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La généralisation du vote électronique divise les esprits

Ein Mann vor einem Bildschirm
En collaboration avec le Département d'informatique de la Haute école spécialisée de Lucerne et Luxoft Holding Inc., la ville de Zoug a mis au point le premier système de vote électronique spécifique à l'utilisateur, basé sur blockchain développée en Suisse. Keystone

La volonté du Conseil fédéral de généraliser l’utilisation du vote électronique suscite des réactions contrastées. Si certains saluent une avancée significative, notamment pour les Suisses de l’étranger, les voix plus critiques mettent en garde contre les problèmes de sécurité qui pourraient aller jusqu’à mettre en péril la démocratie.

Le gouvernement suisse a annoncé mercrediLien externe son intention de mettre en consultation cet automne un projet de loi pour favoriser le vote électronique dans tous les cantons. Le gouvernement se base sur un rapport d’experts qui considère «sûre» et «fiable» la méthode testée plus de 200 fois en Suisse depuis 2004.

Le quotidien zurichois Tages-AnzeigerLien externe souligne toutefois dans son édition de jeudi qu’il existe une différence considérable entre le fait d’effectuer ses paiements bancaires ou de remplir sa déclaration d’impôt en ligne d’une part, et de voter par Internet d’autre part. «Le vote électronique concerne littéralement tout: la démocratie et sa crédibilité, les décisions tangibles qui affectent tout le monde. Et il n’y a pas de sécurité absolue contre la manipulation.»

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Vidéo de la Chancellerie fédérale sur la sécurité de l’e-voting en Suisse

La Suisse ne devrait prendre le risque d’introduire ce canal de vote que si les avantages retirés sont suffisamment élevés. Et c’est exactement ce que le Tages-Anzeiger remet en question. Le vote électronique permettrait difficilement de faire des économies. Il ne simplifierait pas non plus les procédures de décision démocratique.

Reste que le quotidien zurichois relève quelques avantages procurés par ce nouveau canal de vote: «Les votes des Suisses de l’étranger les plus éloignés de leur patrie parviendraient à temps, il n’y aurait plus de votes invalides et les résultats seraient disponibles rapidement».

Confiance ébranlée

La plupart des pays développés se sont jusqu’ici montrés très prudents face à l’introduction du vote électronique. Et ce n’est pas un hasard. Selon la Luzerner ZeitungLien externe, avec la généralisation prévue du vote électronique, le Conseil fédéral met en jeu l’un des facteurs de succès les plus importants de la Suisse: la confiance des citoyens dans leur système de démocratie directe. A l’ère des «fake-news» et des théories du complot, le simple fait qu’il existe un danger de manipulation des données menace de porter atteinte à cette confiance.

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Par ailleurs, les avantages offerts par ce troisième canal de vote sont faibles: même le Conseil fédéral ne s’attend pas à une hausse de la participation. Le gain en confort est en outre minime. Tous ces éléments amènent la Luzerner Zeitung à cette conclusion définitive: «L’introduction du vote électronique est tout sauf une priorité pour la Suisse.

Le quotidien de Suisse centrale oublie cependant les Suisses de l’étranger. Pour eux, le vote électronique revêt une importance majeure. L’Organisation des Suisses de l’étrangerLien externe (OSE) se réjouit donc que le Conseil fédéral ait décidé de mettre cette loi en consultation. «Il s’agit d’un pas en avant positif pour le vote électronique. Nous sommes d’autant plus heureux qu’au cours des récents débats parlementaires, des voix critiques se sont manifestées au sein de pratiquement tous les partis», affirme la directrice de l’OSE, Ariane Rustichelli, à swissinfo.ch.

Qui voudra dépenser autant d’argent pour les expatriés?

L’initiative du député de l’Union démocratique du centre (UDC / droite conservatrice) Franz GrüterLien externe, qui vise à limiter l’utilisation du vote électronique aux Suisses de l’étranger, ne plait pas à l’OSE. «Compte tenu des coûts élevés liés à l’introduction du vote électronique, nous savons très bien que les cantons ne voudront pas dépenser autant d’argent uniquement pour les Suisses de l’étranger», estime Ariane Rustichelli. Une acceptation de l’initiative signifierait donc à ses yeux la fin du vote électronique.

Franz Grüter, qui est à la tête d’une entreprise en informatique dans le civil, a quant à lui répété son opposition la plus totale au vote électronique dans une interview accordée à la chaîne de télévision alémanique SRF. «Avec les systèmes actuels, seuls quelques experts disposent d’une vue d’ensemble. Cela signifie que le risque de manipulation n’est peut-être même pas détectable. Une situation qui risque de compromettre massivement notre confiance dans les votations et les élections», a-t-il déclaré.

Sur Twitter également, les voix critiques n’ont pas tardé à se faire entendre:

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Traduit et adapté de l’allemand par Samuel Jaberg

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