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Une équipe du CICR enlevée au Congo

Au nord du Kivu, le CICR s'engage notamment pour la distribution de nourriture. swissinfo.ch

Le CICR a confirmé mardi à Genève l'enlèvement d'un délégué suisse et de sept de ses employés congolais dans l'est de la République démocratique du Congo (RDC). L'équipe est retenue depuis vendredi dans les environs de Fizi par le groupe Maï Maï Yakutumba.

L’incident s’est produit le 9 avril vers 14h00 locales dans la province du Sud-Kivu, alors que l’équipe du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) revenait d’une mission d’évaluation des besoins de personnes déplacées, explique l’organisation.

«Nous demandons au groupe qui détient nos collègues de les libérer au plus vite, a déclaré Franz Rauchenstein, chef de la délégation du CICR en RDC. Nous sommes en contact avec nos collègues, et leurs familles ont été informées de la situation». Le CICR ne donne pas le nom du délégué suisse enlevé pour l’instant, en l’absence d’accord de la famille.

«Les agents du CICR ont été interceptés de retour d’une mission de routine par des éléments du groupe Maï-Maï Yakutumba. Ils les ont contraints à les suivre jusqu’à Kasakwa», à environ 250 km au sud de Bukavu, chef-lieu de la province du Sud-Kivu, a affirmé à l’AFP une source humanitaire basée dans cette région.

Ces employés, parmi lesquels se trouvent «un délégué Suisse et deux chauffeurs congolais», ont ensuite été «dépouillés» par leur ravisseurs qui les retiennent à Kasakwa, a souligné cette source sous couvert d’anonymat.

La région du Sud-Kivu où l’équipe du CICR est retenue a été marquée par de violents affrontements qui ont provoqué le déplacement de milliers de civils ces derniers mois. Dans le Sud-Kivu, le CICR maintient une présence permanente à Bukavu, Uvira, Marungu, Minembwe et Fizi. L’enclavement de la région, les difficultés logistiques et les conditions de sécurité précaires rendent difficile l’accès à cette région.

Strictement humanitaire

La région du Sud-Kivu où l’équipe du CICR est retenue a été marquée par de violents affrontements qui ont provoqué le déplacement de milliers de civils ces derniers mois. «Nous insistons pour que le caractère strictement humanitaire, impartial et neutre de notre action soit reconnu et que nos collègues puissent bientôt
retrouver leurs proches», a souligné Franz Rauchenstein.

Dans le Sud-Kivu, le CICR maintient une présence permanente à Bukavu, Uvira, Marungu, Minembwe et Fizi. L’enclavement de la région, les difficultés logistiques et les conditions de sécurité précaires rendent difficile l’accès à cette région.

Le jour où cet incident s’est produit, une autre équipe du CICR venait de procéder à la remise officielle de 72 points d’eau réhabilités ou construits au cours des deux dernières années à Fizi. Ces travaux permettront aux plus de 20’000 habitants de la région de Fizi et de ses environs de bénéficier d’un meilleur accès à l’eau, indique l’institution.

Supplétifs

Anciens supplétifs des Forces armées de la RDC (FARDC), qui les traquent actuellement dans cette région, leurs croyances sont essentiellement basées sur la magie – ils s’aspergent d’un breuvage lors des combats pour se «protéger» des balles des ennemis.

Dans cette zone au relief semi-montagneux et difficile d’accès, les miliciens Maï-Maï administrent des villages en prélevant des taxes et exploitant les richesses minières. Les Maï-Maï du groupe Yakutumba, du nom de leur chef, estiment que les promesses de Kinshasa n’ont pas été tenues. Le processus de paix achoppe sur plusieurs revendications.

Après avoir accepté le processus de réintégration dans les Forces armées de République démocratique du Congo (FARDC), les Maï-Maï du Sud-Kivu ont reconstitué une coalition autour du territoire de Fizi, selon Radio-Okapi. L’enlèvement d’une équipe du CICR, dont un délégué suisse, est probablement lié à ce nouvel épisode de la guerre qui ensanglante l’est de la RDC depuis quinze ans.

Les Maï-Maï, dont le sigle veut dire Mouvement d’autodéfense pour l’intégrité et le maintien de l’autorité indépendante, sont constitués en parti politique. Eparpillés dans le Nord et le Sud-Kivu, ils sont divisés en une douzaine de sous-groupes différents.

Intégration bloquée

L’intégration des rebelles Maï-Maï du chef Yakutumba Amuri avait commencé en octobre dernier, dans le cadre du processus de paix, sous l’égide de la Mission de l’ONU (MONUC).

Mais les négociations ont buté sur plusieurs revendications, comme la reconnaissance des grades des officiers Maï-Maï au sein des FARDC et le contrôle du territoire de Fizi. Des rebelles Maï-Maï du territoire d’Opala ont été reconnus coupables l’an dernier de viols massifs contre 30 femmes et condamnés à de lourdes peines de prison.

Selon le site mediacongo.net, citant lundi un des chefs rebelles Maï-Maï Kifuafuam, une nouvelle coalition comprenant 17 groupes armés différents (dont les Maï-Maï Yakutumba) a été formée pour «unir leurs forces après que le gouvernement du président Kabila n’ait pas réussi à mettre concrètement en œuvre les différents accords de paix».

Les experts pensent que les rebelles se sont sentis trahis suite au dernier remaniement ministériel qui ne compte aucun membre des groupes armés ayant signé les accords de paix de mars 2009. Ces accords prévoyaient l’intégration des chefs des groupes armés dans le gouvernement de Kinshasa.

swissinfo.ch et les agences

Les collaborateurs du CICR ont souvent été victimes d’enlèvements. Jusqu’à présent, ils ont toujours été finalement libérés.

Voici les enlèvements des 20 dernières années:

22 octobre 2009: enlèvement du délégué Gauthier Levèvre dans le Darfour. Libéré le 18 mars.

15 janvier 2009: trois collaborateurs sont pris en otages par des séparatistes musulmans sur l’île de Jolo, aux Philippines.

Début février 2008: deux collaborateurs locaux sont enlevés par des inconnus près de Peshawar, au Pakistan.

Septembre 2007: des Talibans enlèvent 4 collaborateurs en Afghanistan.

Septembre 2006: deux employés sont enlevés par des séparatistes en Ethiopie.

De 1999 à 2003: plusieurs enlèvement de collaborateurs locaux et étrangers dans le Caucase.

Fin 2002: deux employés enlevés au Congo-Brazzaville.

Février 1999: deux délégués et 5 collaborateurs locaux sont enlevés par l’Armée de libération du Sud-Soudan.

Juin 1998: six collaborateurs – dont un Suisse – sont enlevés en Ethiopie.

Avril 1998: dix collaborateurs – dont deux Suisses – sont enlevés dans la capitale somalienne.

1991: cinq délégués sont enlevés en Afghanistan.

Juin 1990: enlèvement de deux délégués par les rebelles du Renamo au Mozambique.

Août 1990: enlèvement de deux délégués au Liban. D’une durée de dix mois, il s’agit du plus long enlèvement.

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