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Vaccin anti-nicotine: la Suisse dans le coup

Ce vaccin n'empêchera pas de fumer. Keystone

Une start-up à Genève, des recherches à Lausanne, des tests cliniques à St-Gall: la naissance du premier vaccin anti-nicotine pourrait ressembler à une success story helvétique. Mais il faudra faire vite: Anglais et Américains sont aussi dans la course.

Si notre organisme est capable de produire des anticorps pour neutraliser les virus, il devrait aussi savoir en fabriquer pour barrer la route à une substance aussi nocive que la nicotine. C’est de cette hypothèse qu’est parti Erich Cerny, chercheur indépendant en immunologie et fondateur, avec son complice Ronald Lévy, de la société Chilka SA.

Au départ, Erich Cerny cherchait un vaccin contre l’héroïne. Devant le manque d’intérêt des pouvoirs publics et de l’industrie privée, il a choisi de s’attaquer à l’herbe à Nicot.

En collaboration avec les instituts de biochimie et de chimie organique de l’université de Lausanne, le chercheur genevois est parvenu à mettre au point ce premier vaccin anti-nicotine. Les tests cliniques devraient débuter l’année prochaine à l’hôpital universitaire de St-Gall, sous la direction de son frère, le professeur Thomas Cerny.

Les essais sur les souris ont montré que le mécanisme fonctionne, puisque ces animaux se mettent à produire des anticorps spécifiques. Le principe est d’empêcher la nicotine de parvenir au cerveau et de briser ainsi le mécanisme de dépendance.

Le vaccin n’empêche toutefois pas de fumer, pas plus qu’il ne provoque le dégoût chez celui qui inhale les volutes. Et bien sûr, il ne protège pas contre les autres effets nocifs de la fumée, comme le goudronnage des poumons ou l’encrassage des artères.

Il n’empêche qu’une fois débarrassée de la nicotine, la cigarette pourrait bien perdre tout attrait. C’est le pari que fait Erich Cerny: selon les experts, seule une petite partie des fumeurs consommeraient du tabac sans pouvoir «bénéficier» des effets de son principe actif.

L’enjeu est de taille, puisque selon une autre étude, une diminution de 10 pour cent du nombre des fumeurs au niveau mondial aurait autant d’effets bénéfiques que tous les soins prodigués par l’ensemble des spécialistes du cancer.

Pour l’heure toutefois, Erich Cerny et ses collègues butent surtout sur des problèmes de financement. Chilka a déjà passé un accord avec le laboratoire Serolab d’Epalinges (VD) pour les contrôles de qualité et la fabrication en série, mais l’argent manque encore en amont. Et jusqu’ici, les pouvoirs publics n’ont pas manifesté plus d’intérêt que pour le vaccin anti-héroïne en son temps.

Il faudra néanmoins faire avec les moyens disponibles, et même aller vite. Cantalab en Angleterre et Immulogic aux Etats-Unis travaillent également sur des vaccins anti-nicotine et bénéficient – eux – d’importants soutiens de leurs gouvernements.

Marc-André Miserez

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