientôt 65 balais, il a toujours le boogie au bout des doigts et le scat au fond de la gorge. Alors tant pis pour la justesse parfois approximative et la voix qui se brise: le cœur et la passion sont réellement là.

Rien de compassé dans cet hommage, bien au contraire. Higelin fait vivre cette poésie tellement simple, tellement bien imagée et tellement drôle comme si les mots étaient les siens. Avec toute l’énergie électrique qui est sa marque de fabrique à lui.

Et la foule ne tarde pas à lui rendre un enthousiasme si généreusement dispensé. Même assis sur le piano, chantant a capella en frappant des pieds le flanc de l’instrument, Higelin parvient à communiquer le swing à l’assistance.

«Y a d’la joie» sous le Chapiteau. Et plus encore quand Jacquot reprend sa guitare. Entouré de deux comparses, il retrouve pour quelques minutes la rock n’roll attitude des temps lointains de «BBH 75». Et parvient à faire reprendre au public une version totalement déjantée de «Papa pique et maman coud».

Il est comme ça Jacques Higelin: tout le monde croît le connaître, mais il parvient toujours à surprendre. Savoureux. Et jubilatoire.

The Muse

Sur la fin du set toutefois, certains des plus jeunes quittent le Chapiteau. Sur la pointe des pieds, comme à regret. C’est que sur la Grand Scène se prépare la célébration ultime de la soirée.

Ils sont venus en masse. Et si les 12-18 ans s’agglutinent comme des sardines devant l’estrade, les aînés sont là aussi. Histoire de voir ce phénomène qui fait vibrer leurs ados.

Dès les premières notes, le constat s’impose: la réputation du nouveau monument du british rock n’est pas usurpée. Très vite, on se demande comment trois musiciens – et qui n’ont même pas 25 ans – parviennent à produire un son aussi riche.

Incontestablement, les petits gars du Devonshire sont du genre surdoués. Mais pour atteindre la gloire planétaire en cinq ans et trois albums, ils ont également travaillé dur. Sans chichis, sans caprices de star, sans errances et sans drogues, The Muse se concentre d’abord sur… la miouze.

A la guitare et aux claviers, Matthew Bellamy est également la voix du groupe. Une voix à la fois tellurique et plaintive, du genre à vous donner le frisson lorsqu’il vocalise comme le loup hurlant à la lune.

A la basse, Chris Wolstenholme a lui aussi les doigts plus rapides que l’éclair. Et ensemble, les deux complices érigent de véritables murailles de son. Un son souvent bidouillé à l’électronique, afin de faire sonner leurs cordes comme toute une batterie de claviers.

Et à la batterie, la vraie, celle où l’on frappe sur des peaux et des cymbales, il y a l’incroyable Dominic Howard. Rapide, précis, toujours inventif, il est le digne descendant des tous grands batteurs de rock, comme l’Angleterre n’en avait plus guère produit depuis des lustres.

Il y avait eu Radiohead, Placebo Oasis ou encore Nirvana avant eux. Désormais, il faudra compter avec The Muse.

Et les trois mesures de clin d’œil à Led Zep qu’ils intègrent à l’une de leurs intros ne sont pas qu’un gimmick. La filiation est directe. Le rock est toujours vivant!

swissinfo, Marc-André Miserez à Paléo

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