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Vaccin anti-sida: le gratin scientifique réuni à Lausanne

Touchant avant tout les pays pauvres, le sida est aussi une question humanitaire. Keystone

Quelque 800 scientifiques et chercheurs sont réunis depuis lundi à Lausanne pour faire le point sur la recherche d’un vaccin anti-sida.

Ce congrès de trois jours a pour but de relancer les efforts politiques et financiers de l’Europe en vue de la mise au point du produit.

«Il y a un urgent besoin d’un vaccin préventif pour mettre fin à la pandémie de sida, déclare Giuseppe Pantaleo, président du Congrès AIDS Vaccine 2004. C’est un défi scientifique en faveur d’une cause humanitaire.»

L’Europe à la traîne



On estime qu’il faudra investir de 15 à 23 milliards de francs au cours des dix prochaines années pour que l’un des différents projets de vaccin anti-sida puisse être cliniquement utilisable.

L’effort financier est donc énorme. Mais le problème, selon Giuseppe Pantaleo, c’est que les pays européens sont à la traîne des Etats-Unis en termes de financement.

Le gouvernement des Etats-Unis consacre environ 250 millions de dollars (320 millions de francs) par an à la recherche pour un vaccin. «Il n’y a rien d’équivalent au niveau européen, rappelle Giuseppe Pantaleo. Or c’est justement ce dont nous avons besoin.»

«L’Europe doit se réveiller et fournir le même type d’effort pour le vaccin qu’elle l’a fait dans le domaine thérapeutique», poursuit le président du congrès, par ailleurs responsable du Service d’immunologie et d’allergie du Centre hospitalier et universitaire vaudois (CHUV) de Lausanne.

Aussi un problème humanitaire



Le congrès de Lausanne a été organisé par le CHUV et par EuroVacc, une fondation à buts non lucratifs basée en Suisse et qui a pour mission de développer un vaccin contre le sida.

Le ministre suisse de la Santé s’est déplacé en personne pour son ouverture. Pascal Couchepin s’est déclaré en faveur d’une stratégie à long terme. Il a indiqué que les enjeux de la production, de la diffusion et de la régulation d’un éventuel vaccin devraient être envisagés dès à présent.

Pascal Couchepin a aussi souhaité, le moment venu, un «accès efficace pour tous» à ce traitement préventif. Il a demandé aux chercheurs de collaborer avec les gouvernements sur cette question et celle de savoir qui devait financer les vaccins.

«Il s’agit d’un problème de santé publique, mais aussi d’un problème humanitaire, estime de son côté Giuseppe Pantaleo. La Suisse est très sensible à cette problématique et son engagement est dans la droite ligne de sa tradition humanitaire.»

Le président du congrès espère donc le renforcement de l’engagement de la Suisse en faveur de l’initiative internationale pour un vaccin contre le sida (IAVI).

Fondée en 1996 et active dans 23 pays, dont la Suisse, cette organisation a développé avec ses partenaires des «vaccins candidats». Une trentaine d’entre eux sont actuellement en phase de tests.

Renforcer la collaboration scientifique



Mais la réalisation d’un vaccin et son test sur des êtres humains «sont encore lointains», en raison de la mutation du virus, fait remarquer le Prix Nobel de médecine Rolf Zinkernagel, directeur de l’Institut d’immunologie expérimentale de l’Université de Zurich.

Jusqu’à présent, aucune personne atteinte par le virus n’a pu l’évacuer par une réponse immunitaire. «Il n’y a donc pas de modèle à reproduire», indique Anthony Fauci, directeur de l’Institut national des maladies allergiques et infectieuses, aux Etats-Unis, et conseiller de la Maison Blanche sur le sida.

Dans un premier temps, le vaccin devra contribuer à maintenir le virus à un niveau peu élevé chez les nouveaux sujets infectés. La protection totale contre le virus ne pourra être envisagée que dans une seconde étape, selon Anthony Fauci.

Autre obstacle, la progression de la recherche a été retardée par le manque de coopération entre les pays. Les résultats obtenus aux Etats-Unis ne sont pas interprétés avec la même grille de lecture en Australie ou en Europe, explique Seth Berkley, PDG et fondateur de l’IAVI.

Ce problème se pose également au sein même de l’Union européenne, regrette le Français Michel Kazatchkine, directeur de l’Agence nationale des recherches sur le sida (ANRS).

Pour le résoudre, un Groupement mondial pour le vaccin contre le VIH, sous la direction du Dr. Pantaleo, doit mettre sur pied des techniques standardisées. Les scientifiques ont également annoncé la création prochaine de centres «virtuels» pour regrouper les informations sur les résultats des recherches.

Une épidémie en augmentation



Le sida a été diagnostiqué pour la 1ère fois en 1981. Depuis cette date, il a causé 20 millions de morts. Aujourd’hui, quelque 38 millions de personnes dans le monde sont infectées par le virus VIH.

Selon les chiffres du programme des Nations-Unies contre le sida – ONUSIDA – les taux d’infection sont encore en croissance dans plusieurs parties du monde, notamment en Afrique sub-saharienne où l’on recense 70% des infections.

L’an dernier, environ 5 millions de personnes ont contracté le virus HIV dans le monde: 4,2 millions d’adultes et 700 000 jeunes de moins de 15 ans.

Et ce n’est pas fini. «En raison d’une augmentation alarmante des cas de contamination par le virus HIV, on déduit que 45 millions de cas nouveaux de contamination se déclareront d’ici 2010, avertit Giuseppe Pantaleo. Il y a donc un besoin urgent d’une vaccination préventive.»

swissinfo et les agences

Le sida a causé 20 millions de mort depuis 1981.
L’an dernier, environ 5 millions de personnes ont été infectées par le virus.
70% des personnes infectées se trouvent en Afrique sub-saharienne.
On estime à 45 millions le nombre de nouvelles infections d’ici 2010.

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